Les réfugiés attendent la distribution de nourriture dans le camp d'Idomeni à la frontière gréco-macédonienne Les autorités d'Ankara ont multiplié les préparatifs pour faire face à ce reflux de migrants syriens. Moins de 15 jours après l'Accord scellé entre l'Union européenne (UE) et la Turquie, un premier renvoi de réfugiés et migrants de Grèce en Turquie sera engagé aujourd'hui, préfigurant la mise en oeuvre d'un processus de «réinstallations» des réfugiés syriens qui constituent la plus importante communauté concernée. La date du 4 avril pour les premières opérations de renvoi avait été fixée par la chancelière allemande, Angela Merkel, elle-même au moment de la conclusion, le 18 mars dernier, de l'accord entre l'UE et Ankara, dont elle fut à la fois l'inspiratrice et l'artisane. Cet accord stipule le renvoi en Turquie de toute personne arrivée irrégulièrement en Grèce au-delà du 20 mars, y compris les demandeurs d'asile syriens, avec, en contrepartie, la «réinstallation» dans l'UE, depuis la Turquie, d'un Syrien pour chaque compatriote renvoyé, dans la limite des places disponibles pour chacun des Etats de l'union. En acceptant ce deal assorti du mécanisme «Syrien contre Syrien», Ankara a obtenu en guise de récompense une accélération du processus d'adhésion à l'Union, avec la réouverture d'un des chapitres de négociation, à savoir le 33e qui traite des dispositions budgétaires. Sans enjeux véritables, il avait été bloqué par l'ancien président français Sarkozy, mais François Hollande pressé par Merkel a accepté de le réouvrir. En outre, l'Europe s'engage à verser 3 milliards d'euros, en plus des 3 milliards alloués fin 2015, pour financer la prise en charge des Syriens en Turquie. Comme elle a promis une levée accélérée du régime des visas pour les Turcs, d'ici à la fin juin 2016, à la condition qu'Ankara respecte scrupuleusement les 72 critères identifiés par la Commission. Forte de ces assurances âprement négociées, la Turquie se hâte depuis samedi de préparer les centres d'enregistrement pour les migrants qui vont être renvoyés dans le pays depuis la Grèce, conformément à l'accord censé réduire le flux migratoire et entré en vigueur aujourd'hui même. Les autorités d'Ankara ont multiplié les préparatifs pour faire face à ce reflux de migrants syriens ou d'autres nationalités, qui ont traversé la mer Egée à destination de la Grèce, et se mettre en conformité avec un accord d'autant plus controversé que ses termes demeurent évasifs sur les conditions effectives de cette «réinsertion». Ils vont être déjà quelque 750 migrants à quitter l'île grecque de Lesbos pour le port turc de Dikili, entre lundi et mercredi, à bord de deux navires turcs opérés par l'agence Frontex, selon l'agence de presse grecque ANA. Le responsable grec du service de coordination interministérielle de la gestion migratoire, Yorgos Kyritsis, interrogé à ce sujet, s'est borné à déclarer que «les préparatifs vont bon train», alors que les autorités locales ne cachent pas leur scepticisme tant les moyens mobilisés sont encore insuffisants. Mesure palliative, il est question de recourir, en attendant l'achèvement des centres de regroupement, au complexe sportif mais dans la station balnéaire de Cesme (province d'Izmir), les autorités turques ont accéléré la cadence pour aménager un espace dans le port qui abritera un des centres où seront installées des tentes dans lesquelles des fonctionnaires auront à prendre les empreintes digitales des migrants et les enregistrer. Pour la Turquie, il ne s'agit là que de centres de transit en attendant que les migrants soient envoyés dans les véritables camps de réfugiés, sitôt que leur état de santé sera évalué. Les responsables turcs redoutent en effet l'impact négatif de ces centres implantés sur la côte ouest du pays, où la manne touristique est importante. Une concentration permanente des migrants aurait pour conséquence de faire fuir les touristes, portant un réel préjudice à l'activité estivale des villes concernées. Ainsi, le Croissant-Rouge turc est en train d'implanter un immense camp de réfugiés, du côté de Manisa, à l'intérieur du pays, sachant que la Turquie compte 2,7 millions de réfugiés syriens dont l'Allemagne entend accueillir de petits groupes, à doses homéopathiques.