De notre correspondant à Bouira Nacer Haniche La campagne de cueillette des olives tirant à sa fin à travers les différentes localités de la wilaya, les regards des agriculteurs et des oléiculteurs sont tournés vers la commune de Takerboust, qui abritera mercredi prochain la fête annuelle de l'olivier, qu'organise la direction des services agricoles de la wilaya. Pour cet événement que les mêmes services avaient l'habitude d'organiser au niveau du chef-lieu de la commune M'chedallah et du village Raffour, les responsables du secteur ont affirmé que tout est fin prêt pour la réussite de la manifestation. Par ailleurs, plusieurs secteurs, dont le tourisme, l'artisanat et la culture, ont été associés à la préparation de la fête, à laquelle des dizaines d'oléiculteurs et producteurs d'huile d'olive y ont été invités. En effet, selon les services agricoles de la wilaya de Bouira, cette fête se veut d'abord un espace de vulgarisation et de valorisation de ce produit du terroir qu'est l'huile d'olive, en passe de devenir, avec la conjugaison des efforts de tous, une source intarissable de devises pour le pays et de richesses pour les citoyens. Le choix de cette région est motivé par l'importance économique que représente ce produit de terroir, dont la culture s'étale, pour la seule région de M'chedallah, sur une superficie 12 000 ha sur les 21 650 que compte la wilaya. Des représentants de la direction des services agricoles, de la chambre agricole, des directions de la culture et du tourisme, de l'union de wilaya des paysans algériens, de la chambre agricole, de l'administration locale, ainsi que des producteurs et propriétaires d'huileries, ont été conviés pour préparer cette manifestation afin de lui donner une dimension régionale. Par ailleurs, le wali de Bouira, qui a décidé de l'organisation de cette édition dans la commune d'Aghbalou, avait invité les différents participants à ne pas se limiter aux seules expositions traditionnelles qui n'ont pas d'impact sur la population et les participants mais de diversifier les activités festives et professionnelles afin de mieux mettre en valeur la production d'huile d'olive et les potentialités agricoles et touristiques de la région. Une production de 5 millions de litres d'huile attendue Etant une wilaya à vocation agropastorale, Bouira est également connue pour sa production d'huile d'olive. Les statistiques indiquent que cette activité économique occupe la seconde place parmi les récoltes agricoles de la région, après celle des céréales. L'oléiculture s'étend sur une superficie de 21 650 hectares avec une densité de 100 oliviers par hectare, ce qui nous donne plus de deux millions d'oliviers à travers la wilaya. Toutefois, il est à signaler que la majorité des oliveraies sont situées en zone montagneuse, depuis la commune d'Aghbalou, à l'est, jusqu'aux limites de la commune de Lakhdaria, au nord-ouest. En termes d'occupation de la SAU (surface utile agricole), cette dernière représente près de 11% de sa surface globale. Une large superficie qui permet la plantation de nombreuses variétés d'oliviers même si la région est plutôt connue pour une variété dominante dite «achemllal» qu'on retrouve dans la région de M'chedallah. Par ailleurs, pour la production d'huile, cette activité est basée encore sur des moyens rudimentaires sur le plan de la cueillette, de la trituration et de l'entretien des plantations, car la main-d'œuvre à recruter durant cette période se compte généralement parmi les villageois et les membres de familles des propriétaires. Concernant le rendement de cette année, les services agricoles l'ont estimé à 15 quintaux d'olives par hectare et chaque quintal d'olives brut produit près de 18 litres d'huile en moyenne. Cependant, certains oléiculteurs de la région de M'chedallah ont affirmé que le rendement a quelque peu baissé cette année à 14 litres le quintal. Toutefois, les mêmes services ont déclaré, le mois dernier, que la production d'huile d'olive dans la wilaya de Bouira va atteindre un seuil record de cinq millions de litres. De plus, la localité de M'chedallah est considérée comme le bastion de l'oléiculture avec sa variété «achemllal», une variété qui produit une huile de qualité meilleure car son taux d'acidité est inférieur à 1%, qui est la norme internationale. D'autre part, les analyses effectuées dernièrement auprès d'un producteur de M'chedallah ont donné un taux d'acidité de 0,01%, c'est-à-dire une huile extra vierge et excellente qui se vend sur le marché international à 13 euros le litre. Création de «Chok», une coopérative d'huile d'olive kabyle Après des réflexions qui ont duré quatre années sur la forme d'organisation ou groupement d'intérêt commun pouvant associer les oléiculteurs et les oléifacteurs de la région, les services agricoles ont annoncé au mois d'octobre de l'année écoulée la création d'une coopérative d'huile d'olive de Kabylie dite «Chok» avec l'aide des services du ministère de l'Agriculture et la participation de l'Union européenne, en l'occurrence le MEDA 2. Cette coopérative a comme objectif premier d'organiser la filière oléiculture en vue de produire une huile de haute qualité au standing et normes internationaux, puis de procéder à la collecte de l'huile d'olive, son analyse, son raffinage et sa commercialisation dans de meilleures conditions de qualité et de prix, tant au niveau national qu'international. De plus, cette coopérative est chargée de mettre à la disposition de ses adhérents les équipements de maintenance et les pièces de rechange nécessaires pour l'entretien des huileries, au nombre de 192, de la wilaya de Bouira. Par ailleurs, les propriétaires bénéficieront de cycles de formation sur les conditions de trituration pour l'obtention d'une meilleure huile, l'extra vierge, dont le taux d'acidité est au-dessous de 0,8%, recommandé par les normes internationales. Pour les oléiculteurs ou propriétaires d'oliveraies, au nombre de 13 000 dans la wilaya, la «Chok» leur a concocté un programme de rencontres de sensibilisation afin de les initier aux procédés modernes de collecte et de stockage des olives, des opérations délicates qui influent sur la qualité de l'huile et son exportation. Les prix de l'huile ne baissent pas malgré une production record La commercialisation de l'huile d'olive dans la région échappe à toute norme régissant le marché. Pour les consommateurs, c'est dû en partie à l'absence d'un dispositif de régulation. La fixation du prix du litre d'huile d'olive se fait de manière aléatoire et c'est au niveau des huileries que le prix de référence est établi. La loi du marché n'est pas respectée. Ces trois dernières années, le litre d'huile d'olive est cédé entre 300 et 450 DA le litre. Selon les oléiculteurs, le climat y est pour beaucoup. En effet, la production a connu, durant cette période, une baisse à la suite de la vague de froid qui s'est abattue sur la région en 2005 et aussi des incendies qui ont ravagé plusieurs oliveraies. Par conséquent, la récolte oléicole a connu une importante régression. Pour sauver la mise, les oléiculteurs, lesquels comptaient beaucoup sur la récolte de l'huile d'olive, ont augmenté les prix. Pour leur part, les propriétaires des huileries ont vu leurs charges inhérentes à la trituration et la production enregistrer une augmentation. Alors qu'ils s'attendaient à une baisse significative, du fait que la production s'annonce fructueuse, les consommateurs constatent que le prix stagne à 400 DA le litre. Déjà, au début de la campagne oléicole le marché était en pleine effervescence. Le quintal d'olives était vendu à 3 000 DA au niveau des huileries, se répercutant directement sur le prix du litre d'huile d'olive. Aux raisons évoquées par les oléiculteurs s'ajoute le phénomène de la spéculation opérée, notamment par les marchands ambulants. Ces derniers n'hésitent pas à mettre la main à la poche, sachant que les bénéfices sont acquis d'avance en revendant le quintal à prix fort au niveau des autres wilayas où la production d'huile d'olive est inexistante. Le fait a été constaté l'année dernière par les oléiculteurs eux-mêmes. Alors que la campagne oléicole était à peine terminée, les huileries avaient déjà épuisé leurs stocks d'olives à triturer. Selon ces derniers, le même scénario risque de se répéter cette saison. Le prix du litre d'huile d'olive sera maintenu à 400 DA et pourrait même enregistrer une hausse, en raison de la cherté de la vie. D'ailleurs, dans leurs déclarations, les responsables du secteur ne prévoient qu'une normalisation des prix.