L'économie algérienne est, décidément, liée à des prix de brut fâcheusement enclins aux humeurs capricieuses du marché. Ces derniers se stabilisent, en revanche, autour de 19,5 dollars. Les ministres du Pétrole des pays membres de l'Opep se réuniront vendredi prochain au Caire pour décider de la réduction annoncée vers la mi-novembre dernier et qui devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2002. Elle sera donc imminente, à en croire Hugo Chavez, le président vénézuélien qui, dans son émission radio-télévisée hebdomadaire, a déclaré, dimanche que, lors de la prochaine réunion de l'Opep, «il sera sûrement décidé de la réduction» de 1,5 million de barils jour. De la sorte, le cartel espère faire revenir le prix du brut à un seuil acceptable avec l'aide notamment des pays non-Opep et stopper l'effet désastreux de la récession mondiale sur les prix du brut. Les pays non membres devaient participer à l'effort commun en réduisant leurs exportations de 500.000 barils jour. Une promesse dans ce sens a été donnée ces derniers, mais le cartel reste, toutefois, prudent, si ce n'est même sceptique, quant à la bonne volonté de la Russie notamment. Pour rappel, le gouvernement Poutine, après avoir longtemps tergiversé, avait finalement annoncé sa volonté de réduire ses exportations de 150.000 bj. La Norvège, de son côté, a concédé également le même volume tandis que le Mexique annonçait une coupe de 100 000 bj, l'Angola 22.500 bj et enfin, Oman 40.000 bj. Il ne reste, en somme, que 37.500 bj pour totaliser les 500.000 bj exigés par l'Opep en direction des pays non membres. Avec cette nouvelle baisse, le cartel aurait réduit sa production de 3,02 millions de barils jour depuis le début 2001. Ce sera-là sa énième tentative pour conserver sa part de marché laquelle serait passée de 36,5% en 2000 à 34,5% en 2002. Faudra-t-il noter, en outre, que l'inquiétante situation actuelle du marché pétrolier provoquée par la crise que traverse l'économie mondiale, aura des répercussions extrêmement graves, plus particulièrement, sur les économies des pays membres de l'Opep car dépendant dangereusement des recettes pétrolières. L'Iran, à titre d'exemple, est le deuxième producteur de l'Opep. Ses exportations pétrolières constituent pas moins de 80% de ses revenus en devises. A cause du recul prononcé des cours de brut, ce pays enregistrerait un manque à gagner de 4 milliards de dollars! L'Algérie, selon les observateurs, supportera très mal un prix au-dessous des 19 dollars surtout que la loi de finances 2002, signée par le Président Bouteflika samedi dernier, table sur un baril à 22 dollars en moyenne. Aussi, si le gouvernement compte sur la manne pétrolière récoltée durant cette année lorsque les prix atteignaient leur summum, il sera, néanmoins autrement difficile de continuer à le faire si les prix dégringolaient davantage. Le déficit attendu et qui est l'équivalent de 2,39% du PIB pour l'année 2002 sera alors certainement plus important car l'on s'attend déjà à ce que la plus grande partie des recettes provienne de la fiscalité pétrolière avec 916,4 milliards de dinars. Il faut croire également que si l'Algérie dépend encore et toujours à 98% des recettes pétrolières, la chute des prix ne peut qu'avoir des effets fâcheux sur son équilibre économique et, par conséquent, sur son action sociale. Des prix trop bas risquent décidément d'entraver les projets de relance, de porter un coup dur à la croissance et, de ce fait, réduire les chances des entreprises de voir aboutir les efforts consentis pour leur extension ou encore, leur mise à niveau. Les accords d'associations signés récemment avec l'Union européenne et l'adhésion prochaine de l'Algérie à l'OMC exigent, par ailleurs, des entreprises nationales des efforts colossaux pour rendre leurs produits compétitifs d'ici, au moins, la mise en vigueur de la zone de libre-échange euroméditerranéenne. Les aides de l'Etat étant, de ce fait, les bienvenues, seront compromises par une politique restrictive provoquée par un déficit budgétaire trop important. Quant à encourager les exportations hors hydrocarbures, l'exercice relèverait alors de l'ordre du fantasme! Sur le plan social, il est évidemment clair que l'action du gouvernement sera dangereusement limitée. La croissance en baisse, le chômage en hausse et la population sous pression créeront un climat de tension favorable à toute forme de violence. Finalement, s'il y a une inquiétude à avoir, ce n'est pas tant que les prix du brut continuent de chuter, mais plutôt que l'Algérie et ses gouvernants continuent à dépendre de la sorte d'une ressource périssable et sujette à des fluctuations malheureuses.