«On n'est pas à genoux et nous pouvons aller très loin.» C'est ce qu'a déclaré, hier, le président Tebboune à l'ouverture des travaux de la Conférence nationale sur le plan de relance pour une nouvelle économie. Optimiste malgré la situation financière difficile que traverse le pays, le chef de l'Etat voit grand et fait même d'importantes annonces. En premier, il s'agit de ne pas se leurrer de l'augmentation des exportations hors hydrocarbures à 5 milliards (mds) de dollars d'ici fin 2021 contre les 2 milliards de dollars actuels. Un énorme défi, il faut le dire car depuis son indépendance, l'Algérie n'a pas de produits à exposer sur le marché mondial et le peu qui existe n'arrive pas à se frayer un chemin parmi la concurrence. Que ce soit en raison de la bureaucratie administrative ou de l'écart avec les normes internationales, la production nationale n'a jamais été génératrice de devises. Hormis et depuis peu, l'agriculture qui vient d'engendrer quelque 25 milliards de dollars, supplantant pour la première fois les recettes des hydrocarbures. Pour faire baisser la dépendance de l'Algérie à l'or noir de 98 à 80%, le président compte diversifier les exportations et promouvoir l'investissement. «L'Etat a les moyens de sa politique» a assuré le chef de l'Etat en indiquant que les réserves de change s'élevaient actuellement à 57 mds de dollars et que les disponibilités bancaires pour l'investissement seront de 1 900 mds DA avec la possible affectation, durant l'année en cours, de 10 à 12 mds de dollars. Des prêts atteignant jusqu'à 85% du montant d'un projet pourront être financés par les banques a affirmé le président non sans faire sa deuxième grande annonce portant sur sa disponibilité à la création de banques privées et de compagnies de transport aérien et maritime de marchandises et de voyageurs. Et il faut dire que ce ne sera pas la deuxième expérience du pays dans ce domaine. L'Algérie a déjà ouvert son ciel et ses banques aux privés mais a connu un épisode des plus malheureux avec Khalifa Bank, Khalifa Airways ou encore la Bcia, pour ne citer que ces cas-là. Pour le fret maritime dont la décision d'une ouverture avait été gelée en 1998, le dossier avait finalement été réexaminé et adopté en 2018. En février 2019, le ministre chargé du secteur des transports à l'époque avait même annoncé la réception en mars ou avril 2019 du premier navire privé. Le président Tebboune vient donc confirmer cette ouverture afin de réduire la facture d'importation des services qui atteint annuellement les 12,5 milliards de dollars dont 3,4 milliards USD pour les frais du transport maritime de marchandises. La bonne nouvelle donnée par le président est aussi sa décision de réformer le Code du commerce en profondeur et la dépénalisation de l'acte de gestion. Il s'agit là d'une avancée importante qui va non seulement permettre d'encourager les gestionnaires à accepter et à assumer le risque de gestion, ce qui est indispensable en système de libre concurrence, mais aussi libérer leurs initiatives. Abdelmadjid Tebboune va encore plus loin pour rassurer les opérateurs privés en décidant que la seule destination des lettres de dénonciation anonymes est le broyeur. Il y a lieu de rappeler, à ce propos, que le parquet prenait en compte les dénonciations anonymes de faits de corruption même si cela n'était pas «systématique» comme l'avait affirmé, en novembre 2019, le ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati, soutenant cependant que de «graves affaires» avaient été ouvertes grâce à elles. Cela ne sera plus le cas dorénavant car comme l'a bien indiqué le président Tebboune «tout le monde est innocent jusqu'à preuve du contraire. Il faut avoir le courage de dénoncer. Nous avons 180 journaux et nous avons les moyens de mener les enquêtes». Notons enfin que de nombreuses autres mesures incitatives ont été décidées par le chef de l'Etat afin de créer l'environnement idoine permettant aux opérateurs économiques d'évoluer sainement et de s'atteler à remettre l'économie nationale sur les rails. Il s'agit, notamment de l'amélioration de la relation avec le ministère des Finances et l'Administration fiscale ou encore la réforme bancaire qui il faut dire a été annoncée à de multiples reprises par les précédents gouvernements sans jamais aboutir. À ce propos, le président, qui soutient que l'Algérie n'a pas de banques, mais juste des guichets publics, est intransigeant et affirme que les choses ne resteront pas en l'état. À voir les importantes annonces faites, il est clair que Abdelmadjid Tebboune voit grand et a une totale confiance dans le génie algérien.