Après avoir gagné son «pari» militaire, Bouteflika accélère la réforme de la justice. Annoncée, avec tambour et trompette, par le président de la République, à chaque fois que ce dernier est interpellé pour expliquer l'essence de son programme politique, la réforme de la justice, projet «cardinal» sur lequel s'arc-boute la stratégie présidentielle et dont les grandes lignes sont inspirées principalement du rapport de la commission Issad, est bel et bien entamée. Les deux statuts, de la magistrature et du Conseil supérieur de la magistrature, adoptés par les deux chambres du parlement, le chef de l'Etat avait saisi officiellement, le 7 août dernier, le Conseil constitutionnel lui demandant de «s'assurer» de la conformité des deux textes de lois avec la Constitution. Le président de l'institution constitutionnelle, Mohamed Bedjaoui, avait, aussitôt la saisine passée, convoqué, pour une série de réunions - du 7 août jusqu'à hier - les différents services de son département, ces réunions ont été consacrées aux délibérations sur les deux lois organiques. Sans dévoiler leur nature, le Conseil constitutionnel a rendu, hier, dans le délai qui lui est imparti par l'article 167 de la Constitution, deux avis dont la publication au Journal officiel interviendra incessamment. Quoi qu'il en soit et nonobstant le flou qui entoure les délibérations de l'institution de Bedjaoui au sujet de la conformité des textes organiques, ces derniers avaient été, rappelle-t-on, adoptés, mot pour mot, par l'APN et le Conseil de la nation. S'inscrivant, selon le discours officiel, dans le cadre de la réforme de la justice, la mise en chantier de ces deux statuts avait été, à chaque fois, ajournée par les différents gouvernements. La venue de Bouteflika aux affaires a été toutefois déterminante pour le sort de la justice. Ce à quoi une batterie de lois résumant la nouvelle orientation du professeur Issad avait insufflé au secteur de la justice, jusqu'ici, rongé par la bureaucratie et, pire, par l'injustice. D'où les nombreux chantiers relatifs à l'ensemble des volets touchant, de près ou de loin, dame Justice. Les récentes sorties du garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, s'inscrivant dans le sillage de l'activité gouvernementale, renseignent sur la «détermination» du chef de l'Etat à mettre en pratique contre vents et marées la réforme à laquelle il tient. Cela se passe aussi, à la veille de la rentrée sociale, et à l'ouverture de la nouvelle session judiciaire. Elle intervient également à la veille d'un éventuel mouvement dans le corps de la magistrature, que de nombreux observateurs n'écartent pas. En clair, le mieux que l'on puisse dire, à cet effet, est que le chef de l'Etat, après avoir «gagné» son «pari» militaire en procédant à la nomination d'une nouvelle équipe à la tête de l'ANP, a décidé, cette fois-ci, pour ce qui concerne le secteur de la justice, de prendre le taureau par les cornes, en donnant un second souffle aux réformes qu'il avait promises au lendemain de sa réélection à la tête de l'Etat, le 8 avril dernier. Reste enfin que, cette fois-ci, il est question de donner corps à ces «bonnes intentions».