«La gestion d'une wilaya se fait par rapport à des objectifs» Bouira vient de célébrer, comme toutes les villes d'Algérie, le 50e anniversaire de l'Indépendance. Une question que tout le monde se pose et qui s'impose aujourd'hui: qu'est-ce qui a changé dans cette wilaya qui compte plus de 6000 chahids? Les festivités organisées à l'occasion du Cinquan-tenaire de l'Indépendance ont été grandioses mais n'ont pas fait l'unanimité. L'hommage rendu aux martyrs reste le point fort de cette célébration. Après un demi-siècle d'une liberté retrouvée et 38 années promue au rang de wilaya, il reste beaucoup à faire à Bouira. Nier les avancées enregistrées jusqu'à maintenant, serait faire preuve d'amnésie et d'un acte dilatoire. Crier à la satisfaction reste une façon de nier une réalité quelquefois difficile. 11 walis se sont succédé à la tête de cette wilaya. Deux avaient fini dans des affaires scabreuses chacun et, selon le contexte, a fait son travail. Tous n'ont pas atteint les objectifs fixés quand quelques-uns ont simplement failli à leur mission. Le véritable essor, du moins en apparence, a commencé ces trois dernières années où toute la wilaya est devenue un vrai chantier à ciel ouvert. Pour ne pas faire des procès d'intention, il est nécessaire de focaliser sur les réalisations et leur impact sur le citoyen, unique critère d'une évaluation objective. En 2012, plusieurs administrations de la wilaya de Bouira continuent de dépendre de Tizi Ouzou, Blida et Sétif... Une nouvelle stratégie de travail «La gestion d'une wilaya se fait par rapport à des objectifs et non en comparaison à ses semblables.» Cette affirmation est celle du wali, méthode de travail rappelée à chaque session de l'APW. Quels faits saillants auront caractérisé la vie pendant une année au niveau de la wilaya de Bouira? Même s'il a été réjouissant pour certains, morose pour d'autres, le bilan de l'année est en dents de scie d'un secteur à un autre et d'une région à une autre. La tendance globale reste acceptable comparativement aux exercices antérieurs et qui ont amené Bouira à accuser un retard dans son développement. La remise à niveau demeure une priorité et un grand objectif. Promu wilaya en 1974, elle est restée une daïra de la wilaya-mère. La preuve est donnée par la dépendance administrative d'un grand nombre d'organismes et administrations publiques dont les directions générales et régionales sont excentrées. Les banques, Sonelgaz, l'ADE, les impôts, l'ex-Sntr, la Cnep... sont autant de services publics implantés au chef-lieu de wilaya, mais relevant de Blida, Tizi Ouzou et Sétif. Que retenir de cette année où de grands efforts ont été faits mais où beaucoup reste à faire. La lutte contre le chômage, l'emploi et malgré la mise en place de plusieurs formes de recrutement, la demande d'un travail décent, durable et suffisamment rémunéré, resteront un rêve que beaucoup vont devoir différer à 2013, voire plus. Le phénomène à l'origine de l'ensemble des mécontentements vécus durant l'année concerne toutes les régions de la wilaya. Sour El Ghozlane au sud et dans ce qui a été qualité de l'affaire «Enad» aura occupé plusieurs fois l'espace médiatique quand ce groupe national, spécialisé dans la fabrication des détergents, avait licencié plus de 500 travailleurs temporaires. Plusieurs actions de rue avaient été menées par une jeunesse en quête de stabilité. Après le chômage et ses répercussions sur la société, le logement reste le second dossier qui aura monopolisé l'attention pendant toute l'année. «Une demande cumulée des années durant, face à une offre toujours insuffisante», cette phrase résume les déboires d'un secteur où ni le privé, ni le public ne donnent l'impression de maîtriser la situation. Chaque opération de distribution est synonyme d'émeutes et de réactions violentes. Même si Bouira n'a pas connu des émeutes, plusieurs listes avaient suscité des mécontentements à Aïn Bessem, Bouira, Sour El Ghozlane... La raison est évidente. Lassés d'attendre éternellement un toit, les citoyens usent de tous les subterfuges pour faire partie des listes. La crainte d'être confronté à la colère populaire a amené les pouvoirs publics à retarder les opérations de distribution comme au chef-lieu de wilaya où des milliers de logements attendent d'être affectés en se dégradant au quotidien. Le cas d'école reste celui des 600 logements Cnep Immo qui attendent leurs bénéficiaires depuis plus d'une année. La recherche d'un toit demeure le souci de tout Algérien majeur. Ni le million de logements annoncé par le Président, ni la réalisation des reliquats des années passées, ni la diversité des formules et dispositifs... ne sont arrivés à résorber une demande de plus en plus pressante. Ce déséquilibre, source de beaucoup d'instabilité au sein de la société, ne doit pas pour autant minimiser les efforts faits depuis. En premier lieu, les dix dernières années en matière d'inscription, de réalisation et ensuite, la diversité des programmes qui vise à toucher toutes les couches de la société. S'agissant du reste à réaliser (RAR) la wilaya compte un programme de 425 unités inscrites avant 2005, 500 affectées dans le cadre du Programme des Hauts-Plateaux et 2000 inscrites dans le cadre du Quinquennal 2005-2009. Pour les programmes 2010-2014, le nombre de logements inscrits est de l'ordre de 6 250 auxquels s'ajoutent 3000 logements octroyés dans le Programme complémentaire. Pour le logement rural et depuis 2005, la wilaya a bénéficié de 43.283 aides à la construction d'une habitation individuelle en milieu rural. Précisons que la formule est une réussite totale puisqu'elle a suscité l'engouement et a participé considérablement à la lutte contre l'exode vers les villes. Le segment du logement social participatif (LSP), une formule qui aura montré ses limites, compte 7 391 unités inscrites depuis 2005 à ce jour. Parce que le modèle laisse le champ libre aux promoteurs qui, dans plusieurs cas, ont lésé les bénéficiaires, l'autorité a remplacé cette formule par le LPA. Le gaz, l'eau, les routes: des satisfactions Concernant l'année 2011, il est à noter que la wilaya a réceptionné 5 983 logements tous programmes confondus, 10 568 sont en cours de réalisation et 21 450 ont été inscrites pour l'exercice 2011. L'Opgi et l'Agence foncière de wilaya ont initié un programme promotionnel de 375 logements répartis à travers 4 communes, Bouira, Mchedallah, Lakhdaria et Sour El Ghozlane. Dans le cadre du lancement du programme LPL, le 5 juillet a été la date symbole retenue pour lancer plusieurs chantiers. La commune de Bouira a vu la mise en chantier de deux projets de réalisation entrant dans un projet global de 750 logements publics locatifs (LPL) inscrits au titre du Quinquennal 2010-2014, le premier projet, doté d'un quota de 500 LPL est en réalisation, depuis février dernier, sur une assiette de 32 500 m2 du versant Nord de la commune de Bouira. Au chef-lieu et suite à la courageuse décision d'éradiquer les haouchs, un problème a surgi. L'égoïsme de certains propriétaires qui auront tenté de tirer un maximum de profit. Le LSP annoncé en grande pompe a fini par montrer ses limites puisque dans 90% des cas, il n'a été rentable qu'aux promoteurs. La situation des 137 postulants Aadl qui attendent depuis 4 ans le début des travaux reste un cas décole d'une administration aux mains liées devant l'abus de cet organisme qui travaille avec l'argent du citoyen. Une note d'orgueil et de satisfaction: l'habitat rural qui a connu ces deux dernières années une nette avancée. Plus de 20 000 unités et aides ont été attribuées. En apportant des correctifs quant au droit de construire en hauteur, ou encore de faire bénéficier les célibataires, de faire bénéficier plusieurs membres d'une même famille sous la forme d'un habitat groupé... les décideurs ont contribué à booster ce segment d'habitat qui reste un moyen pour lutter contre l'exode vers les villes. L'année 2012 restera aussi l'année où tous les projets inscrits ont été lancés dans les délais. Ce point positif est à mettre à l'actif du wali qui met l'accent et la pression sur son administration en veillant en continu les projets. La grande satisfaction pour ce bilan demeure sans conteste le gaz naturel. Onze distributions publiques ont été réceptionnées permettant à des populations jusque-là isolées dans des circonscriptions comme Saharidj, Ahl El Ksar, Bir Ghbalou, Ridane... d'être alimentées et permettant aux citoyens d'en finir avec la bouteille de gaz. Sur ce plan et même si certains projets empièteront sur l'année 2012, comme c'est le cas d'Aghbalou, les raisons sont à mettre à l'actif de cette tendance de quelques citoyens à formuler des oppositions au passage de ce produit énergétique. Le comportement antisocial touche également les canalisations de l'AEP comme c'est le cas dans la circonscription de Souk El Khemis où des centaines d'habitants sont pénalisés par le refus d'un citoyen de laisser l'entreprise installer les canalisations sur ses terres. En chiffres, les taux de raccordement en énergie sont en nette progression. En 2010, la couverture en gaz était de 36%, en cette fin d'année elle dépasse les 60% pour atteindre avant décembre 2012 les 72%. Le bilan de cette année a concerné le raccordement de Haïzer, Taghzout, Aïn Laloui, Bir-Ghbalou, Raouraoua, Khabouzia, Ahl El Ksar et Aïn Turk. Ces 8 communes sont venues compléter celles du programme des Hauts-Plateaux que sont Bordj Okhris, Hedjra-Zerga, Hakimia, Dechmia, Mesdour, Taguedit, Maâmoura et Ridane. Les travaux publics aussi auront connu plusieurs nouvelles réalisations qui ont permis de désenclaver des régions entières mais également participé à l'amélioration des conditions de déplacement sur le réseau routier de la wilaya. L'ouverture de l'axe Bouira-Alger par l'autoroute restera le fait saillant qui restera dans les souvenirs puisque la capitale n'est plus qu'à une bonne heure de route. Des résultats en deçà des espoirs Le secteur de la santé s'est quant à lui, renforcé avec plusieurs structures. Le manque d'effectifs spécialisés et de paramédicaux aura réduit sensiblement l'impact sur le citoyen qui continue à recourir au privé malgré des tarifs exorbitants. Le secteur de l'éducation, qui a vu un changement à la tête de sa direction, a connu son lot de grèves et de protestations. Les enseignants non intégrés, les ouvriers des corps communs, les gestionnaires, les enseignants ont, tour à tour, manifesté leur mécontentement. L'amélioration du classement de la wilaya aux examens du BAC et du BEM reste le grand défi à relever pour les années à venir. L'objectif de réaliser un lycée par commune après celui d'un CEM par commune, déjà atteint, montre s'il le fallait, la bonne volonté de tout un chacun de mettre les enfants sur un pied d'égalité dans l'acquisition du savoir. Il s'agit là de concrétiser un des fondements de la révolution. Malgré son statut de wilaya agricole et les immenses potentialités qu'elle recèle, le secteur de l'agriculture est resté loin des espoirs et des objectifs. Le recours des paysans à des actions de rue, comme ce fut le cas de ceux d'Aghbalou qui, ont pendant toute la dernière quinzaine de décembre, recouru à la fermeture de la chambre d'agriculture, de l'APC puis de la daïra de M'Chedallah, reste un signe fort du marasme qui gangrène le secteur. Même si du côté de la direction de wilaya concernée, on tente de calmer les esprits en annonçant des chiffres, le citoyen ne voit rien venir. Le marché informel et la hausse des prix auront caractérisé l'année. Le citoyen a été malmené par des commerçants qui l'ont saigné jusqu'à devenir exsangue. En janvier et suite aux augmentations qui ont touché le sucre et l'huile, les citoyens ont mené des actions de rue provoquant des dégâts qui ont coûté des milliards de dinars au Trésor public. La pomme de terre, largement produite dans la région, a atteint le prix record de 70 DA le kilo. La promesse des pouvoirs publics d'ouvrir un marché de gros pour tenter d'éradiquer le phénomène de la spéculation est resté lettre morte puisque prévu pour 2011, il n'a pas encore vu le jour à Aïn Bessem. Cette situation d'inquiétude aura été accentuée par le manque d'eau. L'arrivée tardive des pluies aura aussi été un sujet de crainte pour une agriculture céréalière minée par la bureaucratie, la raison qui avait poussé les agriculteurs à occuper la rue. Les précipitations qui ont coïncidé avec la fin de l'année dernière ont permis aussi de remplir les trois barrages que compte la wilaya. Si pour celui de Tilesdit, commune de Bechloul, le taux avoisine les 95%, celui de Lakhal, commune de Aïn Bessem, ne dépasse pas les 53% alors que le grand barrage de Koudiet Asserdoun, daïra de Lakhdaria, est rempli à plus de 75%. La relation administration-administrés a connu plusieurs moments forts. Devant l'inertie mais aussi le manque de communication, le citoyen s'est retrouvé obligé de recourir à des manifestations. Le blocage des routes, la fermeture des édifices, des pneus brûlés, les sit-in... auront repris et doublé d'intensité tout au long de l'année. Le cas de la commune de Haïzer, une Assemblée populaire communale bloquée depuis la dernière élection pour incompatibilité entre le maire et ses subordonnés, restera un cas atypique qui poussera peut-être les électeurs à réfléchir à deux fois avant de choisir leurs élus lors des prochaines échéances. La criminalité a connu aussi un net regain aux quatre coins de la wilaya. Le phénomène des bandes, les agressions à l'arme blanche, la consommation des stupéfiants, les suicides, le kidnappings, les vols... sont autant de méfaits qui avaient défié la chronique pendant toute l'année. Pour tenter de faire reculer ces phénomènes, les responsables avaient tablé sur la pratique sportive. Comme chaque année, les associations sportives de Bouira étaient près de mettre la clé sous le paillasson. Le désintérêt, la faiblesse des aides restent les facteurs majeurs qui auront bloqué l'évolution du sport et de la culture dans cette wilaya. Même la venue d'une star mondiale n'a pas créé ce déclic tant attendu dans le domaine culturel malgré un potentiel engrangé par une population multilingue. L'année 2012 reste pour les citoyens de Bouira pleine d'un espoir, celui de voir Bouira promue à un statut meilleur au regard de sa position géographique et son potentiel naturel.