L'auteur du célèbre film La Colline oubliée Venu présenter son livre Anza, l'auteur a refusé de se mettre dans la peau d'un écrivain, tenant à son statut de cinéaste. «Je ne suis pas écrivain, Anza à l'origine, était un scénario pour un film mais qui s'est transformé en roman faute de moyens pour le réaliser», déclare d'emblée le cinéaste algérien Abderrahmane Bouguermouh, le samedi dernier dès 14h au café littéraire de Béjaïa. Il n'a pas aussi manqué d'exprimer ses émotions en se retrouvant dans la grande salle du Théâtre régional qui porte le nom de son défunt frère dramaturge, Malek Bouguermouh, et aussi dans la ville de Yemma Gouraya. Enfant de la vallée de la Soummam, dont Bougie est toujours la capitale, Abderrahmane Bouguermouh en nostalgique authentique a été ravi de retrouver sa belle rose malgré les nombreuses modifications qui l'ont transformé sur le plan urbanistique notamment. «La belle rose qu'était Bougie, je ne la reconnais plus aujourd'hui». Plus connu surtout pour ses oeuvres cinématographiques dès le début des années 60, avec des productions telles «Kahla ou baïda», «La reine des abeilles», «Cri de pierre» ou encore l'adaptation du roman de feu Mouloud Mammeri, «La colline oubliée», qui l'a propulsé au devant de la scène culturelle en général et du cinéma en particulier, l'enfant terrible du 7e art algérien insiste sur le fait qu'il n'est qu'«un témoin du siècle». En cinéaste averti, Abderrahmane Bouguer-mouh s'est reconverti malgré lui en écrivain témoin d'histoire devant une assistance dense et mixte et admirative à souhait et, surtout, attentive aux moindres déclarations de l'homme, engagé et militant des causes, venu présenter son livre intitulé Anza qui veut dire les cris (Gémissements) des morts en kabyle. L'enfant prodige d'Ighzer Amokrane, dans la Vallée de la Soummam, s'est laissé fondre dans une rétrospective de son parcours d'homme libre, lequel parcours s'est heurté à plusieurs obstacles liés essentiellement à la censure et au manque de moyens. «Je n'avais pas les moyens de ma politique en matière de réalisation d'oeuvre cinématographiques en plus des nombreuses censures auxquelles j'ai du faire face», avait-il déclaré, avant d'ajouter: «Malgré les nombreuses épreuves et autres intimidations dont j'ai fait l'objet je n'ai pas fléchi. Certes, c'est la production qui en a pris le coup mais tant pis devant mes principes d'homme engagé et parfois même enragé... Je ne regrette absolument rien. je n'ai pas assisté à un moment de paix. Dans ma vie, après la guerre c'était la répression». À la question de savoir «comment le cinéaste s'est converti en écrivain», le cinéaste a tenu à rappeler qu'il réfute le titre d'écrivain pour rester dans le sillage du 7e art. «Je ne suis pas dans l'écriture littéraire, je suis juste un cinéaste qui écrit des scénarios pour des films». L'hôte du café littéraire a confié à l'assistance avoir été traumatisé par les dramatiques événements de Mai 45 (alors qu'il n'avait que 9 ans) d'où son souhait de réaliser un film, lequel scénario s'est transformé en livre en tenant à jouer son rôle de témoin de l'histoire sur lesdits évènements, d'où le titre Anza, un livre de 477 pages et édité par Casbah Editions (2009). A la question de savoir pourquoi il n'a pas souhaité adapter «Nedjma» de Kateb Yacine, il avouera sans équivoques que la tâche n'était pas aussi facile qu'on le pensait «Porter à l'écran un roman comme Nedjma n'est pas du tout une tâche facile même si on a abordé la question plusieurs fois avec «Kateb». Avant de rejoindre la salle où un nombreux public l'attendait impatiemment pour une vente-dédicace, Bouguer-mouh, humble, sage et réserve en forçant le respect par son calme, paisible, toutefois très usé physiquement, qui est aussi pour les adeptes du 7e art en particulier une légende vivante dans la vallée de la Soummam, s'est déclaré lors de cette bénéfique rencontre littéraire, prêt à aider les jeunes dans son domaine. «Je suis tout à fait disposé à mettre au service de la jeunesse mon expérience ainsi que mes connaissances techniques en matière cinématographique. Je suis même disposé à mettre des scénarios au service des cinéastes, et je pense au film sur Taos Amrouche que je veux confier à Ali Mouzaoui pour le réaliser.»