Parmi les films en compétition, deux ont fait forte impression. Volver (en castillan Revenir) de Pedro Almodovar qui continue avec brio d'examiner les turpitudes féminines tout en abordant des sujets graves comme l'inceste, la disparition, l'amour maternel. Le tout filmé dans sa région d'enfance, une ville du Sud, au bord de la mer battue par les vents qui rendent les hommes fous. Comme toujours un casting éblouissant, des fidèles comme Carmen Maura ou Lola Duenas et une petite nouvelle qui tire plus que son épingle du jeu: Pénélope Cruz pour un retour aux sources. La première oeuvre de l'Ecossaise Andrea Arnold Red Road (Route rouge) est impressionnante. Une femme qui travaille dans une société de surveillance (la ville est truffée de caméras et pour leur sécurité, des agents contrôlent sans cesse les faits et gestes des citoyens), y voit apparaître le meurtrier de son mari et de sa fille qui a fini de purger sa peine. Elle cherche alors à se venger de celui qui les a tués dans un accident dû à l'alcoolisme. Dans son rapport, fait à la fois d'attirance et de haine, elle s'aperçoit que tout n'est ni blanc ni noir et que dans chacun réside une part d'humanité. Le tout filmé à Glasgow, une ville accablée par la misère sociale et la pauvreté. Dans les sections parallèles, trois films très politiques ont retenu l'attention. Dans Bamako, le réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako a filmé dans la ville de son enfance et dans la cour de sa maison, le procès (imaginaire) du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, brocardant ainsi les pays qui prêtent de l'argent aux Etats africains tout en leur demandant un remboursement qui saigne les peuples aux quatre veines accentuant ainsi une pauvreté chronique. Edifiant. Dans Kigali, Christophe Klotz s'interroge sur le pouvoir des images. Notamment sur celles des massacres au Rwanda, diffusées à la télévision en 1994 et qui n'ont pu empêcher le génocide (200.000 morts en quatre mois), ni même réveiller les consciences des hommes politiques et des citoyens de France ou d'ailleurs. Terrifiant. Enfin Bled Number One de Rabah Amer Zameiche qui ausculte les états d'âme d'un jeune Français d'origine algérienne, expulsé dans la patrie de ses ancêtres pour cause de double peine. Kamel joué par le réalisateur, découvre une société qu'il ne connaît pas, une langue qu'il ne parle pas, des codes qu'il ne comprend pas. Le réalisateur dresse un magnifique portrait d'une Algérie contemporaine, déboussolée par dix ans de terrorisme et en pleine mutation, dans un style inventif mêlant documentaire et fiction, acteurs confirmés et non professionnels, scènes très écrites et improvisation. Il procède par petites touches, croquant des scènes au hasard de ses périgrinations journalières. L'absence de moyens financiers (il est son propre producteur) lui a donné une audace qui enrichit le film. Réjouissant.