Le premier responsable du parti considère qu'il va rééditer l'exploit de 2002. Abdallah Djaballah revient de loin. Tel est le constat qu'on peut dresser à présent, après deux crises qui l'ont laminé de l'intérieur. Avec du recul, il prétend que cela a été bénéfique pour le parti, puisqu'à chaque fois il remonte dans les scores en termes de voix. Mais le secret de ces exploits ne se situe-t-il pas dans la nature même du mouvement? Flash back...L'histoire remonte aux années 70, dans les campus de Constantine. En 1973, est créée la Djamaa islamya par un illustre inconnu. C'était l'époque des conflits entre communistes et islamistes qui se sont étendus aux principaux centres universitaires du pays. On retrouve dans son premier noyau -outre les ténors de ce que deviendra plus tard Ennahdha- les figures de proue du FIS, tels Hachani, Kébir, Boukhamkham, Djeddi, etc. Mais à chaque période, son hémorragie. Vers la fin des années 80, ils quittent le groupe pour se restructurer en parti politique qui deviendra le FIS. Djaballah, le promoteur du groupe, ne voyait pas l'utilité de sortir de la clandestinité pour activer à visage découvert. Il avait subi les interrogatoires et la torture et gardait sa méfiance intacte. Aujourd'hui encore, il continue de croire que la Rabita pouvait constituer le socle du mouvement islamiste algérien. Présidée par feu Ahmed Sahnoun, elle réunissait les principaux courants islamistes. Mais la création du FIS a chamboulé l'ordre des choses et chacun est allé créer son propre parti. Djaballah crée Ennahdha et tente cahin-caha de se placer sur l'échiquier. Mais les jeux sont faits. Le FIS occupe déjà les devants de la scène et rafle la mise par deux fois. Ennahdha fera de la figuration. La crise arrive. On s'installe dans le terrorisme pendant très longtemps. Les deux partis isalmistes restant en lice jouent au coude à coude, avec des stratégies différentes. Pendant que Hamas (qui deviendra MSP) s'insère dans la «participation», Ennahdha se range dans la tranchée du «refus» avec les trois fronts et le PT. Cette position s'est avérée payante. En 1997, l'électorat islamiste s'est rabattu sur Ennahdha, en lui permettant d'entrer dans l'APN par la grande porte. A la veille des présidentielles de 1999, le parti connaît sa première cassure. Les députés du parti réussissent un coup d'Etat soft en évinçant Djaballah. Il ne perd pas son temps. Il crée aussitôt son propre parti et entre dans la compétition des législatives et réalise un exploit en se plaçant troisième derrière le FLN et le RND. «On est deuxième en termes de voix», souligne Djaballah devant les journalistes de l'Expression. Comme à chaque présidentielle, Djaballah subit les relents de son obstination, une seconde crise éclate en 2004. Elle divise autant le parti que le groupe parlementaire. Après une longue bataille juridique, Djaballah garde son parti El Islah. Il sort donc de l'hibernation pour appréhender l'avenir. Question: la double crise a vidé le parti de sa substance, comment comptez-vous revenir sur les scores? Djaballah fonce tête baissée: «Nous allons réaliser des scores bien plus importants que les précédents». Comment, alors que l'hémorragie continue? Où allez-vous trouver les candidats pour les législatives? Selon sa théorie, El Islah n'est pas un parti fermé. Il ira d'abord les chercher dans les rangs de ses militants. S'ils ne s'y trouvent pas, il ira les chercher dans les universités, chez les cadres «politisés», bien évidemment. Même s'ils ne sont pas islamistes? «Même s'ils ne sont pas islamistes», rétorque-t-il. Mais lorsqu'on lui pose le cas de Mezrag, il rappelle que ce dernier avait déclaré son intention de se présenter sous les couleurs du FLN. Il s'en tient au règlement intérieur et aux statuts du parti. Selon Djaballah, l'adhésion au parti n'a jamais cessé. Il indique que le flux est ascendant ces derniers mois. Comme s'il voulait prouver que la dernière crise l'a revigoré. Il suppose qu'El Islah va rééditer l'exploit de 2002 en 2007. On verra bien dans une année ferme.