La tendance lourde parmi les congressistes est de faire désormais le distinguo entre les motivations des uns et des autres. Les travaux du Xe congrès de l'Organisation nationale des moudjahidine ont buté sur la résolution organique, notamment par rapport au mode d'élection du secrétaire général de l'Organisation. Deux approches se sont entrechoquées lors des travaux de la commission. Ainsi, alors qu'une partie des congressistes recommandent la désignation du n°1 de l'ONM par le secrétariat national composé de 9 membres, lui-même élu par le Conseil national qui regroupe 280 moudjahids, une autre tendance soutient que l'élection du secrétaire général devrait se faire par le Conseil national. La lecture en plénière de la résolution qui n'a évoqué que la première option a provoqué la colère des partisans de la seconde proposition. Il s'en est suivi un chahut qui a obligé la suspension des travaux et le retour en salle de la commission des statuts pour de nouveaux conciliabules. Hormis cet incident et un autre provoqué par Mme Fella qui s'en est prise «à certains moudjahidine qui ont manqué à leur devoir», il y eut tout de même l'adoption des résolutions des affaires sociales et celles relative à la culture et à l'histoire, où il a été clairement recommandé à ce que «la porte de l'Algérie reste définitivement fermée aux harkis et aux pieds-noirs qui se sont rendu responsables des pires atrocités à l'encontre du peuple algérien». Ce point est interprété par certains congressistes présents, comme un message à l'adresse du chef de l'Etat l'enjoignant de ne pas intégrer les harkis et autres Français, coupables de crime contre l'humanité dans la loi portant amnistie générale qui sera soumise à référendum. Cela dit, beaucoup de participants au congrès estiment qu'il est possible de pardonner aux Algériens qui ont porté l'uniforme de harki et qui n'ont pas fait usage de torture contre leurs frères. «La situation n'était pas aussi claire que cela. Il est arrivé à des Algériens d'intégrer ce corps de supplétifs de l'armée française, non pas pour torturer, mais simplement pour nourrir leurs familles.» Plus de 42 ans après l'indépendance, il semble que les moudjahidine aient nuancé leur vision par rapport à ceux qui ont combattu l'ALN. Cependant, «il ne sera jamais pardonné à ceux qui ont fait du zèle et torturé leurs proches pour le plaisir de le faire. Ceux-là n'ont rien à faire dans le pays», soutient un moudjahid qui relève que la question des harkis n'est plus un tabou au sein de l'ONM, de même que celle des pieds-noirs. En fait, la tendance lourde parmi les congressistes est de faire désormais le distinguo entre les motivations des uns et des autres et de ne plus mettre tout le monde dans le même sac. Une page de l'histoire a donc été tournée hier et il semble que ce point de la résolution sur la culture et l'histoire ne contredit pas le discours du chef de l'Etat sur l'amnistie générale, mais trace tout de même une ligne rouge à ne pas franchir. «Cette résolution intervient à quelques jours de la Journée des harkis célébrée annuellement en France. Elle constitue donc une mise au point des moudjahidine à la communauté de harkis établie outre-mer», dont une association ne cesse de monter au créneau dans le but de falsifier l'histoire de la Révolution de Novembre. Sur ce point précisément, la même résolution recommande la mise en place d'une commission nationale et des commissions de wilaya, chargées principalement de la lecture des ouvrages traitant de la guerre de Libération, avec le souci de voir l'authenticité des faits rapportés par les auteurs et leur poursuite en justice, dans le cas d'une falsification de l'histoire et ce, quelle que soit la nationalité de ces auteurs et des pays d'impression des ouvrages. Par ailleurs, et préoccupés par les aspects sociaux, les congressistes ont voté à l'unanimité une résolution, recommandant l'application de la loi sur le moudjahid, le chahid et les ayants droit, demandant à ce que le texte en question soit étendu aux enfants de moudjahidine. Enfin, concernant l'élection des membres du Conseil national et du secrétariat national des moudjahidine, M.Mahmoud Kechoud, porte-parole du congrès, a précisé qu'une session est prévue après l'élection du Conseil national à la fin des travaux en vue d'élire les membres du secrétariat national qui sera constitué des wilayas historiques qui éliront à leur tour le secrétaire général de l'ONM.