La coalition a essuyé un revers supplémentaire dans sa volonté de gagner le coeur et les esprits des Irakiens. Les responsables irakiens assurent que des centaines de civils ont été tués et blessés lors des bombardements de la coalition américano-britannique sur les villes irakiennes. Ces victimes civiles sont imputées, par la coalition, à des tirs manqués de la DCA irakienne. Alors que le Pentagone s'acharne quotidiennement à convaincre les médias de sa volonté d'épargner les civils qui tombent quand même par dizaines sous le déluge de bombes, une nouvelle «bavure», une de plus, a eu lieu dimanche dans le centre de l'Irak. En effet, des soldats américains ont ouvert le feu sur un véhicule à un poste de contrôle près de Najaf, tuant sept femmes et un enfant irakiens. «En dernier recours, et après les sommations d'usage, les soldats ont tiré dans l'habitacle. Quand ils ont ouvert la porte du véhicule, ils ont trouvé 13 femmes et des enfants. 7 étaient morts, deux blessés et quatre indemnes», selon le porte-parole militaire US qui justifie cette nouvelle tuerie par les craintes d'attentats-suicide contre les forces de la coalition. Cette fusillade à un check-point américain illustre la nervosité des soldats après une première attaque suicide des combattants irakiens. Le commandement américano-britannique dénonçait, depuis le début de la guerre, les méthodes «terroristes» des combattants irakiens, qui se battent en civil et sont qualifiés «d'escadrons de la mort», et s'est indigné de l'approbation, au plus haut niveau de l'Etat irakien, de l'attaque suicide de samedi. D'ailleurs, les unités spéciales britanniques mènent depuis une opération de recherches de pseudo-«saboteurs irakiens» dans plusieurs localités du sud de Bassora, relève le journal russe, Izvestia, estimant que «cette action était pratiquement la copie exacte des ‘‘ratissages'' que les troupes russes font en Tchétchénie». Les Britanniques, armés de fusils automatiques, font irruption dans les maisons, en enfonçant les portes, mettant dehors tous les habitants et à genoux les hommes en âge de combattre. Dans un des secteurs de la banlieue de Bagdad visé quotidiennement par les raids, des journalistes ont découvert lundi un hameau détruit par un missile, où 20 civils dont 11 enfants ont été tués dans la nuit du 29 au 30 mars, selon des villageois rescapés rapportent certaines agences. Lors du raid qui a visé le complexe présidentiel et détruit trois habitations dans la banlieue de Al-Janabieh au sud-est de Bagdad, dix personnes ont été blessées. En outre et selon le ministre de l'Information irakien, Mohamed Saïd Al-Sahhaf, «un avion militaire américain a attaqué lundi deux bus, sur la route entre Bagdad et Amman, dans lesquels se trouvaient des civils, dont des Américains. Ces passagers sont des boucliers humains qui défendaient des sites civils» en Irak, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Bagdad. Les blessés ont été évacués vers l'hôpital de la ville de Routbah. Ces massacres de civils ont soulevé une vive polémique dans le monde. Et la décantation n'est pas finie. Le drame de lundi est en tout cas un revers supplémentaire dans la campagne de la coalition pour gagner «le coeur et l'esprit» des Irakiens. Ce qui devrait renforcer les nombreuses critiques internationales du conflit. Comble de l'ironie, les Etats-Unis, partie active de cette guerre, viennent de rendre public leur rapport annuel sur les droits de l'Homme dans le monde où ils critiquent aussi bien les pays alliés qu'ennemis, notamment - et sans surprise - l'Irak. Un rapport qui se veut le reflet d'une vision des droits de l'Homme faisant partie des valeurs de l'Amérique, devant être étendues au reste du monde et servant à justifier l'intervention en Irak. «Répandre les valeurs démocratiques et le respect des droits de l'Homme à travers le monde est l'un des premiers moyens que nous ayons pour faire avancer les intérêts des Etats-Unis en matière de sécurité nationale», est-il écrit dans l'introduction. Présentant le rapport à la presse, le secrétaire d'Etat, Colin Powell, a estimé que le s du régime de Saddam Hussein justifient largement le conflit en cours. Pourtant, les dernières bavures de la coalition ont démontré qu'une guerre propre n'est qu'utopie d'autant que les «frappes chirurgicales» n'ont jusqu'ici touché que... les civils.