La Chambre des représentants (Parlement) tiendra, lundi prochain, une réunion pour tenter d'élaborer un nouveau calendrier de la présidentielle et des législatives en Libye, après le report du scrutin prévu hier. La commission chargée du suivi des élections s'est vue confier la mission d'une nouvelle feuille de route pour la transition et il est depuis question d'un remaniement du gouvernement, voire d'un nouvel Exécutif, afin d'engager les futures échéances dans des conditions favorables. La proposition, mercredi dernier, de la Haute Commission Nationale Electorale (HNEC) de reporter la présidentielle au 24 janvier prochain, arguant que son travail a subi les contraintes des recours tels que prévus par une loi électorale inadéquate, n'a pas trouvé d'écho. Ladite loi électorale avait été promulguée par le président du Parlement, Saleh Aguila, en septembre, sans vote, un texte controversé et taillé sur mesure pour son allié Khalifa Haftar. Puis, Aguila s'est lui-même porté candidat, en se donnant, comme à son allié Haftar, des garanties pour retrouver son poste en cas d'échec à la présidentielle. Une mesure qui a indigné le camp rival mais approuvée par l'émissaire de l'ONU, Jan Kubis. Ces manoeuvres ont fait perdre à la mission onusienne (Manul) son crédit et elles expliquent, en partie, l'échec annoncé des élections. Comme le mandat du gouvernement intérimaire que dirige Abdelhamid Dbeibah devait prendre fin le 24 décembre, voilà un autre facteur d'incertitude qui va peser sur la scène politique et sécuritaire du pays. Mme Stephanie Williams, l'envoyée spéciale du SG de l'ONU en Libye, a beau se démener et rencontrer tour à tour «un certain nombre de candidats à la présidentielle pour discuter des moyens de préserver et faire avancer le processus électoral», a-t-elle écrit sur Twitter, c'est à un autre suspense que sont désormais conviés les Libyens, avec la certitude qu'ils ne sont pas encore au bout de leur peine. Pendant des semaines, les chancelleries ont attendu l'annonce d'un consensus sur la base juridique des élections générales mais en vain, tant les positions de Tripoli et Benghazi sont opposées. A cela s'ajoutent des conflits d'intérêt, des candidats contestés, des tensions sur le terrain, des lacunes de la médiation onusienne et les «contradictions» d'une loi électorale qui a conduit les Cours de Sebha et de Tripoli à annuler les invalidations de certaines candidatures par la HNEC. Au final, l'échec est consommé qui risque de compromettre le processus de transition soutenu par les Nations unies, auquel cas la Libye risque de replonger dans une crise encore plus dramatique que par le passé. Le scénario d'un tel fiasco était prévisible depuis quelques semaines, déjà, puisque la HNEC n'a pas pu dévoiler la liste officielle des candidats retenus et qu'une campagne électorale n'a pu, de ce fait, avoir lieu. Les candidatures de Seif El Islam, symbole du régime de El Gueddhafi, Khalifa Haftar qui a mis à feu et à sang la Tripolitaine, Dbeibah et Aguila qui s'étaient engagés à ne pas concourir, Jan Kubis qui a jeté l'éponge un mois avant la présidentielle, tout cela aura contribué à brouiller l'image d'un scrutin censé sortir la Libye de la crise. Compte tenu de tous les ingrédients annonciateurs d'un échec programmé, l'acharnement de la communauté internationale à imposer le respect du calendrier électoral aura fini par précipiter le triste dénouement qui était inscrit par avance dans la loi électorale concoctée par Saleh Aguila.