Un malheureux retraité a été traîné à la barre pour escroquerie. Le juge lui rend le sourire... Un retraité inculpé d´escroquerie tout comme un second inculpé non détenu, répondent aux premières questions de Hadj Rabah Barik, le rigoureux président de la section correctionnelle du tribunal de Koléa (cour de Blida). Deux frères ont vendu séparément, le même lot de terrain à deux personnes différentes qui ont déposé plainte. Un lot de terrain de cinquante mètres carrés dont le coût est de cent cinquante millions de centimes, situé à Bou-Ismaïl est au milieu de ce dossier. Une avance de quatre-vingt millions de centimes avait été effectuée. Le lendemain, il y a eu retournement de situation à propos d´une double appartenance de ce lot de terrain. La vente qui avait été clôturée par la rédaction d´un acte notarié, était sujette à beaucoup de rumeurs, de «on dit» et autres supputations autour de la régularité de cette vente. Le retraité inculpé-détenu suit la genèse de l´affaire dont les grandes lignes étaient données par le juge très pointilleux. Il apprendra par ailleurs, aux deux inculpés qu´il y avait une femme dans ce dossier qui avait acquis le dit lot pour cent quatre-vingt millions de centimes. La dame confirme toutes les opérations sauf qu´elle allait déplorer la seconde vente au profit d´une tierce personne! Catastrophe! L´escroquerie y est! Entre-temps, histoire de casser la monotonie des débats, le président s´aperçoit que le représentant de l´APC de Bou-Ismaïl était absent. Il s´agit de sous-location d´un bien communal sans qu´à l´APC on puisse s´en inquiéter. Le détenu est informé qu´il n´avait droit qu´à la location et non au désistement. Le bail est incessible et pourtant il a état sous-loué! un délit haut en couleur, qui met en cause deux frangins mouillés jusqu´aux os. Au moment, où des familles cherchent un toit, d´autres jouent aux dès et à la loterie. Bizness, Bizness! On dit et écrit autrement: les affaires sont les affaires! Bonjour les dégâts. Hadj Barik pointe l´index en direction des deux inculpés en leur rappelant qu´ils avaient piégé la bonne dame qui était heureuse d´avoir trouvé un espace pour aménager un toit à sa grande famille. Puis apparaît le différend entre les frères inculpés. L´aîné en veut à son cadet qu´il charge et désigne comme étant plus aisé que lui. La première victime assure qu´il avait appris la double vente du lot. La dame affirme qu´elle s´était rendue en compagnie de ses enfants chez le second inculpé pour finaliser la vente alors qu´elle ignorait que le terrain appartenait désormais au premier acheteur. «C´est pas mal comme procédé» siffle le magistrat qui ajoute que les deux frères ont vendu chacun à une personne différente le même lot de terrain. L´aîné crache une info: «J´ai demandé à mon cadet de m´aider à construire car il avait, lui, plus de moyens.» Fatima, la seconde victime jure qu´elle ignorait tout de cette première cession de terrain à une tierce personne. «Je ne sais lire, ni écrire. On m´a demandé cent quatre vingt-millions. J´ai effectué une avance de quatre-vingt millions de centimes.» dit-elle, complètement retournée, depuis qu´elle avait prononcé la somme (énorme) avancée et qu´elle craint perdre à jamais surtout si le «revendeur» est condamné à une peine de prison ferme, car c´est quasi-connu qu´un détenu ne peut rien entreprendre depuis la taule! Nasser Eddine Amzeri substituant. Maître Laïd Yahia, pour la partie civile flétrit le délit et met en avant l´ignorance de Fatima analphabète qui a été abusée et donc escroquée. Il effectue les traditionnelles demandes de dommages et intérêts tout comme Saïd, la première victime d´escroquerie qui a lui aussi réclamé son dû (cent cinquante millions de centimes!) Pour les inculpés, Maître Gasmi, Maître Kourtel et Maître Ouali Laceb ont plaidé juste. Ils sont restés en plein dans le droit et le droit pur. Maître Gasmi déplore des absences. Celle du représentant de l´APC et même du notaire qui devaient être poursuivis pour complicité d´escroquerie. Ensuite, le trio d´avocats ont minimisé les faits surtout que l´argent est dans la salle d´audiences entre les mains de l´épouse du cadet détenu. Maître Laceb va droit au but: il s´en prend au...parquet! «A entendre les demandes, nous sommes à Blida, en audience criminelle!» s´exclame l´avocat écrasé par une forte humidité, avant de mieux exprimer son ire et d´articuler «qu´on se croirait dans une audience consacrée au...foncier et que lorsqu´on suit les demandes du ministère public, c´est une criminelle». Samir Hemali, le procureur ricane, le juge sourit, Maître Laceb poursuit. Si Maître Gasmi a minimisé le dossier et réclamé la relaxe, Maître Laceb fait mieux: il flétrit les poursuites par une histoire où les stars principales sont l´offre et la demande avec, en sus, le notaire, qui est un sérieux partenaire, auxiliaire, allié de la justice. Rappelant le jeu du désistement qui est roi en ces temps de vaches maigres, pour ce qui est de l´immobilier et du foncier, le défenseur évoque le titre de propriété que seul un magistrat du civil peut traiter. Maître Kourtel sera le dernier intervenant dans ce dossier que chaque partie «lit» avec ses propres lunettes de vue! L´avocat d´Alger refuse de revenir sur les faits qui sont ce qu´ils sont. Il va plutôt s´étaler sur une lecture objective de l´attitude des deux victimes...victimes des «haies-administratives» rencontrées sur leur parcours d´arriver à prendre possession du lot de terrain fraîchement acquis. «Il n´ y a aucune manoeuvre frauduleuse de la part de mon client, la vérité est que les victimes n´ont pas le droit de se constituer partie civile et il n´y a pas d´escroquerie», a articulé l´avocat qui verra le jeune avocat des victimes répliquer à propos du rejet des demandes de la défense. Rappelons que Samir Hemali, le procureur a réclamé une peine de prison ferme de trois ans. Le dernier mot prononcé par le retraité, qui avait apprécié la défense qui l´a si bien épaulé va permettre à Hadj Barik de mettre le dossier en examen et de décider de la relaxe. Maître Gasmi, l´avocat rouquin a...verdi de...plaisir car heureux comme un frais papa.