«La sortie, c'est par là!» semble dire Abdelkrim Abada à son secrétaire général Dans cette interview, Abdelkrim Abada, coordinateur du Mou-vement de redressement du FLN, fait un procès en règle contre le secrétaire général Abdelaziz Belkhadem. Il estime que le président d'honneur, à savoir le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, est intervenu indirectement pour signifier à Belkhadem sa fin de mission. Il explique que la nomination au Sénat de deux opposants à Belkhadem et la lettre des huit ministres FLN constituent un message fort que Belkhadem doit comprendre: il s'agit de la levée de la couverture politique. L'Expression: Aujourd'hui, après tant de crises, peut-on affirmer que la maison FLN brûle et qui en est le pyromane? Abdelkrim Abada: La crise du FLN n'est pas nouvelle. Elle remonte à la venue de Belkhadem en 2005 à la tête du parti après le 8e congrès bis. C'est lui qui a provoqué cet incendie. Il est faible en tant que personnalité et il n'a pas le niveau qui lui permet d'être le secrétaire général d'un parti comme le FLN qui a 50 ans d'existence et qui a libéré le pays. Lorsque Belkhadem est arrivé, avec son ignorance du parti, son égoïsme, son double discours, son ambition illégitime, une fitna est née parmi les militants, au sein des institutions, parmi les dirigeants. Il a dévié le parti de sa véritable trajectoire, bercé les militants des conflits internes intestinaux, consacré la médiocrité, le clientélisme, l'allégeance à une personne, le régionalisme, ouvert grandes les portes aux affairistes et a encouragé le phénomène de la corruption. Cela a conduit le parti à vivre depuis 2005 des problèmes politiques, organiques, moraux, financiers et administratifs. Il a mis le parti en état de faillite. Pour tous ces griefs, le mouvement de redressement a condamné, lors d'un procès virtuel, le SG à la perpétuité politique. Qu'est-ce qui justifie une telle sentence? Notre mouvement est né après le dernier congrès falsifié organisé par Belkhadem. Ce dernier a utilisé sa fonction au gouvernement et sa relation avec le président du parti pour organiser ce congrès. Devant cette situation, des cadres et des militants ont créé le mouvement de redressement du parti et ont milité par différentes méthodes: déclarations, communiqués, lettres, sit-in, marches. Toutes ses méthodes n'ont pas donné l'effet escompté, mais on a mis à nu Belkhadem devant l'opinion publique. On a démasqué sa véritable personnalité. Après toutes ces démarches, les militants ont demandé de tenir son procès qui était virtuel et qui a laissé l'opinion publique connaître les accusations portées à l'encontre de Belkhadem. Le comité central du parti se réunira le 31 janvier et les 1er et 2 février prochain dans un contexte explosif. Comment se présente cette session qui a toutes les chances d'être houleuse? La prochaine session est décisive pour nous, c'est-à-dire le dernier round qu'on va jouer avec Belkhadem. On espère qu'il partira avant cette session. Pour nous, Belkhadem est fini en tant que secrétaire général et sa légitimité a pris fin le 15 juin lorsqu'il a violé le comité central et a agressé sa direction. Belkhadem s'est rebellé contre la direction et utilisé la violence verbale et physique. Son erreur est d'avoir voulu être responsable du comité central et non responsable devant le comité central. On ira à cette session avec un seul point à l'ordre du jour: confirmer et officialiser le retrait de confiance à Belkhadem et installer une nouvelle direction. Mais la direction du parti a un autre ordre du jour. Cet ordre du jour est fait par Belkhadem. On n'en est pas responsable. Il n'est plus notre responsable ni le secrétaire général. Le seul ordre du jour, c'est le retrait de confiance, le constat de la vacance du poste de secrétaire général et, dégager les mécanismes pour l'élection d'une nouvelle direction. Avant cette session, vous vous attelez en même temps à préparer une réunion et vous avez installé une commission de préparation. Quels sont les enjeux de cette réunion? C'est pour nous organiser et affirmer le nombre des signatures de ceux qui sont pour la destitution de Belkhadem et ils sont majoritaires. Pour aller à la session du comité central avec une seule position. C'est une réunion préparatoire qui regroupe les membres du comité central. Après toutes les tentatives avortées de destitution de M.Belkhadem, et avec tout ce qui se passe actuellement au FLN, pouvez-vous affirmer que le round final est arrivé et que les jours du secrétaire général sont comptés? Il n'y a aucun doute que Belkhadem est fini, surtout avec les nouvelles donnes. Les membres du comité central sont découragés par Belkhadem et sont convaincus qu'il n'est plus utile au parti. Les membres du bureau politique qui étaient avec lui, sont arrivés à la conviction que cet homme est corrompu et que notre parti est égaré. Ils ont pris conscience et position. Idem pour les ministres, les députés et les sénateurs. L'environnement général du parti est pour son départ. Même le peuple veut son départ, mais lui, il s'accroche et on est en train de penser à l'après-Belkhadem. Il s'est rebellé contre toutes les instances du parti, y compris son président d'honneur. La nomination de deux sénateurs adversaires du secrétaire général au Conseil de la nation et la lettre des huit ministres constituent-elles, selon vous, une levée de couverture politique de Belkhadem par le président d'honneur du parti, Abdelaziz Bouteflika? Belkhadem mentait au président d'honneur du parti et, dans notre lettre, on lui a demandé de rendre justice aux militants en intervenant en tant que tel, c'est-à-dire président d'honneur du parti, mais aussi en tant que moudjahid, responsable et ancien cadre du parti. On est sûr qu'il a compris la véritable situation et a pris des mesures qui ont laissé Belkhadem comprendre le message du président du parti, à savoir qu'il n'est plus utile, il l'aurait certainement compris,. Le président n'est pas intervenu directement dans les affaires internes du parti, car cela relève des prérogatives du comité central. Belkhadem mentait aux gens en disant qu'il avait le soutien du président et que toute personne s'opposant à Belkhadem s'opposerait au président. Il a utilisé le burnous du président pour berner les militants. On est sûr que Bouteflika a rendu justice aux militants en levant la couverture politique à Belkhadem. Belkhadem veut se trouver une sortie en attendant l'ordre de Bouteflika, mais Bouteflika n'interviendra pas directement. Peut-on faire un lien entre les développements des événements au FLN avec la présidentielle de 2014? Pour nous, non. Cela fait trois ans qu'on a dit que notre parti était malade et ça n'a aucune relation avec l'élection présidentielle dont il est tôt d'en parler. Notre préoccupation est de redresser la situation du parti. La présidentielle reste dans un cadre organique, celui du comité central qui a la légitimité d'étudier la question. En tant que mouvement, notre mission est de libérer le parti de ces gens qui l'utilisent. Belkhadem n'est pas une fin en soi, car on veut rendre le parti aux militants et combattre toutes les formes de corruption. Avez-vous une idée sur la personne à présenter pour ce que vous appelez l'après-Belkhadem? C'est le comité central qui est souverain et qui va le faire. On laissera se dérouler le débat et celui qui a la crédibilité peut se présenter et c'est à la majorité des membres du comité central de l'élire. Avez-vous des contacts avec les ministres qui conseillent à M.Belkhadem de partir? Oui, ils sont des militants avant d'être ministres, ils sont aussi des amis, on n'a pas de problèmes avec eux et on est en contact permanent. Dans un contexte national et régional explosif marqué par la dissolution des vieux partis en Tunisie et en Egypte, quel avenir prévoyez-vous pour le FLN dont la dissolution est de plus en plus réclamée? Notre parti a perdu ces derniers temps son étoile et sa crédibilité. Les pratiques du secrétaire général ont amené le peuple à le regarder autrement. Dans notre action et militantisme, on s'efforcera de redonner au parti sa place d'antan tant au niveau national que régional comme un parti qui a un programme, un projet de société, des ambitions et l'envergure qui lui permet de protéger le pays au niveau interne et des secousses externes par la pratique démocratique, l'alternance, le rapprochement avec les masses populaires, l'adoption des problèmes des citoyens, l'animation de la vie politique avec la société civile...etc. Nous serons comme une locomotive et défendronts les droits de l'homme, la coexistence avec les autres formations politiques pour rendre la confiance au peuple et recouvrir la crédibilité que nous avons perdue. On encadrera le peuple que nous ne laisserons pas exposé aux secousses et dérives. On doit éviter au pays de vivre l'expérience amère vécue par nos voisins. On n'est pas comme les autres partis, on a une responsabilité historique, un pacte avec la société, on est responsable de ce qui se passe dans le pays. On dit que le FLN est une vache laitière qui ne peut pas vivre sans la corruption et que la fin de la corruption signifie la fin du FLN. Qu'en dites-vous? En tout cas, on ne donne pas d'importance à cette accusation que profèrent certainement les ennemis du Front qui souhaitent la dissolution du parti et ils sont nombreux. Ils veulent que le FLN disparaisse pour laisser un vide qu'ils tâcheront par la suite de combler. C'est vrai, il y a des aspects de corruption et des comportements de personnes ramenées et encouragées par Belkhadem, mais en tant que parti, en tant que mouvement, on refuse la corruption et on la combat, non seulement à l'intérieur du Front, mais aussi à l'extérieur. On nous accuse de corrompus, d'avoir provoqué la faillite du pays, ce qui n'est pas vrai. Le Front n'est pas fini, il a encore un grande rôle à jouer. Son message novembriste ne mourra pas et sa mission non plus. Il est en train de recouvrir sa place de leader, son rôle et sa responsabilité dans les grands rapports du pays, sa protection ainsi que celle des valeurs de la Révolution, le développement du pays et l'encouragement des compétences nationales, l'implication des jeunes et de la femme dans la vie politique. Une véritable implication et non comme celle dans la forme pratiquée par Belkhadem. Je note aussi la coopération avec les partenaires politiques, car on n'a pas d'ennemis. Un mot pour conclure... J'appelle tous les militants, quel que soit leur niveau, cadres, élus, à bouger, à contribuer à la construction du parti, le libérer et à adopter ce mouvement pour éviter une sédition et éviter au pays les drames vécus par d'autres partis et d'autres peuples du voisinage et cela peu se concrétiser que si nos frères sont en mesure de comprendre le message et ne restent pas liés à une personne. Belkhadem n'est pas le parti, le parti ce sont des idées, des principes, un programme, une ligne politique qu'il faut adopter pour le sauver.