Le réalisateur le plus prolifique du cinéma algérien Le réalisateur aux films controversés, a une nouvelle fois ouvert les hostilités contre le ministère de la Culture, suite à sa participation au festival israélien de Haïfa. Après l'épisode du film «Le Repenti», où il a attaqué en 2012 ouvertement, en plein festival de Cannes et devant la presse internationale, le ministère de la Culture pour lui avoir refusé son scénario à la commission du Fdatic, le cinéaste revient à la charge avec son style le plus connu: la victimisation. Alors qu'il avait obtenu des autorisations pour tourner le film «Le Repenti» dans la ville d'El Bayadh en Algérie, sous la protection de la Gendarmerie nationale, le cinéaste avait lancé cette attaque politique contre le département de Mme Toumi pour atteinte à la liberté d'expression artistique. L'affaire avait été largement médiatisée par la presse algérienne, ce qu'il lui avait permis l'obtention des privilèges dans le milieu de la production en France. Le film «le Repenti» fut tout de suite pris en charge par Sophie Dulac, la plus importante distributrice du cinéma israélien en France. Si Allouache n'a jamais caché ses relations avec la communauté cinématographique juive de France, il a en revanche soigneusement caché ses participations dans les festivals israéliens. Car ce n'est pas la première fois que le réalisateur algérien participe à un festival en Israël. Il avait déjà participé avec son film «Salut Cousin «en 1996 au Haïfa Film Festival et avait même obtenu le prix Ancre d'Or, la plus importante distinction du festival. Même si le film n'était pas produit par l'Algérie à l'époque (le film était entièrement produit par des fonds français), on voulait surtout remercier le réalisateur algérien d'avoir fait un clin d'oeil aux juifs pieds-noirs de Bab El Oued, à travers la séquence avec Jean Benguigui et d'avoir donné le rôle principal à un juif marocain: Gad El Maleh. Le film a servi plus tard au comédien canado-marocain de faire carrière en France et de devenir une star importante du showbiz français. Ce n'est pas la première fois Ce nouvel épisode de la guerre entre Allouache et le ministère de la Culture, intervient quand la presse électronique, principalement Algérie patriotique, mais aussi Echourouk et Ennahar avaient révélé la participation de son film au Festival de Haïfa, évoquant des éventuelles sanctions qui attendent le réalisateur. Après plusieurs jours de silence, le réalisateur s'est fendu d'un message sur sa page Facebook dans laquelle il critiquait la demande d'explication du ministère de la Culture. Dans ce message d'une rare véhémence, le réalisateur algérien assume ouvertement la présence de son film dans ce festival, tout en acceptant les opinions contraires qu'il respecte quand elles s'expriment sereinement. «La sélection d'un film à un festival, fut-il israélien, n'engage ni l'Etat algérien qui n'est pas coproducteur du film ni ses aides qui ne sont pas conditionnées par des critères de diffusion internationale», affirme le réalisateur, qui ajoute dans son réquisitoire que la caporalisation datant du parti unique est toujours en vigueur et que l'artiste doit être muselé. «Il ne doit sous aucun prétexte franchir les lignes imposées par les diktats fluctuants d'une bureaucratie», affirme-t-il. Se présentant plus comme Monsieur Courage, qu'un cinéaste algérien engagé pour la cause palestinienne, Allouache a déclaré aussi: «Je l'ai compris depuis longtemps et j'ai fait de chacun de mes tournages un acte de résistance. Je suis fier de tous ces films qui témoignent de l'histoire de mon pays et dans lesquels j'ai pu imposer ma liberté de pensée et de création. Ils existent et personne ne pourra les faire disparaître. La réalité, c'est que depuis des décennies, l'autoritarisme perdure avec son cortège de pressions et d'injures.» Pourquoi tant d'ingratitude envers un pays et un ministère qui lui ont toujours ouvert les portes alors qu'il était toujours critique et sévère envers son pays et sa société. Une société qu'il décrit toujours dans ses films pleins de clichés, comme une société inculte, sans tolérance, sans engagement politique, sans beauté et sans avenir. Des clichés négatifs sur la société algérienne qui reviennent souvent dans ses films comme l'interdiction de la cigarette pour les femmes, l'alcool pour les hommes, le rêve pour les filles, le sexe dans des gourbis clandestins, le hidjab et le baiser interdit dans les cimetières chrétiens. Allouache a toujours présenté l'Algérie à travers une image la plus vile, comme un pays sous-développé, non émancipé et en décalage avec son temps et son environnement. Dans cette polémique stérile, le réalisateur, qui joue beaucoup sur le paramètre de la liberté d'expression, espère une interdiction de tourner en Algérie, pour jouer la victime. Le cinéaste a déjà usé de ce stratagème, après le fiasco de sa série télévisée «Babor Dzair». Violemment critiqué par la presse et indésirable dans le cinéma à Alger, le réalisateur a évité l'Algérie et a tourné son film «Tamanrassat» au Maroc alors que l'histoire était censée être tournée dans la plus importante ville du Grand Sud algérien. Le réalisateur avait prétexté une interdiction, mais il n'en était rien. Après l'épisode du film «Le repenti» à Cannes et les critiques contre le ministère de la Culture, la ministre Toumi a tout de même ordonné qu'on le traite comme les autres réalisateurs. Le Fdatic lui a alors accordé une aide pour son film «Les terrasses «en 2013. Le réalisateur qui a obtenu plusieurs aides internationales a tourné en Algérie avec l'argent du Fdatic dans un temps record. Portable éteint Quand son film obtiendra le Prix du meilleur long métrage dans le Festival du film engagé à Alger, Allouache a éteint son portable pour éviter d'assister à la cérémonie de remise des prix et éviter de remercier les organisateurs et surtout le ministère de la Culture, qu'il a toujours critiqué, pour cette consécration. Aujourd'hui, le cinéaste algérien n'a presque pas besoin de l'argent algérien, il est constamment soutenu par trois institutions étrangères: le CNC français, le Doha Institut et le Dubai Festival. Ces trois organisations lui fournissent une aide à la production en devises fortes, mais l'argent n'est jamais rapatrié en Algérie. Cet argent sert surtout aux cachets des techniciens français, à la postproduction et à l'achat de matériel hors du territoire algérien. En revanche, pour le tournage en Algérie, les techniciens et les comédiens algériens sont payés en dinars avec le budget alloué par le Fdatic. Généralement, la première tranche est suffisante pour régler tout. Le Fdatic offre aux productions sélectionnées 40% à la signature du contrat et 40% au début du tournage et 20% à la remise du film. A l'époque la commission d'évaluation des budgets du Fdatic, avait estimé que le film d'Allouache était terminé et n'ouvrait pas droit à un financement total du Fdatic, finalement c'est la ministre de la Culture de l'époque, Nadia Labidi qui aurait tranché pour lui accorder 20 millions de dinars de subvention du Fdatic. La société de production Baya Films de Allouache aurait empoché 40% de cette somme, soit 8 millions de dinars. Suite à cette polémique, le réalisateur devrait rembourser cette somme au risque de se faire bloquer le compte de la société Baya Film. L'affaire n'est pas terminé puisque le ministère de la Culture a prévu d'introduire de nouvelles dispositions dans les prochains contrats de financement des films co-produits par l'Algérie lui conférant un «droit de regard» sur leur participation à des festivals internationaux. Azzedine Mihoubi qui s'exprimait en marge de l'ouverture de l'année universitaire des établissements sous tutelle du ministère de la Culture réagissait aux polémiques suscitées par la sélection de films algériens à des festivals en Israël. Selon M. Mihoubi, son département pourrait aller jusqu'à «interdire» aux films financés «à quelque hauteur que ce soit» par l'Algérie de participer à certains festivals. Cette décision fait suite à la participation du film «Madame Courage» de Merzak Allouache au Festival international du film de Haïfa (en Palestine occupée) et il y a quelques mois après que «L'Oranais» de Lyes Salem, sélectionné dans un autre festival israélien, ait soulevé une vague de protestations avant que son auteur ne le retire de la programmation du festival. Par ailleurs, M.Mihoubi a rappelé que son ministère «n'exerce aucun pouvoir de tutelle» sur le film de M.Allouache, affirmant que «Madame Courage» a bénéficié d'un financement «à hauteur de 20 millions de dinars dont huit déjà versés», comme première tranche de la contribution du ministère de la Culture. Jugeant cette participation financière «limitée», le ministre a indiqué que «la responsabilité liée à ce film relève de son seul producteur», Baya Films. Pour faire face à la polémique et répondre à la presse en cas d'éventuels retombées politiques de sa position, le réalisateur a planifié un plan de communication pour contre-attaquer. Il s'est rendu au siège du quotidien arabophone El Khabar (avec qui il envisage de faire son prochain film) pour s'expliquer et donner sa version des faits. Un long entretien sortira aujourd'hui pour donner sa version des faits et répondre à ses détracteurs. On ignore comment va finir cette affaire. Ce qui est sûr est que les relations entre le réalisateur rebelle et les autorités chargées du cinéma n'ont jamais été si mauvaises et risqueraient de déteindre sur la réputation et l'avenir du 7e art algérien.