Le président intérimaire sortant, Moncef Marzouki M. Marzouki, âgé de 69 ans, s'est rendu hier en matinée au siège de l'instance organisant les élections (ISIE) où il a remis son dossier de candidature. Le président tunisien sortant Moncef Marzouki a annoncé hier être candidat à la présidentielle de novembre, un scrutin crucial pour tenter d'instaurer un régime démocratique stable en Tunisie près de quatre ans après la révolution. «Sur la base d'un projet d'indépendance nationale et de la défense des droits des Tunisiens que je souhaite défendre, j'ai présenté ma candidature», a déclaré M.Marzouki à la presse. «J'ai confiance en l'intelligence du peuple tunisien qui sait qui est à même de le servir», a ajouté le chef de l'Etat. Le porte-parole de M. Marzouki, Aden Manser, va désormais être chargé de sa campagne électorale qui a pour slogan «La victoire, rien que la victoire». Il a affirmé à la presse que le président allait compter, «dans le financement de sa campagne, sur la vente de son nouveau livre intitulé justement +La victoire, rien que la victoire pour le Printemps arabe+». La Tunisie doit élire le 23 novembre, pour la première fois depuis la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011, son président au suffrage universel. M. Marzouki avait été élu fin 2011 par les députés de l'Assemblée constituante à la suite d'un accord de coalition entre notamment son parti séculier, le Congrès pour la République (CPR), et les islamistes majoritaires du parti Ennahda. Ses détracteurs accusent Moncef Marzouki, un opposant historique à Ben Ali longtemps exilé en France, d'avoir formé cette coalition pour satisfaire ses ambitions présidentielles. Mais lui-même n'a eu cesse de répéter que l'union des islamistes et de partis dits «laïques» était le seul moyen d'assurer une transition vers des institutions démocratiques pérennes. Selon la nouvelle Constitution adoptée en janvier, le chef de l'Etat ne dispose que de pouvoirs restreints, l'essentiel de l'exécutif relevant des compétences du Premier ministre issu de la majorité au Parlement. La présidentielle doit intervenir d'ailleurs un mois après les législatives, prévues le 26 octobre. L'ISIE doit annoncer d'ici deux semaines la liste définitive des candidats aux deux scrutins. Malgré son alliance depuis 2011 avec les islamistes, favoris des législatives, M.Marzouki n'a pas dans l'immédiat reçu leur soutien. Ennahda a décidé de ne pas participer à la présidentielle et de soutenir un «candidat consensuel» sans pour autant nommer son poulain. La Tunisie organise ces élections avec deux ans de retard après une succession de crises politiques provoquées notamment par l'essor d'une mouvance jihadiste armée. Une pléthore de personnalités ont annoncé vouloir succéder à M.Marzouki, dont des poids lourds tels l'ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi, le président de la Constituante Mustapha Ben Jaafar, un ex-gouverneur de la Banque centrale ou encore deux ex-ministres de Ben Ali. M. Marzouki a semblé immédiatement vouloir s'attaquer à certains de ses concurrents soutenus, selon lui, par de «l'argent sale». «Ma candidature est un exemple de transparence. Je crains l'argent sale et il faut lutter contre ce fléau. On ne permettra pas la corruption dans (cette) première expérience démocratique», a-t-il déclaré. «Personne ne doit acheter le pouvoir avec de l'argent. Je mets en garde les Tunisiens et les partis politiques contre cet argent sale», a-t-il insisté. Depuis la révolution, nombre de personnalités politiques accusent les milieux des affaires proches de Ben Ali, dont le régime autoritaire était gangrené par le népotisme et la corruption, de vouloir faire dérailler la transition tunisienne. La Tunisie semble faire figure de dernier espoir pour instaurer un régime démocratique dans l'un des pays du Printemps arabe, la majorité ayant sombré dans le chaos. Mais elle fait toujours face à d'importants défis, au premier rang desquels l'essor d'une mouvance jihadiste armée responsable depuis 2011 des morts de dizaines de policiers et militaires et de deux figures politique anti-islamistes. La stabilité de la Tunisie est aussi minée par une économie anémique et un chômage endémique touchant particulièrement les jeunes diplômés. Or la misère et la pauvreté étaient au coeur de la révolution de 2011.