Les Américains menacent de bloquer l'aide financière en cas de participation de Hamas aux prochaines législatives. Le mouvement Hamas a raflé la mise en réalisant un véritable raz-de-marée dans les quatre principales villes palestiniennes en devançant le Fateh qui a reculé dans ses fiefs traditionnels. Il a raflé 13 sièges sur les 15 à Naplouse, 9 sièges à Al-Birah contre 4 pour le Fateh et 2 pour le FDLP et 8 à Djenine contre 7 pour le Fateh et le FDLP réunis. A Ramallah où les décomptes n'ont pas été finalisés vendredi, l'estimation des observateurs le classent également en première position loin devant ses principaux concurrents. L'exploit de Hamas dans les élections locales du week-end dernier a mis tout le monde dans l'embarras, y compris l'Autorité palestinienne qui se contente par le biais du Fateh de quelques maigres résultats dans les milieux ruraux. Le chef du gouvernement Ahmed Qorai a présenté sa démission en vue de se préparer aux législatives de janvier prochain. Le porte-parole du département d'Etat des Etats-Unis a réagi très rapidement à la victoire de Hamas en la qualifiant d'«organisation terroriste» qui joue double jeu en « participant » aux élections. Il est allé plus loin en menaçant de suspendre l'aide économique en cas de participation du Hamas aux élections législatives. Israël a tout de suite imposé le couvre-feu dans ces villes et bloqué les autobus en navette entre la bande de Ghaza et la rive ouest. Comme elle a procédé à l'arrestation de 9 militants du Hamas. La victoire du Hamas intervient dans un contexte international très favorable. Car il faut noter que les élections législatives ont eu lieu simultanément en Irak. Les sunnites y participent pour la première fois depuis l'invasion du pays et comptent surprendre le gouvernement de Baghdad. L'Irak constitue le pôle d'attraction de l'ensemble des mouvements politiques de la région du Moyen-Orient. L'autre élément nouveau a été initié par le premier responsable du parti, Khaled Machaal, qui a fait une déclaration de taille en menaçant de déclarer la guerre à Israël au cas où il s'attaquerait à l'Iran qui constitue avec la résistance palestinienne «un même front». Cette déclaration faite à la veille du scrutin a dû peser lourdement sur les résultats. Pour les Palestiniens, le Hamas représente le dernier carré des résistants depuis la mort de Arafat qui personnifiait leurs aspirations par son charisme, et son long combat ainsi que les assassinats ciblés de cheikh Yassine et de Rantissi. Les conséquences les plus néfastes ont été ressenties par le Fateh. Car en sus de la démission du Premier ministre, Hanane Achraoui - la dame qui avait mené les négociations à bon port - a choisi «la troisième voie» en conduisant sa propre liste pendant que les autres membres du comité central du Fateh sont entrés dans des listes en rangs dispersés. Des jeunes militants du Fateh ont choisi Merouane El Barghouthi, emprisonné en Israël, pour conduire leur liste. Sur la même liste figurent Farès, le ministre des Affaires civiles, et Dahlane, le conseiller de Abbès en matière de sécurité. Il se trouve que le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbès propose lui aussi El Barghouthi comme tête de liste. Visiblement l'onde de choc du raz-de-marée du Hamas a mis le Fateh dans le coma. A l'approche des législatives, les dissensions vont s'élargir, doublées de pressions américano-israéliennes conséquentes. Rappelons que l'avènement de Abbès, salué par les Américains, les Israéliens et l'opinion publique européenne, de manière générale, représentait une carte d'apaisement. L'échec cuisant qu'il vient de subir face au Hamas risque de remettre les pendules à l'heure. Le retour des mouvements islamistes qui s'opère ici et là, un peu partout dans le monde, obéit à une logique de résistance face aux pressions. Ce qui se trame en Palestine n'est que la conséquence de la politique préconisée par les Américains dans le Moyen-Orient. Les élections constituent une autre forme de résistance.