L'affichage a suscité une grogne populaire qui s'est traduite par des saccages et des arrestations. Quand on sait que pas de moins de 55.000 logements sociaux devront être distribués dans les tout prochains jours, on comprend aisément la gêne des autorités publiques et notamment les chefs de daïra à qui incombe la responsabilité de l'opération. Les troubles ont déjà commencé dans certaines communes qui ont affiché les listes de bénéficiaires de logements. Le cas d'El Kerma à Oran est édifiant. L'affichage a suscité une grogne populaire qui s'est traduite par des saccages et des arrestations. Cela constitue un avant-goût de ce que sera la suite des évènements dans les 300 communes du pays qui sont concernées par la distribution des logements sociaux. Selon les observateurs de la scène sociale, le scénario se reproduira à coup sûr. Ajournées à maintes reprises pour les troubles que ces actions engendrent au niveau local, les attributions sont émaillées systématiquement d'émeutes et de mécontentements. Les présidents d'APC ont été court-circuités et c'est aux chefs de daïras que revient la lourde et ingrate tâche de la distribution de logements. La décision de déléguer cette responsabilité à ces derniers intervient conformément aux nouvelles dispositions contenues dans un décret daté du 24 octobre dernier. L'annonce a été faite récemment par le président du Groupement des intérêts communs (GIC) des Opgi, Mohamed Rahamia. Ce responsable avait signifié que ces mesures ont été prises à cause «des carences et lenteurs enregistrées dans l'attribution des logements sociaux mis à la disposition des autorités compétentes au niveau des comités ad hoc présidés par les APC». Ce désaveu des structures communales n'arrange guère les choses. Le but recherché est d'entreprendre la livraison avant le 31 décembre 2004. Rien que pour la capitale, on dénombre pas moins de 10.000 unités. La pression est si énorme que l'éclatement de foyers de tension à travers toutes les entités communales est inéluctable. Ce dossier que les autorités publiques ambitionnent de traiter avec «le maximum de célérité» est pour le moins inextricable .Ce qui attend les structures administratives communales et wilayales est loin d'être une sinécure. Les émeutes émaillent systématiquement ces opérations. Les récentes et douloureuses expériences illustrent bien cette réalité. L'été 2002 a été l'année la plus significative de la débandade qui caractérise le front social. On a eu droit à la fermeture de routes, aux pneus brûlés, aux échauffourées qui ont vu certains citoyens blessés et d'autres incarcérés. Au final, les logements sont toujours inoccupés. Le logement social est régi par le décret exécutif n° 98-42 du 1er février 1998 définissant les conditions et modalités d'accès aux logements publics locatifs à caractère social. Est considéré comme logement social tout «logement financé totalement par les fonds du Trésor public ou sur le budget de l'Etat». Quant à la commune, elle est assimilée à «une cellule fondamentale dans ]'organisation du pays, la commune est suffisamment proche de la vie des hommes dans leurs cadres sociaux et dans leurs activités pour constituer l'échelon de base type de l'administration du pays, et spécialement apte en particulier à gérer toutes les réalisations qui doivent être adaptées à la satisfaction des besoins essentiels des populations». Si les termes de la loi sont précis, dans la réalité, des pratiques non orthodoxes se déroulent au vu et au su de tous. Des noms étrangers se voient parachutés en haut des liste des attributions sans que personne lève le petit doigt. Le nouveau code qui pourrait pallier ces lacunes, sommeille depuis 2002 dans les tiroirs du ministère de l'Intérieur. Pis, il n'est même pas inscrit à l'ordre du jour du programme du gouvernement. C'est ce qu'a laissé entendre le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, lors de l'une de ses sorties médiatiques. «J'espère que ces deux textes de loi seront approuvés avant 2007, date de la tenue des prochaines élections locales», a t-il indiqué. Ce qui laisse supposer que les APC continueront à se débattre dans l'anarchie et l'improvisation. Le logement social restera donc tributaire de cet état.