«La télévision est un instrument majeur de pouvoir. Elle doit demeurer une arme essentielle de la citoyenneté.» Laure Adler dans Les dossiers de l'Audiovisuel Décidément, c'est la guerre entre le gouvernement égyptien et le groupe qatari Al Jazeera. Jamais la télévision qatarie n'a été autant indésirable en Egypte même du temps de l'ancien président, Hosni Moubarak. Après les attaques policières et de voyous, c'est la justice égyptienne qui a été enclenchée puisqu'elle a ordonné ce 3 septembre la fermeture définitive de quatre chaînes de télévision d'obédience islamiste: Ahrar 25 (la chaîne des Frères musulmans) et deux autres canaux islamistes, Al-Quds et Al-Yarmouk. En plus d'Al Jazeera Mubashir, dont l'audience était en hausse depuis le début de la crise en Egypte. Les quatre chaînes en question paient leur soutien à l'ex-président Morsi et la contestation islamiste égyptienne. Ahrar 25, avec plusieurs autres chaînes islamistes, avait été interrompue quelques heures après la destitution et l'arrestation du président islamiste, Mohamed Morsi, par l'armée, le 3 juillet, ce que les principales organisations de défense des droits de l'homme en Egypte avaient dénoncé. Lundi 2 septembre, la chaîne islamiste al-Hafez avait déjà fait l'objet d'une fermeture définitive, pour «atteinte à l'unité nationale» et incitation à la haine contre les Coptes, les chrétiens d'Egypte, qui représentent environ 10% de la population du pays. La décision du tribunal administratif du Caire à l'encontre d'Al Jazeera Mubasher Misr entérine ce que cette dernière dénonçait comme une campagne «menée» contre elle. Ses locaux avaient en effet été fouillés dès le 3 juillet après la diffusion d'une vidéo où Mohamed Morsi, destitué par l'armée, se déclarait le seul président «légitime» d'Egypte. Quelques jours après, le 1er septembre, trois journalistes indépendants étrangers travaillant pour la version anglaise de la chaîne, ont été expulsés d'Egypte, tandis que les locaux d'Al Jazeera Mubasher Misr ont été perquisitionnés à plusieurs reprises et du matériel a été saisi. Al Jazeera a affirmé que deux de ses employés, le correspondant arabophone Abdallah al-Chami et le cameraman Mohamed Badr, ont également été détenus pendant plus d'un mois. Par ailleurs, le groupe de télévision satellitaire qatari a accusé les autorités égyptiennes de brouiller toutes ses chaînes en Egypte alors qu'elle poursuit sa couverture critique de la répression policière des islamistes dans ce pays. Le groupe Al Jazeera a affirmé que «des experts indépendants», engagés par le groupe qatari ont localisé l'origine du brouillage qui émane de la capitale égyptienne. Les experts étaient «sûrs du lieu et du responsable» du brouillage, a poursuivi Al Jazeera, précisant qu'ils avaient identifié des endroits à l'est et à l'ouest du Caire, notamment des installations militaires, comme sources des interférences. Al Jazeera a indiqué avoir été obligée de changer ses fréquences à plusieurs reprises pour permettre à ses téléspectateurs de capter ses chaînes d'information et de sports. Le Qatar, qui était l'un des principaux soutiens de M.Morsi, avait condamné la répression policière des partisans du président destitué. Cette situation a poussé le Qatar à lancer son propre satellite et éviter les brouillages satellites, lancés parfois par les Egyptiens et parfois par les Jordaniens. [email protected]