Le directeur de la Haute commission électorale de Libye (HNEC) a présenté devant les députés réunis à Tobrouk lundi dernier, les motifs d'un report de l'élection présidentielle, initialement prévue le 24 décembre, en soulignant l'ampleur des multiples obstacles juridiques, sécuritaires et politiques auxquels l'instance a été confrontée. Plongée dans une situation de crise multiforme et complexe, la Libye a connu, durant l'année écoulée, d'indéniables avancées vers la sortie de crise, sous l'égide de la mission d'appui des Nations unies (Manul). Les Conférences de Berlin I et II, celles de Paris et de Rome ainsi que les importantes réunions du groupe des pays voisins à Alger ont contribué à baliser la voie, malgré les contraintes représentées par la présence de forces étrangères et de mercenaires ainsi que par les manoeuvres de bon nombre de puissances régionales et internationales, parties prenantes du drame qui affecte le pays. Le scrutin du 24 décembre devait être, à cet effet, le couronnement des étapes parcourues, notamment le Forum de dialogue politique inter libyen (FDPL), porteur d'un gouvernement d'union et d'un conseil présidentiel, ainsi que le Comité militaire mixte 5+5, artisan d'un cessez-le-feu général et de la réouverture de l'axe routier majeur entre Tripoli, Syrte, Benghazi et Tobrouk. Malheureusement, la présidentielle qui constituait l'aboutissement des efforts de l'ONU et du groupe des pays voisins conduits par l'Algérie a subi un report in extremis, du fait des désaccords profonds entre les deux principaux camps rivaux quant aux candidatures dont certaines étaient effectivement clivantes. À cela s'ajoutent les nombreux incidents sécuritaires comme les affrontements, quelques jours seulement avant le scrutin, entre milices aux portes de Tripoli, des interférences politiques diverses évoquées par le chef de la Haute Commission Nationale Electorale (HNEC) Imad al-Sayeh qui a déclaré aux députés que ces agissements ont conduit à la décision du report. D'autres difficultés sont apparus, suite aux arrêts rendus par les Cours de Sebha et de Tripoli qui ont validé les recours de certains candidats controversés, notamment ceux de Seif al-Islam al-Gueddhafi et de Abdelhamid Dbeibah, Premier ministre qui s'était engagé à ne pas postuler lors de sa nomination, ainsi que le maréchal Khalifa Haftar, artisan d'une offensive avortée contre Tripoli en 2019. Pour al-Sayeh, les tribunaux ont examiné les recours «dans la forme et non dans le fond» alors que cela exigeait un «délai plus long». Comme aussi, il a souligné les cas de fraude électorale, parfois «flagrants» et parfois «masqués». Déplorant les conditions dans lesquelles l'instance a dû préparer un scrutin aussi crucial, pressé par diverses parties dont la communauté internationale, sourde et muette face aux contraintes rencontrées, il a surtout reconnu que les conditions sécuritaires pour le déroulement des opérations de vote se sont avérées incertaines par rapport au «plan ambitieux» initialement concocté.«Nous nous sommes heurtés à la réalité du terrain», a plaidé al-Sayeh qui reconnaît que la date du 24 janvier est un pari hasardeux. Hier, Les «Forces nationales pour le changement» libyennes ont proposé de tenir des élections législatives en premier, selon des médias locaux.La proposition a été faite à l'occasion d'une réunion tenue lundi entre la conseillère du secrétaire général de l'ONU, Stephanie Williams et le Coordonnateur de la Mission des Nations unies en Libye, Rizdon Zeninga, avec des représentants des forces nationales pour le changement regroupant divers partis politiques libyens au siège de la mission dans la capitale Tripoli. Reste à savoir quel écho aura une telle proposition.