Alors que le jour «j» se rapproche, les attentats deviennent quasi quotidiens faisant de nombreuses victimes parmi la population civile. Autorités intérimaires et guérilla se sont engagées dans une course contre la montre à quelques jours du transfert de souveraineté aux Irakiens par l'autorité provisoire de la coalition -CPA-, les premières tentant de reprendre en main la situation, la seconde multipliant les attaques et attentats, -ayant occasionné près de deux cents morts lors des dix derniers jours-, tout cela sous le regard de la coalition qui prépare son retrait du champ politique irakien. Si la coalition est appelée à partir le 30 juin prochain, cédant le pouvoir au gouvernement transitoire irakien, en revanche les armées américaine et britannique resteront encore en Irak pour une période indéterminée. Hier un attentat à Ramadi, ville à l'ouest de Bagdad, a fait neuf morts, dont quatre étrangers, et dix blessés. A Kirkouk, c'est le directeur de la sécurité des champs pétroliers du nord, qui a été assassiné hier, au lendemain d'une opération de sabotage qui a paralysé les puits pétroliers. En fait, outre les attentats qui rythment la vie des Irakiens ces derniers jours, il y a eu de nombreux sabotages sur les oléoducs, dont le dernier en date, celui de mardi, dans le sud de l'Irak a eu pour conséquence l'interruption des exportations de brut vers l'étranger. De fait, ces sabotages portent un coup sévère à l'économie irakienne, tout en induisant la déstabilisation de la production pétrolière principale pourvoyeuse de revenus. Attaqué de toutes parts, le gouvernement intérimaire irakien est plutôt mal parti, malgré l'optimisme de façade dont font montre ses principaux porte-paroles, -notamment le président Ghazi Ajil Al-Yaouar, le Premier ministre, Iyad Allaoui et le chef de la diplomatie Hoshayr Zebari- alors que des problèmes souvent insolubles, à commencer par celui de la sécurité, mettent l'autorité provisoire irakienne au pied du mur. Mais un nouveau danger pointe à l'horizon, c'est celui du réveil des antagonismes ethniques, -un moment relégués au second plan dans le feu de l'action contre l'ennemi commun de la coalition américano-britannique-, qui refont surface, suite à des assassinats, selon toute apparence ethniques, à Kirkouk et Falloujah notamment. Dans cette dernière ville le drame eut lieu mardi lorsque deux imams sunnites ont ordonné l'exécution de six jeunes chiites, selon les affirmations d'un communiqué des tribus Rabiya qui accusent les religieux sunnites de Falloujah de ce forfait. Cette affaire qui a soulevé une grande émotion parmi la population chiite fait en effet craindre des dérapages, notamment au vu de l'absence d'une autorité capable de fermeté et disposant des moyens de faire respecter l'ordre. En fait, plus le jour «j» se rapproche, plus les problèmes s'accumulent et le gouvernement intérimaire, pas plus que son prédécesseur le Conseil transitoire, ne semble disposer des moyens nécessaires et d'une politique pour redresser la situation en Irak. La venue hier à Bagdad du numéro deux du département de la Défense américain, Paul Wolfowitz, l'un des maîtres d'oeuvre de la guerre en Irak, ne doit pas changer grand-chose, d'autant plus qu'elle intervient dans un maelström de violence qui peut, à terme, remettre en cause les plans concoctés pour l'Irak. Très laconique un responsable de la coalition s'est contenté d'indiquer, sous le couvert de l'anonymat, que «Wolfowitz est ici pour des consultations avec les responsables de la coalition et irakiens sur des questions de sécurité». De fait, jamais, depuis la flambée de violence d'août 2003 qui a vu l'assassinat de plusieurs personnalités dont le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU en Irak M. de Mello et l'ayatollah Al-Hakim notamment, l'Irak n'avait connu une telle recrudescence de la violence. Il semble qu'à l'approche du retour du pays à la souveraineté chacun cherche à placer ses pions pour ne pas se laisser évincer du futur partage du pouvoir. Toutefois, en gage de sa nouvelle volonté de coopération avec le gouvernement intérimaire, le chef radical chiite a demandé à ses militants qui ne sont pas natifs de Najaf de retourner dans leurs régions d'origine, pour permettre le retour à la sécurité dans la ville sainte chiite.