La réunion se termine en queue de poisson. Les douze formations palestiniennes réunies depuis quatre jours au Caire, à l'initiative de l'Egypte, ne sont finalement pas parvenues à conclure sur une suspension des opérations de guérilla contre Israël, alors que, dimanche, l'accord sur le principe d'une nouvelle trêve était acquis. Il est patent qu'une nouvelle fois, l'intérêt individuel et partisan a primé sur l'intérêt global de la cause palestinienne, remettant même en question la création, dans les temps impartis par la «feuille de route», d'un Etat palestinien. De fait, commentant cet échec, un responsable israélien, sous le couvert de l'anonymat, indique «l'échec éloigne davantage encore la perspective pour les Palestiniens de parvenir à un Etat et ne peut qu'encourager Israël à continuer à construire la clôture». En réalité, ce sont les Palestiniens qui, par leurs divisions, facilitent la tâche à Israël, mettant notamment en exergue l'impuissance de l'Autorité palestinienne à se mettre au dessus de la mêlée d'une part, à jouer un rôle rassembleur, d'autre part. Par ailleurs, cet échec affaiblit grandement la position du Premier ministre Ahmed Qorei qui n'a pas réussi à fédérer les positions des douze formations palestiniennes dans l'intérêt du combat pour la libération de la Palestine. De fait, l'un des principaux points d'achoppement réside dans le refus des factions palestiniennes, islamistes notamment, tels le Hamas et le Djihad islamique, d'envisager qu'un cessez-le-feu, entre les Palestiniens et Israël, soit conduit par l'Autorité autonome, ce qui équivaudrait, selon eux, à une reconnaissance de la «feuille de route» qu'ils récusent. Toutefois, il semble aussi, selon les déclarations du représentant du Front populaire de libération de la Palestine (Fplp) Maher Al-Tahar, que l'ambition d'une majorité de formations palestiniennes présentée au Caire serait la mise sur pied d'une «direction unifiée» indiquant que «l'objectif principal de ce dialogue sera la formation d'une direction nationale palestinienne unifiée qui assure une vraie participation des formations palestiniennes aux prises de décision». Un peu une remise en question de toutes les avancées réalisées par les Palestiniens ces dernières années dans leur combat pour leur droit d'édifier un Etat indépendant, combat soutenu, et bien compris, par la communauté internationale. En fait, ces tergiversations des formations palestiniennes jouent aujourd'hui pour Israël, au moment où l'Etat hébreu est de plus en plus isolé au plan international, relativement à sa politique d'occupation et de démembrement des territoires palestiniens. Aussi, l'optimisme, malgré l'échec au Caire des Palestiniens, de Nabil Abou Roudeina, conseiller du président Arafat, qui déclare que «le fait d'avoir échoué au Caire ne constitue pas la fin du chemin», semble un peu en décalage par rapport à la réalité, et cette mésentente est un luxe que les Palestiniens ne peuvent se permettre, donnant même, par leurs divergences, des arguments aux extrémistes israéliens. Ces derniers sont montés au créneau à propos de l'éventualité d'un retrait unilatéral, évoquée vendredi par le vice-premier ministre, Ehud Olmert. Une véritable levée de boucliers a suivi les propos d'Ehud Olmert, considéré comme proche de Sharon, et ont divisé le gouvernement israélien. Ce dernier doit également faire face à un nouveau souci, en l'occurrence la probable saisine de la Cour de Justice de la Haye, projet de saisine déposé par le représentant palestinien, Nasser Al-Kidwa, sur lequel devait voter hier (en soirée) l'Assemblée générale de l'ONU, à propos du mur que construit Israël en Cisjordanie. Les Israéliens qui veulent se rassurer en déclarant qu'une telle condamnation, si la saisine est effective, n'aura «qu'une valeur symbolique» se préparent néanmoins à défendre leur position. De fait, un concept de la paix, assez singulier en vérité, lorsque le ministre israélien des Affaires étrangères, Sylvan Shalom, lequel tout en indiquant qu'Israël «étudie les moyens de (nous) défendre avec les meilleurs juristes» n'en affirme pas moins que «cette initiative (de l'ONU) est inacceptable et risque de créer un dangereux précédent en niant à Israël et aux autres pays occidentaux le droit fondamental à l'autodéfense». Alors même que si précédent dangereux il y a, c'est bien celui pris par Israël de construire un «mur de sécurité» en territoire étranger, les territoires palestiniens qu'elle occupe depuis 1967. Vous voyez l'Union européenne construire un mur chez ses voisins pour empêcher l'infiltration de l'immigration clandestine? Non, bien sûr ! Le seul droit fondamental d'Israël, qui est le même pour tout Etat souverain, est celui de se protéger à «l'intérieur» de ses frontières. De fait, la construction de ce mur est condamnée par l'ensemble de la communauté internationale et irrite grandement le protecteur attitré d'Israël, les Etats-Unis. En fait, comme l'indiquait à la fin du mois dernier, le secrétaire général de l'ONU, si Israël a le «droit et le devoir» de protéger son peuple, cela, affirme-t-il «ne doit pas se faire en contradiction avec la loi internationale». M.Annan précise d'autre part, que le mur une fois achevé, outre d'isoler quelque 400.000 Palestiniens, s'enfoncera de plus de 22 kilomètres à l'intérieur de la Cisjordanie. De tout cela ressort le fait qu'aujourd'hui, les lois internationales auxquelles chaque Etat est tenu de se conformer, ne jouent pas ou n'ont pas de valeur, dès lors qu'il s'agit d'Israël. Aussi, il serait curieux et intéressant, si la saisine est confirmée par l'Assemblée générale de l'ONU, de voir quelle lecture va faire la Cour internationale de justice de la Haye sur ce cas singulier d'empiétement en territoire étranger ( celui de la Cisjordanie occupée).