Incontestablement, la France assume la responsabilité des massacres de 45.000 Algériens le 8 mai 1945. Tout comme l´Allemagne assume ses crimes de la Seconde Guerre mondiale. Sauf que cela n´a pas exonéré individuellement tous les Allemands dont beaucoup ont été retrouvés, jugés et condamnés. La responsabilité est donc partagée entre l´Etat et ses fonctionnaires. En Algérie, le 8 mai 1945, il y avait un semblant d´Etat français et beaucoup de responsables français qui sont à l´origine de ce crime contre l´humanité. Il faut, pour comprendre, replacer l´évènement dans son véritable contexte de l´époque. L´Algérie, colonie française, était sous l´autorité de Vichy. Des Français d´Algérie s´organisèrent, dès 1940, clandestinement pour lutter contre les partisans de Pétain (des occupants contre l´occupant des occupants). Le groupe d´Alger était dirigé par José Aboulker d´une des plus grandes familles juives d´Alger et dont le grand-père, Isaac Aboulker, grand rabbin d´Alger, fut condamné à mort et exécuté en 1815 à Alger sous l´autorité du Dey. Le deuxième groupe dirigé par Roger Carcassonne, un autre juif, industriel de son état, né à Maghnia, était constitué à Oran. Ce sont ces groupes qui prêtèrent main forte, suite à un accord secret conclu le 23 octobre 1942 à Cherchell, aux troupes américaines et anglaises qui ont débarqué en Algérie le 8 novembre 1942. Deux jours avant le débarquement, les deux groupes se sont réunis dans la capitale au 26 rue Michelet (actuellement Didouche Mourad) au domicile du père de José Aboulker. C´est là que fut mis au point le putsch d´Alger sous le nom de code «Opération Torch» (à ne pas confondre avec le putsch manqué de Salan en 1961) qui a neutralisé les officiers français de Pétain. Commence alors un «ballet» politique assez complexe. Le général Giraud, qui commença par s´opposer avec ses troupes à l´avancée de l´Allemagne, fut fait prisonnier, le 19 mai 1940, par les nazis. Il s´évade d´Allemagne en 1942 et rejoint le maréchal Pétain. Il succède à l´amiral Darlan, assassiné, et prend les commandes à Alger pour le compte de Vichy. Il abroge le fameux décret Crémieux. En juin 1943, il coprésidera avec le général de Gaulle le Comité français de la libération nationale. Le 3 juin 1944, De Gaulle l´écarte et prend seul, à partir d´Alger, la tête du Gouvernement provisoire de la République française. C´est en août 1944 qu´eut lieu la libération de Paris mais c´est l´année d´après, le 7 mai 1945, que l´Allemagne se rend sans conditions. Le lendemain eurent lieu les massacres de la population civile, en Algérie. Pendant que la France faisait la fête à Paris, qui tenait le «gouvernail» en Algérie? Il y a, bien sûr, le tristement célèbre général Duval. A Guelma, il y avait le sous-préfet Achiary qui devint en 1961 chef de l´OAS. Le gouverneur d´Algérie était Yves Chataigneau. En réalité, Paris n´avait aucune prise sur ce qui se passait, à l´époque, en Algérie. Ce qui explique le télégramme du 11 mai 1945 de De Gaulle (mal informé) qui ordonne l´intervention de l´armée (pour rétablir l´ordre) sous le commandement de Duval. Ce dernier avait déjà fini son sale boulot. Ce qui explique aussi qu´une semaine plus tard, le 18 mai 1945, une commission d´enquête officielle est confiée au général Paul Tubert qui sera bloqué à Alger sans pouvoir remplir sa mission. C´était la grande confusion en France à l´époque. Quand on sait que c´est un groupe de volontaires (ceux de l´opération Torch) qui «sauva» l´Algérie en 1942, pourquoi les historiens qui travaillent sur les massacres de Sétif, Guelma, Kherrata, n´ouvrent pas ce dossier et nous dire pourquoi ce puissant groupe «Torch» n´a pas évité le génocide.