La présidente de la section correctionnelle avait sous les yeux un dossier de coups et bléssures volontaires à l´aide d´une arme blanche. Et devant elle, l´inculpé, un handicapé unijambiste, flanqué de cette «terreur des barres», Maître Benouadhah Lamouri qui allait sortir de son tiroir à espiègleries, un cas de jurisprudence qu´allait utliser la juge. La victime se plaindra de hogra, l´inculpé de provocation. Maître Lamouri, motivé, prend la parole et assure au procureur et à Mme la présidente qu´il sera très bref. Il y avait de quoi. L´avocat ressemble à ne pas s´y méprendre à une vieille qui a arrêté un rôdeur. «Mme la présidente, il me plaît d´abord de claquer des doigts et réclamer l´excuse de provocation; qu´ensuite, en l´absence de certificat médical de tant de jours, et émanant surtout d´un médecin légiste, comportant le cachet rond de l´institution hospitalière, la défense a le devoir de demander au petit avocat que je suis de...» Maître, le tribunal respecte le grand avocat que vous êtes, et toute votre large et fructueuse expérience, mais il se trouve qu´effectivement le certificat médical est dûment absent du dossier et que par conséquent nous gagnerions du temps à aller aux seuls faits que l´inculpé a largement reconnus et nous.... «Madame la présidente, par expérience justement, l´honorable représentant du ministère public n´attend que la permission du tribunal pour requérir rudement et lourdement une peine de prison ferme...» Excusez-moi, Maître, le parquet s´appuie sur deux délits, pas un seul. Nous avons, outre les coups et blessures volontaires mais surtout le port d´arme alors, Maître... avait coupé avec un large sourire Kennas le procureur de l´audience du jour. Et comme pour mettre tout ce beau monde pas sur la même longueur d´ondes, la présidente se retourne une énième fois vers l´inculpé: «Alors on ne pouvait pas maîtriser et garder son sang-froid et éviter tout ce dérangement et le déclenchement de temps pour toutes les parties, y compris le tribunal qui a autre chose à faire?». L´inculpé baissse la tête puis la relève en lançant à haute voix pour la première et dernière fois: «On m´a méprisé, on m´a provoqué pour que je réagisse plus qu´un valide. Je regrette mon geste et je demande l´indulgence, merci.» Plus tard, Maître Lamouri va puiser dans les remords de son client pour aller vers la répétition de l´excuse de provocation. Pour le défenseur, un dossier qui «´´parle´´ est maîtrisé», C´est pourquoi, faisant appel au bons sens du tribunal et à son indulgence, il articule: «C´est la relaxe pure et simple. Néanmoins, restons dans l´inculpation et mettons en avant le fait qu´il est universellement connu que nul n´a le droit de se faire justice» a lancé le conseil qui a expliqué qu´après avoir été rossé, l´inculpé s´est appuyé sur son unique jambe, a tiré le couteau en vue de se défendre d´abord et ensuite de se venger de son agresseur... La juge se frotte le front avec le pouce et l´index et rend le verdict sur le siège tant le dossier s´est avéré aisé et sans zones d´ombre. Messaoud Kennas, le procurreur avait, lui, pris en considération le port d´arme. Il avait requis une peine de prison ferme de dix-huit mois. Elle inflige tout de même quatre mois de prison avec sursis, ayant eu une oreille attentive à l´intervention de Maître Lamouri à propos de la provoc´ et surtout que cela ait touché non seulement un handicapé, mais un invalide. En cela, nous croyons savoir que le législateur n´a jamais prévu ce cas d´espèce. Alors, voilà un exemple de jurisprudence.