Les marchands de friperie font face à une concurrence de plus en plus rude du produit asiatique. Plus s'approche, à pas de géant, la fin du Ramadan, avec toute l'effervescence qui particularise les derniers jours de ce mois sacré, plus la ruée voire le «raid» des citoyens sur les marchés de vêtements s'accroît. A l'intérieur du marché notoirement populaire de la ville de Réghaïa, les marchands de friperie, faufilés, dès la matinée, derrière leurs tables de fortune, s'apprêtent à étaler leurs produits. Ici, bien que certains commerçants se frottent les mains sur une fin de mois peu ou prou rentable, d'autres, en revanche, que nous avons interrogés restent sceptiques et redoutent une situation de vaches maigres similaire à celle de l'année dernière. Ils redoutent, depuis quelque temps, la rude concurrence du marché asiatique, chinois plus précisément, très en vogue en ces temps. Meziani M., l'un de ces vendeurs, accrédite, lui aussi, cette tendance : «Pour l'Aïd, contrairement aux années précédentes, les gens boudent de plus en plus nos produits pour s'approvisionner en habits asiatiques de piètre qualité.» Omar Z., n'en pense pas moins: «En dépit des bas prix que nous pratiquons spécialement pour l'Aïd, la vente reste en deçà de nos attentes» explique cet autre marchand. Le vêtement asiatique et Kiabi Unanimes ont été donc les avis recueillis auprès des opérateurs sur la faible fréquentation des marchés de la friperie alors qu'il y a quelques années de cela, le rush, dans une pareille conjoncture, était tel que, très souvent « il ne nous restait rien ou presque » poursuit notre interlocuteur. Cette année, les différents opérateurs privés qui écument le marché de l'habillement dont les producteurs nationaux, les importateurs des produits asiatiques, les entreprises françaises installées en Algérie, Kiabi par exemple, tiennent, à vrai dire, la dragée haute aux «chiffonistes» lesquels, auparavant, régnaient en maître absolu. Même, et surtout les citoyens à faibles revenus qui constituent pourtant le plus gros de la clientèle de la friperie, se font de moins en moins nombreux préférant se payer des vêtements asiatiques, neufs et cédés, de surcroît, à des prix très bas. Dans les principales artères de la capitale mais aussi sur les trottoirs du marché informel les magasins d'articles d'habillement asiatique fleurissent. On y propose notamment à l'approche de l'Aïd, des tenues vestimentaires pour enfants, à titre d'exemple, 2500 DA pour un ensemble trois pièces (gilet, pantalon et chemise) tandis que le même produit, dans les magasins locaux, est cédé à un prix avoisinant les 4000 DA. La société française d'habillement installée en Algérie, Kiabi, entend elle aussi mettre le paquet à cette occasion. A l'intérieur de son point de vente spécialisé dans l'habillement pour enfants, à Alger-centre, au Boulevard Amirouche plus exactement, il y a foule. Les rayons du magasin sont abondamment achalandés de produits de bonne qualité apparente et vendus à des prix accessibles aux larges couches de la société. De nouveaux stocks ont été disposés pour les enfants allant de six mois à 16 ans. les prix varient moyennement entre 400 et 3000 DA. Une veste d'hiver ne dépasse pas les 2200 DA. Les pantalons jeans sont cédés au prix largement abordable de 700 DA, le pull en laine avoisinent les 800 DA, alors que la tenue trois pièces pour les petites filles ne dépasse pas les 2 300 DA... Bref, une véritable aubaine pour ces familles laminées par un mois de dépenses fastueuses et acculées par un pouvoir d'achat des plus vulnérables. Tristes, en effet, ont été les années où les citoyens se ruaient, très souvent à leur corps défendant, sur les marchés de friperie pour acheter des vêtements usés. Les «fripiers» font de la résistance Mais même si la concurrence se fait de plus en plus affirmée, les marchands du «chiffon» ne comptent pas désarmer. Au contraire, à Réghaïa l'on prévoit pour ces jours-ci la mise sur le marché de nouveaux produits et l'on promet beaucoup de «surprises» Pour faire face à cette situation «inquiétante» , les différents vendeurs du marché de Réghaïa, ont variablement achalandés leurs rayons avec une fourchette tarifaire minutieusement étudiée : les pantalons en toile pour enfants sont proposés entre 400 et 500 DA, les jeans sont à 500 DA, les chemises à 200 DA alors que leurs prix dans les marchés ordinaires frôlent aisément les 2000 DA. Les robes pour petites filles sont, quant à elles vendues entre 500 et 600 DA, les vestes en cuir de bonne qualité dépassent les 3000 DA... Mais le plus intrigant est , sans conteste, les vêtements de «luxe», que les «fripiers» se targuent, non sans vanité, de vendre. Car, dans le «lexique» vestimentaire des marchands de la «frip» on distingue entre trois types de vêtements: le premier, le deuxième et le troisième choix. La première catégorie comprend, évidemment, les articles des grandes marques, plus ou moins neufs, qui n'ont été utilisés qu'une ou deux fois. Et c'est précisément cette marchandise que nos interlocuteurs entendent écouler dans les tout prochains jours. Dès lors, il ne reste à ces commerçants du « vieux » que trois ou quatre jours pour convaincre une clientèle qui se fait timidement exigeante. Avec l'ouverture du marché à d'autres opérateurs étrangers du marché des vêtements, les pouvoirs publics ont, de fait, permis aux citoyens de fêter l'Aïd avec le moins de «dégâts» possibles. Car, de l'autre côté des rayons, en d'autres termes, les marchands informels plus connus sous le sobriquet de «trabendistes», que ce soit dans les quartiers de la capitale ou ailleurs, les produits proposés se chiffrent à coups de trois, quatre ou cinq zéros après. Surtout n'y touchez pas!