l'homme a pris la responsabilité d'éviter le massacre en le tuant dans l'oeuf. la marche n'aura pas lieu le 14 août, tel que l'avait envisagé la coordination des mouhafadhate du parti dans le Grand-Alger la semaine dernière. C'est Ali Benflis qui en a donné l'ordre hier après-midi non sans avoir pesé le pour et le contre avant de conclure à son ajournement. Pas de panique donc, les chancelleries et les observateurs n'auront pas l'occasion de voir des Algériens s'entretuer parce qu'un ministre de l'Intérieur zélé n'a pas voulu reconnaître ses torts. Bref, la bataille de rues escomptée par ceux qui, depuis trois mois, n'ont cessé de jeter de l'huile sur le feu pour faire couler le sang de leurs compatriotes n'aura pas lieu... Décampez, il n'y a rien à voir ! Le secrétaire général du parti du FLN, Ali Benflis en a décidé ainsi et pour s'en expliquer, il a écrit hier après-midi à chacune des mouhafadhate de la capitale pour qu'elles sachent les motivations qui l'ont conduit à prendre une décision qui, en d'autres circonstances, aurait suscité une grande part de dégâts matériels, des blessés et peut-être des morts. Bref, tout est bien qui finit bien. Pour autant demain ou après-demain, certains citoyens vont sûrement tenter de cogiter pour essayer de cerner au mieux les raisons qui ont incité Ali Benflis à stopper net les préparatifs des mouhafadhate du Grand-Alger à la perspective d'un tel affrontement. Une raison nous paraît plausible pour qui connaît la mentalité de Ali Benflis et le respect qu'il éprouve pour son prochain : c'est celle qui consiste à empêcher le sang des Algériens de couler comme d'empêcher aussi l'Algérie de sombrer dans des dérives chaotiques qui finiraient en fin de parcours par la transformer en brasier et sa population livrée à une débâcle qui la jetterait, démunie de tout, sur les routes à la recherche d'abris pour fuir les massacres...Ce ne sont pas les partisans de la «politique de terre brûlée» qui manquent à ce pays. Au-delà de tout calcul politicien et même s'il n'y est pour rien, Benflis n'a jamais cessé de déplorer la mort de plus de 50 jeunes tués en Kabylie parce que la sérénité et le calme avaient fait défaut à certains responsables de notre pays...Ali Benflis est un responsable intelligent et actif. Son souci dépasse de loin les contingences que peut produire une phase dangereuse dans un pays qui souffre de mauvaise gouvernance comme l'Algérie depuis plusieurs années. Engagé depuis plus de dix ans à défendre les principes selon lesquels l'Algérie ne saurait briller de tout son éclat si elle faisait l'impasse sur l'instauration d'un Etat de droit, le secrétaire général du parti du FLN n'a jamais permis que des Algériens se fassent traiter comme des infra-humains auxquels la justice de notre pays n'avait pas accordé le droit d'être assistés d'un conseil ni le droit aux proches de leur rendre visite. Sur ce point, justement, il a été amené contre vents et marées à s'insurger contre le traitement qui a été infligé aux 15.000 personnes déportées dans l'Extrême-Sud algérien sous prétexte qu'ils étaient présumés appartenir à la nébuleuse islamiste. Ali Benflis qui occupait alors le poste de ministre de la Justice dut mettre fin à sa collaboration avec le Premier ministre, Sid-Ahmed Ghozali, en tout bien tout honneur, mais en évitant d'aliéner ses principes fondamentaux. Il tombe donc sous le sens qu'on n'a pas à faire à un homme à l'échine souple, qui, au premier claquement de doigt, rengainerait ses arguties et mettrait aussitôt son pouce sur la couture de son pantalon avant d'obéir et de claquer misérablement des talons. S'il a décidé d'interdire la marche du 14 août prochain outre les raisons qu'on vient d'évoquer auxquelles est à ajouter le fait que le FLN est légaliste, c'est aussi parce que le ministère de l'Intérieur en a interdit officiellement le déroulement. L'interprétation de la décision de Ali Benflis restera quelque temps libre et contrastée selon les hommes et les qui s'efforceront de la comprendre, mais une fois toutes ces nuances décelées et comprises, on comprendra alors que l'homme qui a pris la responsabilité d'éviter le massacre en le tuant dans l'oeuf, est un jeune homme dont la majestueuse influence sur son parti ne fait plus de doute. Juriste de haut rang, Ali Benflis n'ignore pas ce qu'est une Constitution, fut-elle imparfaite comme celle de 1996 qui accorde au Président de la République des prérogatives illimitées et dont, visiblement, certains de ses collaborateurs usent, et abusent sans tenir compte des réactions que leurs agissements pourraient susciter dans le pays. Nous refaisons ouf! Quant à nous, pour expurger toute notre angoisse, en sachant, par ailleurs, que même si elle était tout à fait expurgée, après que le secrétaire général du FLN eut pris magistralement ses responsabilités de ne pas faire couler le sang des Algériens, il restera encore et toujours la crainte jusqu'à son éventuelle extinction de voir le ministère de l'Intérieur s'enfoncer dans la violation de la loi en continuant d'encourager ces voyous à attaquer les permanences du FLN et à vouloir à tout prix inventer un «FLN-bis». Ce qui est impossible et ils le savent bien!