La plupart des habitants de la ville des Roses savent que la grande avenue Kritli Mokhtar, située en plein centre de Blida, n'est constituée que de belles villas. Ce jugement, même s'il est relativement logique, dans le mesure où le quartier en question semble être résidentiel, la cité Mokhbate, sise au coeur de l'avenue Kritli Mokhtar, méconnue jusque-là et non visible pour les passants (son accès se fait par une petite ruelle) va désormais sortir de l'anonymat, vu le mode de vie moyenâgeux de ses occupants qui, malheureusement, persiste jusqu'à nos jours. En effet, les 50 familles qui y vivent depuis 1959, non loin du siège de la wilaya, ont décidé de s'organiser et de créer leur propre cellule de crise. Cette dernière a été mise en place afin de «médiatiser nos problèmes, tout en les exposant aux hauts responsables de l'Etat», nous dira un concerné. Il faut dire que la cité Mokhbate est constituée de 35 baraques de fortune qui étaient, à l'origine, des écuries. C'est vers la fin des années cinquante que son propriétaire avait transformé ces écuries en soi-disant habitations contenant, pour la plupart d'entre elles, une à deux pièces, cuisine avec des sanitaires collectifs. Dans ce sens, la superficie des chambres et des cuisines varie entre 4 et 10 m² et ne sont même pas dotées de fenêtres pour l'aération. D'ailleurs, on étouffe dans ces lieux humides et malodorants. Cette précarité a engendré plusieurs maladies et les familles sont carrément consternées de voir leurs enfants souffrir d'asthme. «Nos enfants souffrent non seulement de maladies mais aussi du célibat, puisqu'il y a parmi nous certaines personnes qui dépassent la cinquantaine et qui n'ont toujours pas fondé un foyer, vu l'exiguïté de nos demeures. Comment voulez-vous qu'ils se marient alors que le meilleur d'entre nous a deux minuscules pièces, occupées par une dizaine de personnes?», s'exclame une septuagénaire. Selon d'autres personnes rencontrées sur les lieux, en dehors de certains voisins qui sont devenus, par la force des choses, des malades mentaux, vivre dans des écuries en Algérie indépendante et dans les années 2000 relèverait de l'inadmissible, surtout quand on sait que les démarches entreprises pour le relogement datent des années soixante-dix. «On nous envoie régulièrement des commissions d'enquêtes pour constater de visu notre souffrance. Cependant, et jusqu'à nos jours, rien n'a été fait pour nous», rétorqua un habitant de la cité Mokhbate. Ce dernier, ainsi que ses voisins, continuent de payer le loyer aux héritiers, en attendant des jours meilleurs. Pour le moment, ils demandent l'intervention des ministres de la Santé et de l'Habitat ainsi que les responsables locaux de la wilaya de Blida pour mettre fin à leur calvaire.