En matière d´émission de chèque sans provision, les victimes parlent d´escrocs et les magistrats d´inculpés. Une grave affaire d´abus de confiance et escroquerie à travers l´émission de deux chèques sans provision de l´ordre de cent soixante-dix millions dont cent cinq pour Ahmed Fettouhi, père d´une petite fille et entrepreneur de son état dans la ville des Roses où il exerce aussi le métier, ô combien valeureux, de préparateur physique, et du champion Mohamed Benguesmia, et le reste soixante-cinq millions pour Bellamane. Le procès s´est déroulé en l´absence des deux inculpés, Z´hour Ourabi, l´émettrice des deux chèques en bois et Fayçal Med Gacem, revendeur de voitures à l´occasion et ce, dimanche bêtement abusé et escroqué. Maître Mohamed Abdi, l´avocat des deux victimes, Fettouhi et Bellamane, avait mal digéré la remarque du juge de la section correctionnelle du tribunal de Blida lorsqu´il avait fait prêter serment à Fettouhi qui avait, ce lundi, deux casquettes: victime et témoin. Les débats, même en l´absence des deux inculpés, ont été rudes. Le président s´était montré vigilant et ne permettait à personne de brûler la ligne «continue» qui fait que l´audience soit perturbée. L´expérience et la sagesse de l´avocat de la partie civile ont beaucoup pesé sur le plateau de la balance. Il est vrai que les faits en eux-mêmes demeurent graves car ils sont partagés entre deux victimes. La première d´abord, Abdelkader Bellamane, qui fait dans les transactions «informelles» dans les véhicules, se voit être approché par une connaissance ami-collègue- touche-à-tout pour un éventuel bénéf conséquent, et pour ce faire, il lui demanda de lui avancer un peu moins de trois cent millions de centimes. Crédule et probablement gagné par les opérations passées entre eux deux et réussies, Bellamane lui remet une «406» d´une valeur de près de deux cent millions de centimes - selon la victime, et une somme rondelette de cent cinq millions de centimes. L´affaire fut conclue surtout que les deux «dindons» s´étaient vu offrir en garantie, deux chèques qui s´avèreront être en bois. Quant à Ahmed Fettouhi, la seconde victime, elle avait eu aussi un chèque de la part de Z´hour, la parente de Gacem qui avait reçu lui, la «petite somme» de soixante-cinq millions de centimes. En contrepartie, il reçoit une reconnaissance de dettes. Maître Abdi, qui avait suivi religieusement les débats où ses deux clients et les témoins avaient joué seuls sur le terrain déserté par les deux inculpés Z´hour et Fayçal. Fettouhi aura même l´occasion de montrer son ire au président, lorsqu´il dit ne pas comprendre pourquoi les deux inculpés n´ont jamais répondu à la police, au parquet et ce, dimanche au tribunal qui avait pourtant obéi à la loi en renvoyant le procès, le temps que les inculpés qui étaient en liberté provisoire, se présentent. Mais là aussi, nos justiciables ont fait preuve d´ignorance totale des us et coutumes, des procédures en vigueur, les renvois et tutti quanti - abordant les deux inculpations - l´abus de confiance et l´escroquerie - faits prévus et punis par les articles 376 et l´article 374 du Code pénal, deux délits punissables «pour le premier, rappellera l´avocat, de trois mois à trois ans d´emprisonnement et d´une amende de cinq cents dinars à vingt mille dinars et pour le second, de un à cinq ans de prison et d´une amende qui ne saurait être inférieure au montant du chèque ou de l´insuffisance». Le comble, dans ces histoires d´émission de chèques de garantie, c´est que la loi est piétinée par la majorité des juges du siège pour ne pas dire la quasi-totalité des magistrats qui «omettent» d´appliquer l´alinéa «III» de l´article 374 qui dispose in extenso que: «Quiconque, émet, accepte ou endosse un chèque à la condition qu´il ne soit pas encaissé immédiatement mais à titre de garantie, est puni d´un emprisonnement d´un à cinq ans, et d´une amende qui ne saurait être inférieure au montant du chèque ou de l´insuffisance.» Mais que voulez-vous? C´est comme ça, car nous avions posé mille fois la question de la non-application des termes de l´alinéa III de l´article portant sur l´escroquerie, silence radio, pincement des lèvres, moue sans ton ni mouvements éloquents, rien! Reste le procureur: il va requérir robotiquement la peine de trois années de prison ferme à l´encontre des deux inculpés. Le dossier est mis en examen sous huitaine. En attendant, les victimes, elles, restent dubitatives. Seul Maître Abdi est optimiste pour le mandat d´arrêt.