La Constitution du 28 février 1989 a instauré un régime semi-présidentiel relativement équilibré. Le système capitaliste libéral qui prévaut à travers le monde, à des degrés variables, depuis la quasi-disparition du système socialiste, connaît 3 formes principales de régime: - le régime parlementaire - le régime présidentiel - le régime semi-présidentiel On laissera de côté le régime d'assemblée ou conventionnel qui n'existe pratiquement guère dans son expression classique, même pas en Suisse où par exemple le gouvernement a aussi l'initiative de la loi, ce qui est contraire au principe même du régime d'assemblée. Les trois régimes précités sont tous fondés sur le suffrage universel (direct et indirect), exercé librement et régulièrement, ce qui leur vaut leur caractère démocratique. Ils sont fondés aussi sur le principe classique de la séparation des pouvoirs, mais également, ce qui n'est pas assez souligné, sur celui de l'équilibre des pouvoirs, principalement entre les pouvoirs exécutif et parlementaire, le pouvoir judiciaire étant assuré de son indépendance. Si ce principe d'équilibre est facilement perçu dans le cas des régimes parlementaire et présidentiel, il l'est moins dans le cas du régime semi-présidentiel. Le régime semi-présidentiel (que le Larousse 2009 définit comme «un régime politique caractérisé par un chef de l'Etat élu au suffrage universel et ayant des pouvoirs importants, et par un gouvernement responsable devant le Parlement, mais disposant du droit de dissoudre celui-ci» se marque par deux traits: -élection du président de la République au suffrage universel direct, ce qui lui vaut d'exercer la souveraineté nationale au nom du peuple, au même titre que le Parlement. -gouvernement responsable à la fois devant le président de la République et le Parlement. L'équilibre doit être réalisé ici à un double niveau (au contraire des régimes parlementaire et présidentiel où il se situe à un seul niveau): -au sein de l'Exécutif entre le président de la République et le chef du gouvernement -entre l'Exécutif dans sa totalité et le Parlement. Mais ce qui fait problème (et amène même certains auteurs à ne plus parler de régime semi-présidentiel) et explique la variété des situations existantes, c'est la répartition des prérogatives au sein de l'Exécutif, entre le président de la République et le chef du gouvernement. Si la France avec l'avènement de la Ve République et la forte personnalité de son fondateur a pu asseoir l'image d'un régime semi-présidentiel avec prépondérance du président de la République, suivie en cela par de nombreux Etats, il reste que dans plusieurs cas, dans le monde occidental (Autriche, Finlande, Irlande, Islande, Pologne...), le chef du gouvernement prévaut politiquement sur le président de la République pourtant élu au suffrage universel direct, confinant de la sorte le régime semi-présidentiel à un régime quasi parlementaire. Tout ceci est considéré sur un plan strictement constitutionnel, mais il reste évident que la donne partisane influe considérablement sur le fonctionnement du régime semi-présidentiel, renforçant notablement la position du président de la République dans le cas d'une majorité parlementaire favorable, ou au contraire l'obligeant à une cohabitation très restrictive dans le cas inverse. En Algérie, si le régime instauré par la Constitution du 28 février 1989 - régime formellement semi-présidentiel - pouvait être considéré comme relativement équilibré, avec prépondérance du président de la République, suivant l'exemple français, celui résultant de la présente Constitution du 7 décembre 1996, est, au contraire, tout à fait déséquilibré (en particulier: un Premier ministre réduit depuis la révision du 15/11/2008 à un rôle de subordination totale au président de la République, tout en demeurant paradoxalement responsable devant l'APN - régime des ordonnances sans autorisation parlementaire préalable comme c'est la règle dans les Etats démocratiques - existence d'une seconde chambre dont le principe même, dans les conditions actuelles, est discutable et dont la composition est très inégalitaire et à la dévotion, en dernière analyse, du président de la République avec le fameux «Tiers bloquant» - en signalant encore la non-création à ce jour de la Haute Cour de l'Etat prévue à l'article 158 toujours en vigueur après la révision du 15/11/2008). Le régime actuel doit donc être qualifié, constitutionnellement, de régime semi-présidentiel déséquilibré et non pas de «régime présidentiel» comme on a pu l'entendre lire, ces derniers temps, chez nombre d'hommes politiques, de journalistes et même, étonnamment, de professeurs de droit ou de sciences politiques. Le régime présidentiel, outre qu'il repose sur la séparation organique de l'Exécutif et du Législatif, est en effet, dans son acception fondamentale, un régime d'équilibre des pouvoirs. Professeur de Droit constitutionnel à la Faculté d'Alger