Bien qu'amateurs, les clubs sont soumis à un certain nombre de taxes qu'ils doivent payer. Lors du débat qui s'est instauré samedi après-midi avec M.Mohamed Raouraoua au cours de son passage au forum de l'Entv, un seul président de club a daigné intervenir pour poser une question au patron du football algérien. Il s'agit de Saïd Allik, le président de l'USM Alger, qui l'a interrogé sur la manière dont il allait procéder pour aider les clubs à éviter la fiscalisation. M. Raouraoua a indiqué qu'il ne comprenait pas que des clubs déjà mis à mal par manque de moyens financiers puissent être soumis à l'impôt. Cependant, il n'a pu que promettre d'intervenir pour que ces derniers en soient exonérés. Ce n'est pas la première fois que Saïd Allik intervenait de la sorte dans ce genre de débat. Le mois dernier, à l'occasion de l'assemblée générale de la ligue nationale, il avait déjà posé le même problème au même interlocuteur. Et il avait obtenu la même réponse. Il continuera, d'ailleurs, à écouter le même son de cloche parce que la clé de la solution au problème ce n'est pas Raouraoua qui la détient mais les politiques. Il faudrait voir à un niveau assez élevé pour qu'on accepte d'alléger le fardeau fiscal de nos clubs. L'histoire que nous racontons est authentique. Elle rapporte qu'il y a environ 4 ans, une équipe de cadres du ministère de la Jeunesse et des Sports s'était déplacée au ministère des Finances pour discuter de la nécessité d'une rallonge budgétaire dans le cadre de la loi complémentaire des finances. Les gens du MJS avaient surtout axé leur discours sur les difficultés traversées par le football et ses clubs qu'il convenait d'aider. La responsable du ministère des Finances avait, alors, tiré d'un tiroir de son bureau quelques exemplaires d'hebdomadaires sportifs tant en arabe qu'en français où des chiffres à plusieurs zéros s'alignaient en titre de unes. Il s'agissait des prix payés par certains clubs pour obtenir la signature de quelques joueurs. «Je n'ai pas l'impression que ces clubs crient famine. S'ils ne font pas de démenti, c'est que donc ces chiffres sont vrais. Il y a bien de l'argent qui circule à profusion dans ce milieu». On imagine que les représentants du MJS ne savaient pas quoi répondre devant une telle évidence. Les présidents de clubs doivent, donc, ne s'en prendre qu'à eux-mêmes et dans la manière dont ils gèrent leurs associations. Voilà des personnes qui, à longueur de saison, n'arrêtent pas de se plaindre du manque de moyens financiers mais qui, lorsqu'il faut s'investir pour enrôler un joueur, n'hésitent pas à signer des chèques gros comme ça. Et le drame c'est que tout cet argent est versé à des joueurs qui n'en valent pas la peine. Des joueurs transformés en stars par la presse alors qu'ils ne sont même pas capables d'amortir un ballon. Ce flux d'argent dans le milieu du football ne pourrait rester en dehors du système fiscal même si les clubs se prévalent d'activer avec un statut de clubs sportifs amateurs donc non susceptibles de générer des bénéfices. Récemment, un président de club a cru bon saisir la Direction générale des impôts pour avoir des éclaircissements sur ses obligations fiscales. Comme il a précisé que c'était un club de division 1, on peut conclure qu'il s'agirait de Saïd Allik que cette question tient à coeur et ce, d'autant plus que l'USMA aurait été «redressée» d'une somme approchant le milliard de centimes. En tout cas, sa lettre a amené la Direction générale des impôts à réagir pour adresser à l'ensemble des clubs de la division 1 et de la division 2, via la FAF, une lettre d'information sur le régime fiscal applicable aux associations sportives. Une remarque s'impose d'entrée à savoir que le rédacteur de la lettre fait référence à l'ordonnance 95-09 sur le sport alors que celle-ci a été abrogée pour être remplacée en août 2004 pour une nouvelle loi sur le sport. Il aurait gagné à actualiser sa missive pour lui donner plus de consistance. A moins que, bien sûr, la lettre en question ait été envoyée à la FAF avant août 2004 auquel cas on peut se demander pourquoi la fédération a mis tout ce temps pour dévoiler un document qui intéresse tous les clubs. Ceci dit, le rédacteur admet bien que les clubs bénéficient d'un statut amateur donc qu'il n'activent pas dans un but lucratif. De ce fait, «ils ne sont pas soumis à l'impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS) et ne relèvent pas, de la sorte, du domaine d'application de l'article 136 du code des impôts directs». Il ajoute que «cependant, au regard de l'impôt sur la dépense, le club acquiert, en raison du caractère économique de certaines de ses opérations, la qualité de redevable de la TVA en vertu de l'article 1er du code des taxes sur le chiffre d'affaires». Malheureusement, juste après il fait de nouveau référence à l'ex-ordonnance 95-09 sur le sport et à son article 20 devenu obsolète, article qui parle de la possibilité offerte aux clubs de se transformer en société commerciale. A partir de là, il cite un certain nombre de contributions fiscales auxquelles une association sportive de division 1 et de division 2 est assujettie à savoir la TVA (recettes provenant du cercle sportif ou de la publicité), le droit de timbre (taxe sur le droit d'entrée au stade), la taxe foncière (à payer pour les biens immobiliers qu'on soit propriétaire ou usufruitier), les retenues à la source au titre de l'IRG (taxe sur les salaires versés aux employés dont les joueurs et les entraîneurs) et le versement forfaitaire (charge patronale sur les salaires). On peut penser que ces taxes n'ont pas tellement changé depuis la promulgation de la nouvelle loi sur le sport. Aucun texte d'application de celle-ci n'a, à ce jour, été promulgué. Dans trois mois, s'il n'y a aucun changement en ce sens, la loi risque d'être frappée d'obsolescence et être remisée au placard. Mais les impôts seront, eux, toujours là à guetter les clubs pour qu'ils s'acquittent de leurs taxes. Nous avons toujours affirmé que ces clubs vivent dans un système hybride où ils enregistrent quelques belles entrées d'argent tout en bénéficiant du statut d'amateur à partir duquel ils sont censés ne pas générer des bénéfices. Comme quoi, le football algérien n'échoue pas que dans ses résultats sportifs. Même dans sa composante, il ne sait pas par quel bout commencer. Tout cela à cause d'une véritable législation qui devrait définir, une bonne fois pour toutes, ce que doivent être les clubs. Soit ils sont amateurs, soit ils sont professionnels. Dans ce cas, il faut les obliger à s'habiller de ce statut même si la notion de professionnalisme suppose d'autres valeurs idéologiques que ces clubs sont loin d'avoir. A partir de là, on peut penser que le rafistolage et le bricolage ont de beaux jours devant eux.