La couverture originale de l'album L'Etoile mystérieuse, dixième aventure de Tintin et Milou signée en 1942 par Hergé, sera en vente à partir de samedi à la Brafa de Bruxelles, l'une des plus prestigieuses foires d'art et d'antiquités d'Europe, confirmant le succès croissant de la BD sur le marché de l'art. «Il y a 25 ans, quand vous alliez chez un auteur de BD comme Tardi pour acheter une planche, il vous regardait en disant «Ça intéresse qui?», explique Alain Huberty, co-fondateur de la galerie bruxelloise Petits Papiers-Huberty-Breyne, dont le stand à la Brafa accueille exclusivement des auteurs du «neuvième art». La couverture de «L'Etoile mystérieuse» est l'une des cinq couvertures originales du père de Tintin aux mains de collectionneurs particuliers, et non de la fondation qui gère l'oeuvre du dessinateur belge depuis sa mort en 1983, précise-t-il. Dans les années 1980, certains marchands ont commencé à acheter des planches, qui étaient alors revendues aux comptoirs de librairies spécialisées. Des salles des ventes ont ensuite pris le relais, ce qui a fait grimper les prix, renforcé l'intérêt du public et finalement consacré ces auteurs comme des artistes à part entière. Pour les collectionneurs, qui ont devancé les musées, Hergé a fait figure de précurseur, suivi par les autres géants de l'école franco-belge tels que Franquin (Spirou, Gaston Lagaffe), Peyo (Les Schtroumpfs) ou Jacques Martin (Alix), puis par la génération des Schuiten, Moebius, Tardi. «La valeur d'une pièce se fait sur le nom, mais aussi sur la qualité. Une pièce exceptionnelle peut faire des prix exceptionnels eux-aussi, comme le montre la couverture de Tintin», souligne M. Huberty. En mai 2014, une double page réalisée à l'encre de Chine par Hergé pour constituer les pages de garde des albums de Tintin publiés de 1937 à 1958, représentant le célèbre reporter et son chien Milou dans 34 situations différentes, avait été adjugée 2,65 millions d'euros lors d'une vente organisée à Paris par la maison Artcurial, établissant le nouveau record mondial pour une oeuvre de BD. «On n'aurait jamais imaginé de tels chiffres il y a cinq ans», relève le galeriste, qui rappelle que les oeuvres des artistes contemporains les plus cotés se vendent à «plusieurs centaines de millions de dollars». Mais «tout ne vaut pas des centaines de milliers d'euros», estime Alain Huberty. Il pointe un risque de «bulle» pour les auteurs de second rang, mais pas pour les chefs d'oeuvres des «maîtres». L'attrait pour la BD touche également les Etats-Unis, où les auteurs de «comics» sont recherchés par les collectionneurs. Ce n'est pas le cas pour les auteurs japonais de mangas. Certains auteurs, comme le Belge Philippe Geluck, poussent la démarche plus loin en réalisant des oeuvres originales, directement vendues en galerie. Une toile montrant le «Chat» s'exclamant «Nous sommes une grande famille», entouré du personnage du «Cri» de Munch, des Dupont-Dupond, d'une des Demoiselles d'Avignon de Picasso et d'un personnage de Keith Haring, est ainsi proposée à 21.000 euros par la même galerie. La Brafa se tient à Bruxelles du 24 janvier au 1er février. www.brafa.be