La célébration du 1er-Mai sera l'occasion pour le patron de la Centrale de faire un discours-programme que tous les observateurs attendent avec impatience. Même si les turbulences ne sont plus aussi grandes, force est de constater que les rapports donnent l'air de se dégrader entre l'Exécutif et son principal partenaire social, l'Ugta en l'occurrence. En témoigne, notamment, l'annulation des deux rencontre prévues ce mois-ci entre Ali Benflis et Abdelmadjid Sidi Saïd dans le cadre de la préparation de la rencontre bipartite prévue, elle aussi, durant le mois d'avril et qui vient, de facto, d'être reportée à une date indéterminée. La Centrale, forte de 4 millions de sympathisants et adhérents depuis sa démonstration de force des 25 et 26 février dernier, «n'a plus l'intention de se laisser faire», nous ont indiqué, hier, des sources qui lui sont proches. Ces dernières ajoutent que «l'Ugta compte aller vers une autre démonstration de force à l'occasion de la célébration de la Fête internationale des travailleurs». Exceptionnellement, les festivités officielles de la Centrale auront lieu à Aïn Témouchent, à l'ouest du pays. Le choix du lieu, d'où le secrétaire général de l'Ugta doit prononcer un discours très attendu, répondrait à deux soucis majeurs. Le premier est de «se démarquer des autorités qui ont pour habitude de commémorer l'événement soit à Alger, soit à Hassi Messaoud». Le second est de rappeler que «l'Ugta n'a jamais perdu de vue la détresse des citoyens même si, bien souvent, elle a été obligée d'accompagner certaines réformes douloureuses pour le salut de la nation et de la République». Aïn Témouchent, pour rappel, a connu un séisme meurtrier. L'Ugta, en ces douloureuses circonstances, avait été à l'avant-garde des aides apportées aux victimes et aux sinistrés. La présence des dirigeants de l'Ugta dans ces lieux servira, donc, à superviser l'état d'avancement des travaux de reconstruction, mais aussi la manière dont ont été distribuées les aides matérielles et financières collectées par la Centrale. Nos sources ajoutent que Sidi Saïd, qui s'est fait moins présent ces derniers temps, compte revenir très fort à la charge à l'occasion de son discours du 1er Mai prochain. Dans son discours, croit-on savoir, «de véritables lignes rouges seront tracées aux pouvoirs publics si ces derniers ne veulent pas que l'Ugta recourt à une seconde grève nationale, plus étendue dans le temps, ou à des débrayages cycliques et sectoriels dont les conséquences sur les programmes des pouvoirs publics peuvent s'avérer catastrophiques à une année à peine de l'élection présidentielle». Le mot est lâché. Même si la Centrale évite de parler de politique actuellement, «il ne fait aucun doute, déclarent nos sources, au vu de la dégradation de la situation sociale et économique dans notre pays et ce, malgré l'embellie financière jamais atteinte de toute l'histoire de l'Algérie indépendante, que l'Ugta peut-être amenée à favoriser le candidat dont le programme se rapprochera le plus de ses revendications et des aspirations des travailleurs et chefs d'entreprises créateurs de biens et de richesses». Contrairement aux deux présidentielles passées, nous dit-on, l'Ugta n'appellera pas à voter et à faire campagne pour tel ou tel candidat, mais elle suggèrera à ses militants et sympathisants d'opter pour la personne qui répond le mieux et le plus à leurs aspirations. Dans tous les cas de figure, le débat est encore loin d'être tranché au sein des instances de l'Ugta, désormais déchirée entre les deux principaux courants qui la traversent, le FLN et le RND en l'occurrence. Toujours sur le plan social, le ton continue de monter entre la Centrale et certains membres du gouvernement Benflis. Il s'agit, comme chacun le sait, de Hamid Temmar, en charge des privatisations, et de Chakib Khelil, responsable des secteurs de l'Energie et des Mines. Temmar, qui a compris qu'il n'y avait pas de possibilité de s'entendre avec les responsables nationaux de l'Ugta dans ses démarches qualifiées de «dogmatiques» par ces derniers, a tenté de contourner cet écueil en traitant directement avec les syndicats d'entreprise comme cela avait été convenu lors de la dernière rencontre entre Benflis et Sidi Saïd. L'Ugta, qui y voit une «nouvelle tentative de récupérer une mesure positive à l'origine, aurait donné ordre à ses structures de ne pas traiter avec les membres du Mppi (ministère de la Participation et de la Promotion des réformes) alors qu'il est envisagé le boycottage de la bipartite au cas où Hamid Temmar y prendrait part.» Cette rencontre, qui s'annonce décisive à plus d'un titre comme s'accorde à le reconnaître l'ensemble des observateurs, aura aussi à se pencher sur le fameux Boassem de Chakib Khelil dont notre journal avait fait état en exclusivité il y a de cela plusieurs mois, mais aussi sur le projet de loi sur les hydrocarbures. Pour l'Ugta «il est certain qu'un simple gel de ce document ne suffit pas puisqu'il peut être réactivé à tout moment. Ce que nous voulons, c'est son retrait définitif et officiel». La bipartite, dont la tenue pourrait se faire dans le courant du mois de mai, à moins que l'importance de ses dossiers ne la reporte tout simplement à septembre prochain, aura aussi à se pencher sur le statut général de la Fonction publique et le pouvoir d'achat. Ce sont là des dossiers aussi épineux que lourds. Ils sont également, quoi qu'en disent les apparences, directement liés à la présidentielle d'avril 2004. Nous y reviendrons avec force détails dans nos prochaines éditions.