«Des personnes bénéficient de deux pensions et des intermédiaires interviennent pour faire passer des dossiers.» Des cas de comportements «illégaux» et de «pratiques frauduleuses» ont été signalés, hier, par le ministre des Moudjahidine, Mohamed Chérif Abbas, parlant de l'allocation de la pension complémentaire attribuée aux moudjahidine et ayants droit. Ce dossier brûlant s'ajoute à celui des faux moudjahidine qui n'a pas encore révélé tous ses secrets. Le ministre a qualifié cette affaire de «véritable hémorragie» nécessitant, sans nul doute, des mesures rigoureuses. Certaines sont d'ores et déjà prises. Elles se sont traduites par le licenciement de quelques responsables régionaux, tandis que d'autres, aussi sévères, interviendront dans les prochains jours, à en croire le ministre. Il sera question, d'après lui, de poursuites en justice à l'encontre de toute personne présumée et/ou à l'origine d'une pratique illégale. «Il y a un dysfonctionnement au niveau de certaines directions de wilaya», fera savoir Mohamed Chérif Abbas, s'adressant aux responsables régionaux ayant participé à la rencontre d'évaluation, organisée hier dans les locaux de son département. D'un ton sévère, le ministre a mis à nu «des intermédiaires» assurant le règlement d'une affaire entre l'administration et un «client» moudjahid, en touchant même de l'argent. Il s'agit surtout, développe l'orateur, d'une «gradation sur l'échelle des catégories des ayants droit». En clair, des moudjahidine invalides de guerre réclament une pension d'invalidité à 100% même à contre-courant de ce qui est décidé dans le dossier de chacun d'eux. Il faut dire qu'un comité médical est installé pour l'examen des dossiers d'invalidité et les classer par catégorie. Ces comportements ainsi que l'activité des «intermédiaires» sont «inacceptables et portent atteinte à la crédibilité de notre travail», laissa entendre le ministre sur un ton loin d'être conciliant. «Ce droit au profit du moudjahid est consacré par la loi et nous devons le protéger. Nous allons éliminer tout comportement illégal par le recours à des mesures très sévères», avertit une seconde fois Chérif Abbas. Avec un langage plus simple, il dira que «le passe-droit et le tag alla men tag n'existent pas chez nous». Il ira encore plus loin pour dire que «parfois nous sommes allés même à contre-courant de la loi pour le bien-être et une meilleure prise en charge sociale des moudjahidine». Il s'explique, la pension complémentaire qui est plus évaluée que l'initiale a été longtemps critiquée par les législateurs. En dépit, continuera le ministre, «nous nous sommes débarrassés des entraves». Et, «nous nous sommes en fin de compte heurtés à une catastrophe qu'est l'illégalité par laquelle est géré le dossier de la pension complémentaire». A ce stade, l'autre incohérence est annoncée sans hésitation par Mohamed Chérif Abbas. «Il existe des gens qui bénéficient de deux pensions au niveau de deux directions différentes». Pis encore, l'anomalie est que «parfois une seule personne inscrite au sein d'une seule direction bénéficie de deux pensions». Cette affaire, due, selon le ministre à l'absence de révision et de contrôle, pèse, faut-il le reconnaître, très lourd sur le Trésor. «Cette illégalité et accaparement», ont des conséquences fâcheuses sur le Trésor, sachant que, précise l'orateur, la pension complémentaire représente 50% du budget dégagé spécialement pour les allocations. Désormais, toutes les mesures nécessaires seront prises afin d'y remédier et mettre fin à l'activité illégale, fera savoir le ministre des Moudjahidine. Il instruit les directeurs régionaux présents de relancer la mesure dite «attestation de reconnaissance». C'est un document à présenter à l'heure du paiement et qui doit être délivré par le directeur de wilaya, après examen du dossier, pour chacun des ayants droit. Ces mêmes directeurs régionaux sont appelés aussi à gérer l'autre affaire dite «les recours», l'autre casse-tête infini du ministère. Sur cette affaire, le ministre fera marche arrière pour évoquer encore une fois les interventions illégitimes de certaines personnes pour replacer certains bénéficiaires sur l'échelle des catégories d'ayants droit. «Tous les dossiers de recours devront passer par le comité médical, mais surtout par le canal de la loi», insiste le ministre, soulignant «l'existence de défaillances au niveau de plusieurs directions de wilaya». Sur sa lancée, il a signalé que des licences automobile ont été accordées «à tort et à travers par certains responsables pour lesquels nous avons illico mis fin à leurs fonctions», laissa entendre le ministre, rappelant que la justice se prononcera dorénavant pour toute personne «tentée de se comporter illégalement». Un congrès d'évaluation se tiendra en janvier 2006, en attendant, il semblerait qu'un véritable coup de balai est en train de se faire, focalisant les attentions sur la lutte contre les pratiques frauduleuses.