La France semble miser sur l'humanitaire pour renforcer une amitié, née il y a à peine 3 ans. Dans cette catastrophe qui frappe l'Algérie, force est de constater un élan sans précédent de la communauté internationale. L'une des premières nations occidentales à avoir exprimé sa solidarité n'est autre que la France. Jacques Chirac, son Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, et le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy ont manifesté le soutien de l'Etat et du gouvernement français à l'adresse du peuple algérien. Le premier ministre, après avoir exprimé sa sympthie à partir du Canada où il était en visite, il a téléphoné hier à son homologue algérien, Ahmed Ouyahia. Plus encore, une première dans les annales de la Ve République, le président Chirac a adressé un message télévisé aux Algériens. Les expressions de solidarité ne se sont pas arrêtées au stade des officiels. L'on apprend que plusieurs communes de France ont voté des budgets spéciaux destinés essentiellement à l'Algérie. La Croix-Rouge française a, quant à elle, lancé un appel pour la collecte de dons aux fins de les acheminer vers les zones sinistrées. De plus, l'éminent professeur en médecine et ancien ministre de la Santé, Bernard Debré, est arrivé hier en début d'après-midi à Boumerdès, à la tête d'une équipe médicale. Cela sans parler des équipes de secouristes dépêchées à Boumerdès dès l'annonce du sinistre. Au plan médiatique, il est aisé de constater une large couverture de l'événement avec, en prime, une attitude qui tranche avec les discours quelque peu racistes qui distinguent certaines chaînes de télévision française lorsqu'il s'agit de parler de l'Algérie. Ce sont là autant de manifestations de solidarité de la France qui font qu'on la sente très présente en Algérie depuis mercredi dernier. En fait, la sollicitude de l'Hexagone à l'adresse de notre pays se lisait déjà en filigrane dans les discours prononcés par Jacques Chirac, lors de sa visite d'Etat à Alger. «La refondation des relations» entre les deux pays semble imposer à la France une attitude de soutien envers l'Algérie dans les moments difficiles. L'on a constaté un pareil élan de solidarité de la part de la France lors des inondations de Bab El-Oued, où le président Chirac s'y est rendu quelques jours seulement après la catastrophe. La présence renforcée de la France aux côtés des sinistrés du séisme confirme, en fait, une certaine volonté de ne manquer aucune occasion pour marteler que la page douloureuse de la Guerre d'Algérie est définitivement tournée dans l'esprit de l'Etat français, tout au moins. Aussi, les Algériens, traditionnellement sensibles à toute marque de sollicitude, seront-ils amenés à revoir par eux-mêmes leur approche des relations qui les lient au peuple français. Il est important de signaler, à ce propos, que ce grand élan de solidarité est rendu possible grâce au rapprochement initié par les deux chefs d'Etat algérien et français après l'arrivée de Bouteflika à la présidence de la République. Seulement, si beaucoup de chemin a été parcouru dans le sens de la réconciliation historique entre les deux nations, il demeure tout de même beaucoup d'embûches. La question des harkis et des juifs, la reconnaissance officielle de la torture pratiquée durant la Guerre de libération, sont autant de sujets épineux qui entravent ladite réconciliation. En attendant d'aborder frontalement, «en amis» ces dossiers de l'histoire, la France semble miser sur l'humanitaire pour renforcer ce lien ténue d'amitié, né il y a à peine 3 ans, à l'occasion de la visite d'Etat de Bouteflika en France. Les ennemis de «la refondation» sont nombreux des deux côtés de la Méditerranée. Le raffermissement des liens par la solidarité est un passage obligé pour gagner la bataille des retrouvailles.