La pluie s'est invitée pour ralentir le rythme de la collecte Au regard des difficultés que rencontrent les paysans, 500 DA jusqu'à 1000 DA le litre restent des prix conformes. La campagne de cueillette qui débute cette première semaine de novembre pour s'étaler jusqu'à la mi-janvier risque de ne pas durer longtemps à cause de la faiblesse de la production. Même les régions où l'olivier a donné des fruits connaîtront, selon les spécialistes, des surprises. Le retard des pluies d'automne, la rudesse de l'été sont deux facteurs qui ont sensiblement affecté l'olivier. L'huile d'olive coûtera très cher cette année. Les raisons sont multiples mais les plus en vue sont la faiblesse de la production et le changement climatique qui aura caractérisé le temps ces dernières années. La persistance de la chaleur a sérieusement affecté la production puisque l'olive a vite noirci et s'est rétrécie par manque d'eau. La faiblesse de la production cette année compliquera la récolte. Faite manuellement et traditionnellement, l'opération fera appel à beaucoup de volonté. Les femmes, les enfants, en période des vacances scolaires prochaines, s'associeront pour ramasser les olives une à une. Le manque de fruits expliqué par la nature de l'arbre a été accentué par un été long et rude. L'olivier qui reste un rustique supporte les aléas de la nature mais souffre. Dans certaines régions, le fruit est tombé prématurément. Asséché il donne des signes de pourrissement. Pour les spécialistes, cet état n'influe point sur la qualité de l'huile mais réduit la quantité. D' habitude, un quintal d'olives donne entre 18 et 23 litres d'huile. Cette année et conséquemment à la santé de l'olive les 100 kg donneront moins de 16 litres. Si dans des pays comme l'Espagne, la Tunisie, la Grèce... l'huile d'olive, désignée par le qualificatif «d'or vert» est une réelle industrie, une source de revenus en monnaie forte, un secteur pourvoyeur d'emplois et de richesse, chez nous la filière est livrée à elle-même. Des milliards ont été investis dans des prêts, des aides qui n'ont jamais ciblé les vrais professionnels mais ont profité à des intermédiaires, des mercantiles. Cette année les propriétaires des huileries travailleront à perte. L'entretien de l'huilerie, les personnels saisonniers, les remboursements bancaires, le coût de l'olive, son transport... sont des frais qui influent sur le prix de revient. L'érosion du pouvoir d'achat amène le consommateur à recourir aux huiles industrielles aux dépens de sa santé même si les prix sont excessifs. «Nous obéissons aux caprices de ces arbres. On fait des bénéfices une année pour compenser l'autre» nous confie un producteur qui a fini par industrialiser son activité. Son produit est conditionné dans des bouteilles et destiné à l'exportation. L'inexistence de circuits de commercialisation, l'anarchie qui domine dans le circuit et l'apparition des lobbies autour de la profession ont accentué les spéculations et sont à l'origine de cette hausse. Au regard des difficultés que rencontrent les paysans, 500 DA jusqu'à 1000 DA le litre restent des prix conformes quand ils sont comparés aux augmentations qui ont touché toutes les filières agricoles où l'effort manuel est de loin moins intense. La rareté des olives poussera les huileries à s'alimenter à partir d'autres régions du pays. Là c'est la qualité qui en prend un coup. «Achemlal» de M'chedallah est une variété très prisée pour son taux d'acidité qui avoisine le zéro pour cent. Parce que les oliviers de la région n'ont pas donné assez d'olives, les huileries seront dans l'obligation de mélanger cette variété avec des olives venues de l'est et de l'ouest du pays, voire du sud. En hiver, en été, en automne ou au printemps, les légumes et les fruits même de saison restent au-dessus des moyens d'une famille. Cette hausse qui touchera l'oléiculture, a pour origine la situation du marché. Comme pour l'ensemble des autres filières, la présence d'intermédiaires et l'inexistence de circuits officiels sont les vraies raisons d'un état de fait qui profite à une poignée de gros bonnets qui s'enrichissent sur le dos du peuple. L'année dernière et à l'occasion d'un reportage publié par notre quotidien voila ce que nous disait un citoyen de la région de Chorfa, daïra de M'chedallah: «Ces arbres sont un héritage, ils me rappellent mes parents et je dois perpétrer la tradition même si les enfants aujourd'hui préfèrent la ville et les fonctions rémunérées. Moi c'est un devoir envers mes ancêtres et c'est ma vie» nous affirme Si Omar Nath Nouamghar en route vers «thavaaalt» en compagnie de son épouse pour ramasser les quelques grains que ces oliviers ont bien voulu donner. «Même quand la récolte est maigre, il faut se donner la peine pour ne pas mécontenter ces arbres qui exigent le respect. Ces arbres sont mes vrais enfants. Ceux biologiques sont partis en ville. Eux sont toujours à mes côtés et assurent ma survie» nous dira avec un air nostalgique et philosophique encore notre interlocuteur. La filière qui va accumuler deux années de disette lance un appel aux pouvoirs publics pour venir l'aider à perpétrer une agriculture ancestrale, un héritage plein de sens.