Audition parlementaire 2025 de l'ONU: l'Algérie affirme son engagement à réaliser les ODD    Djanet : large affluence du public aux journées d'information sur la Garde républicaine    Des vents forts sur plusieurs wilayas du sud lundi    La commercialisation du lait de vache subventionné a permis de baisser la facture d'importation de la poudre de lait de plus de 17 millions de dollars    Chaib prend part à une rencontre consultative avec l'Association des médecins algériens en Allemagne    L'Armée sahraouie cible des bases des forces de l'occupant marocain dans le secteur de Farsia    Une caravane de solidarité chargée de 54 tonnes d'aide humanitaire pour la population de Ghaza s'ébranle de Khenchela    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025 (8e étape) : 76 coureurs au départ de la 8e étape, longue de 197,8 km    Ouverture du capital de la BDL: souscription de 85 % des actions proposées en bourse jusqu'à présent    Baisse des incendies de forêts de 91% en 2024    Protection civile: poursuite des campagnes de sensibilisation aux différents risques    Poursuite à Addis-Abeba des travaux du 38e sommet de l'UA    Des auteurs algériens et européens animent à Alger les 15e Rencontres Euro-Algériennes des écrivains    Le Salon du e-commerce « ECSEL EXPO » du 22 au 24 février    Victoire de l'Erythréen Maekele Milkiyas    Au service de l'Afrique…    Les dossiers non résolus de l'occupation coloniale    La délégation parlementaire algérienne rencontre la présidente de l'UIP    Le ministre de la Santé reçoit une délégation du SNPEP    Justice pour les Africains !    Tlemcen: exploiter les atouts des zones frontalières algériennes pour réaliser le développement et investir dans le patrimoine culturel    Equitation: Faouzi Sahraoui élu à la tête de la Fédération équestre algérienne    Exposition nationale du livre à Oran : vers la création à l'ANEP d'une plateforme numérique pour les auteurs    Djamaa El Djazair : début des préinscriptions aux cours d'enseignement coranique à partir de ce samedi    un cri du cœur pour les Jardins Broty    Croissant-Rouge algérien Lancement à partir de Blida de la campagne de «Solidarité Ramadhan»    «Il faut une transformation à grande échelle au Sahel »    Al Qods : Des colons juifs prennent d'assaut la mosquée Al-Aqsa    Maîtriser la clef de voute du nouvel ordre mondial, les nouvelles technologies de l'information    Le roi Charles III reçoit les leaders musulmans et juifs après les «Accords de réconciliation»    Adoption des bilans de l'exercice 2024    Le fair-play a élevé le niveau de la rencontre    Troisième édition du Salon « West Export » : promouvoir le produit local    Ouverture à Batna de la 9e édition    Ballalou préside un atelier du comité scientifique    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025: 78 coureurs au départ de Boussaâda        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Genèse du Phénomène coranique
MALEK BENNABI
Publié dans L'Expression le 21 - 06 - 2005

Voilà une fois de plus, depuis la fin de ses études, Bennabi obligé d'accepter des «petits boulots» pour survivre.
En, juin 1940, Bennabi fut le témoin de l'occupation de Dreux située à environ 80 km au sud-ouest de Paris-ville où il résidait depuis quelques années en alternance avec Tébessa - par l'armée allemande, la ville ayant été abandonnée par les autorités municipales, de son propre chef-Bennabi se chargea d'enterrer les corps qui commençaient à se décomposer dans les rues.
Dès son installation, le commandant allemand de la ville, ayant pris ses renseignements, fit convoquer Bennabi, connu dans la cité comme ingénieur, et lui signa sa réquisition pour la remise en marche des services municipaux. Mais le lendemain, un des responsables de la municipalité, s'étant mis au service des nouvelles autorités, le commandant allemand ordonna à Bennabi de le seconder en tant que responsable technique.
Quelque temps après, Bennabi rencontre dans un bureau de la mairie, Maurice Viollette, précédent maire de Dreux depuis1908, ancien gouverneur général en Algérie en 1925 et qui venait de conclure un arrangement avec les autorités allemandes pour récupérer son poste de maire. Il apostrophe Bennabi - dont les positions anticoloniales lui étaient connues -: «Eh bien monsieur Bennabi, nous nous trouvons cette fois du même côté de la barrière!». La réponse de Bennabi fut cinglante: «Moi, monsieur Viollette, j'ai été réquisitionné». Le regard foudroyant que lui lance Maurice Viollette ne lui laisse aucun doute: ce dernier sera pour lui un ennemi inexpiable qui saura attendre son heure pour lui faire chèrement payer son attitude.
Mais pour le moment, le vent n'était pas favorable au maire de Dreux: le régime de Vichy traditionaliste et clérical entendait lui faire payer sou attachement à la franc-maçonnerie.
Haine religieuse
En mars 41, sur intervention de Vichy, un jésuite remplaçait Violette à la mairie. Le nouveau maire n'eut de cesse de licencier le musulman Bennabi, la haine religieuse ne pouvait s'embarrasser de considérations de compétence.
Voilà une fois de plus, depuis la fin de ses études, Bennabi obligé d'accepter des «petits boulots» pour survivre. Cependant en janvier 1942, un de ses amis algériens installé à Paris lui propose de tenir la permanence du siège d'une association. Ce travail n'occupant que ses fins de journées, Bennabi put enfin fréquenter les grandes bibliothèques parisiennes où il collectait les matériaux nécessaires au projet de son premier ouvrage, Le phénomène coranique.
Mais en juin.1942, Bennabi se retrouve une fois de plus sans travail et sans ressources. L'intensification de la guerre raréfia davantage les possibilités d'emploi en France et il fut contraint d'accepter de travailler en Allemagne.
Ses aptitudes intellectuelles et son niveau d'instruction lui permirent de devenir avec l'assentiment de ses collègues français, le délégué des ouvriers venus de France auprès de leur employeur allemand. Bennabi mit à profit tout son temps libre pour rédiger le livre qui lui tenait à coeur. Par une nouvelle approche de l'exégèse grâce aux données des récentes sciences humaines et en particulier de la psychologie, prouver l'authenticité du Coran, c'est-à-dire son origine divine en démontrant qu'il ne pouvait être l'ouvre du Prophète (SAWS).
L'année 1943, tournant de la Seconde Guerre mondiale, inaugure la politique de bombardement massif et aveugle des villes allemandes par les aviations anglaise et américaine. Bennabi fut le témoin de l'embrasement de certaines d'entre elles et en particulier Hambourg. C'est au cours d'un de ces bombardements que le manuscrit de Bennabi fut détruit et il n'en subsista que quelques notes éparses.
De retour en France, Bennabi assista, quelque temps après, au reflux de l'année allemande et à l'occupation en août 44 de la ville de Dreux par l'armée américaine: le temps des règlements de compte allait sonner. Certains, soucieux de faire oublier un passé de collaboration, d'autres pressés de briser ceux qui ont cru que la libération serait égale pour tous, tous unis pour redorer leur blason à peu de frais. C'est dans cette ambiance de chaos et de grande confusion que Bennabi fut arrêté fin août 1944, ainsi que sa femme, française, à qui on voulait faire payer sa conversion à l'Islam. Ils firent internés dans le camp de Pithiviers, non loin de Chartres, chef-lieu du département dont dépendait Dreux. Bennabi comprit que son arrestation était le résultat de deux forces occultes - même si elles ne se sont pas concertées - celle de Maurice Violette, qui voulait se débarrasser d'un témoin gênant alors que la bataille municipale à Dreux se préparait et celle de ce qu'il a nommé le «psychological service», sous l'influence de l'orientaliste Louis Massignon, qui ne lui a jamais pardonné sa conférence de décembre 1931: «Pourquoi sommes-nous musulmans?» qui a détruit le travail de sape idéologique contre les étudiants maghrébins.
Le «psychological service» harcela Bennabi depuis cette date, l'empêchant d'obtenir le moindre travail depuis la fin de ses études en 1935, et qui fut aussi à l'origine du licenciement en 1932 de son père de son poste de Khodja (secrétaire- interprète) de la commune mixte de Tébessa.
Un étrange avocat se proposa d'assurer la défense des Bennabi. Sa technique que Bennabi éventa rapidement consistait à lui demander de faire des commentaires sur les pseudo-charges reprochées. Bennabi comprit que ses ennemis n'avaient aucune accusation plausible à lui opposer et que ces tests étaient destinés à jauger la possibilité d'engager une procédure judiciaire.
Après huit mois d'internement, le dossier d'accusation était toujours désespérément vide, les Bennabi sont libérés fin avril 1945.
En prison
Mais ce n'était que partie remise. Début octobre 1945, Bennabi se trouve à Paris, employé dans un magasin, sa femme fut arrêtée sous le prétexte que son mari n'avait pas répondu à une convocation qui n'avait jamais été envoyée.
Bennabi rentre à Dreux pour se constituer prisonnier et est incarcéré à la prison de Chartres. Ses ennemis espéraient, avec le retour des travailleurs français d'Allemagne, trouver une personne qui accepterait de charger Bennabi dans la fonction de délégué qu'il avait exercée.
Le même avocat se présenta à Bennabi avec le même manège. Bennabi sut que ses ennemis en étaient encore à essayer d'étayer un dossier d'accusation vide. Le juge d'instruction décide alors, sur la demande de Bennabi, secondé par un avocat algérien, sa remise en liberté.
Les sept mois que Bennabi passa à Chartres lui permirent de rédiger à nouveau Le phénomène coranique en se basant sur sa mémoire et les quelques notes échappées à la destruction. Le manuscrit fut sorti de prison par la femme d'un Français, Georges Marlin, que Bennabi remerciera dans la dédicace de son livre. Sitôt libéré, Bennabi grâce surtout à la générosité d'Algériens, put rentrer en Algérie après une absence de près de sept ans.
Arrivé à Alger, il y rencontre le docteur Khaldi, qu'il connaît depuis 1934 et qui sera jusqu'à sa mort son plus fidèle ami, que la lecture du manuscrit du Phénomène coranique enthousiasme. Le docteur Khaldi présente le manuscrit à Abdelkader Mimouni qui venait de créer les éditions En-Nandha et qui avait en charge l'édition de son livre Le problème algérien devant la conscience démocratique. Bennabi demande à Mimouni d'annoncer dans la prochaine parution de ce livre, le Phénomène coranique.
A Tébessa, Bennabi termine presque définitivement son livre, la touche finale se faisant à Alger avec l'adjonction des passages sur l'acte de prohibition aux USA. Il le donne à un employé de son cousin pour exécuter la frappe sur une machine à écrire.
En novembre 1946, il retourne à Alger avec le docteur Khaldi pour remettre son travail à l'éditeur. Dans le train, son attention est attirée par un entrefilet annonçant que le gouvernement général octroyait un prix à toute oeuvre novatrice sur l'Islam. Bennabi comprend qu'une copie de son manuscrit - et il pense à l'employé de son cousin - est déjà aux mains de l'administration. Ce procédé grossier n'avait pour but que de compromettre un ouvrage dont la portée aurait été fortement amoindrie par le parrainage des représentants de l'occupant.
Arrivé à Alger, il apprit la parution du livre du docteur Khaldi sans l'annonce du Phénomène coranique et décide de financer par des souscriptions l'édition de son livre, ne laissant à l'éditeur que l'aspect légal.
A Alger, Salah Ben Saï, l'ami avec lequel il se lia à Paris, dès 1931 - ainsi qu'avec son frère Hamouda, autre victime de L. Massignon - allait devenir la véritable cheville ouvrière de l'édition du livre. Il organise la collecte de fonds à laquelle participèrent les Algériens de toutes conditions, les proches de Bennabi ainsi que l'Association des oulémas, même si la participation de cette dernière ne fut pas à la hauteur de ses promesses. Il veille au suivi avec l'imprimeur ainsi qu'à la correction des épreuves. Il assure enfin la diffusion du livre dans lequel Bennabi rend hommage à Hamouda dans sa dédicace.
Khaldi, en rentrant en France, prend avec lui une copie du manuscrit qu'il remet au Cheikh Draz, un Azharite diplômé de la Sorbonne, et qui se trouvait à Paris. Sa préface déçoit Bennabi eu égard à l'approche novatrice du Phénomène coranique.
Le livre paraît à Alger en février 1947 et eut un tel retentissement que le professeur Mahdad, membre éminent de l'Udma, dans la livraison du journal Egalité du 10 avril 947, le jugea comme «le premier produit du génie algérien» depuis 1830.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.