Belkhadem a carrément pris politiquement ses distances par rapport au groupe qui a déposé plainte contre la direction du FLN. Si plusieurs éventualités sont envisageables, les «redresseurs» n'en maintiennent pas moins un seul scénario futur avec de menues variantes sur le plan des détails. Dans sa conférence de presse animée ce samedi, le coordonnateur du mouvement de redressement avait joint sa voix à celle de Abdelhamid Si-Afif en indiquant que «ce conflit est exclusivement politique», ajoutant, contrairement à ce que disait l'homme assis à sa droite, Mohamed Seghir, porte-parole du mouvement, que «les plaintes ont été déposées à titre individuel par des militants mécontents, ce qui n'engage en rien la responsabilité du mouvement de redressement». Il faut dire que cette position, toute nouvelle, vise à prévenir tout risque de nouveau revers depuis la décision de justice rendue par le Conseil d'Etat en faveur du FLN légal, et créant un cas important de jurisprudence venu interdire à l'ensemble des autres juridictions de s'immiscer dans les affaires internes d'un parti politique. Avant que Abdelaziz Belkhadem ne développe cette position, pour le moins étonnante, le mouvement assumait pleinement ses «plaintes», s'en glorifiait même à la suite de la décision de justice prise au début du mois passé pour interdire la tenue du congrès extraordinaire du FLN. Après la décision du Conseil d'Etat, venue donner raison au FLN légal de Ali Benflis, c'est le porte-parole du mouvement, secondé par l'avocat constitué en ce sens, qui s'est chargé d'animer une conférence de presse au niveau de leur siège provisoire. Difficile, donc, de croire au brusque désintérêt de Belkhadem aux choses de la justice. A moins, disent des observateurs avertis, qu'«il ne s'agisse d'une ruse visant à endormir la vigilance des uns et des autres, afin que la justice puisse trancher sans contraintes en faveur des redresseurs». Le scénario semble d'autant plus plausible, que les mêmes sources ne laissent pas d'ajouter que «le dernier mouvement opéré dans le corps des magistrats ainsi que le putsch qui a fini par avoir raison du président de leur syndicat devraient donner à réfléchir aux juges avant de prendre la moindre décision indépendante». Toujours est-il que les membres les plus influents de la coordination ne l'entendent pas de cette oreille. Abdelhamid Si Afif, chargé des finances et de la préparation du congrès de redressement, qui a, de tout temps, défendu la thèse que «ce conflit est exclusivement politique», nous a indiqué que «le congrès extraordinaire aura lieu quel que soit le verdict du tribunal d'Alger» appelé à statuer aujourd'hui sur le fond de la plainte déposée par les redresseurs pour annuler l'ensemble des décisions prises lors du 8e congrès de ce parti. M.Daâdoua, chargé des élus, se montre plus explicite. Il précise en effet que «trois cas de figure peuvent se présenter, donnant tous les trois lieu à un même scénario avec de très légères variations n'altérant en rien le fond du sujet. Dans le cas où la justice rendrait un verdict qui nous est favorable, le FLN devra refaire son congrès, huitième du nom, avec la direction issue du septième congrès, sous la direction de Benflis, mais en appliquant des règles plus démocratiques, sans exclusion aucune. Si la justice nous déboute, nous irons quand même vers le congrès de redressement du parti en appelant l'ensemble des militants et cadres à se rassembler autour de nous pour le sauvetage du parti». Ce qui étonne, en revanche, c'est le troisième cas. La même source, en effet, ajoute que «si la justice décide de reporter son verdict à une date ultérieure, le congrès de redressement aura quand même lieu dans les délais impartis», c'est-à-dire dans la seconde moitié du mois prochain. Si le conflit n'était pas lié à la présidentielle en général, et au soutien à la candidature de Bouteflika en particulier, il eût été plus judicieux de poursuivre dans la démarche, et d'attendre la décision de justice que les redresseurs disent respecter.