L'UE a débranché sept banques russes du système financier international Swift, mais a pris soin d'épargner deux gros établissements financiers très liés au secteur des hydrocarbures, en raison de la forte dépendance de plusieurs Etats européens au gaz russe. Destinée à couper en partie l'économie russe de la finance mondiale en représailles à l'invasion de l'Ukraine par Moscou, la mesure a été publiée, hier, au Journal officiel de l'UE, qui a également entériné l'interdiction de diffusion en Europe, avec effet immédiat, des médias russes RT et Sputnik. L'exclusion de Swift vise VTB, la deuxième plus grosse banque de Russie, ainsi que Bank Otkritie, Novikombank (financements de l'industrie), Promsvyazbank, Rossiya Bank, Sovcombank et VEB (banque de développement du régime). La mesure sera effective à partir du 12 mars et fait suite au feu vert, mardi soir, des Etats membres de l'UE à l'issue de plusieurs jours de négociations. Ces établissements bancaires, choisis en «étroite coopération» avec Londres et Washington, «sont les premiers concernés par le financement de l'effort de guerre» de Moscou en Ukraine, a affirmé un responsable européen, notant qu'environ un quart du volume du système bancaire russe est visé par la mesure. La Pologne, très active dans son soutien à Kiev, avait plaidé pour qu'un plus grand nombre de banques russes soient touchées, selon des sources diplomatiques. Finalement, la sanction ne vise ni Sberbank, première banque du pays, ni Gazprombank, bras financier du géant des hydrocarbures, par lesquelles transitent la majeure partie des paiements pour les livraisons de gaz et pétrole russes à l'UE. L'Allemagne et l'Italie s'étaient alarmées ces derniers jours de ne plus pouvoir payer leurs approvisionnements de gaz russe dont ils sont très dépendants, en cas de blocage de l'accès à Swift des banques russes en charge de ces transactions. «Il est impossible de distinguer dans le système Swift les ordres de paiement concernant les hydrocarbures et les autres», a assuré un responsable européen en guise de justification. L'exclusion de Swift est présentée comme une «arme atomique» financière: cette plate-forme de messagerie sécurisée permet des opérations comme le transit des ordres de paiement et ordres de transferts de fonds entre banques. Swift, société de droit belge, est uniquement tenue d'appliquer les sanctions adoptées par les Européens. En 2012, elle avait exclu de son système plusieurs banques iraniennes à la suite d'une décision de l'UE avant que la plupart ne soient réintégrées en janvier 2016. Quelque 300 banques et institutions russes utilisent les services de Swift. Mais Moscou a mis en place des infrastructures financières alternatives pour les transferts, via un système baptisé SPFS, les paiements (cartes «Mir», qui se veulent l'équivalent de Visa et Mastercard) et la notation (agence Akra). Et les banques visées pourront continuer des échanges avec des banques étrangères via d'autres moyens que Swift (emails, fax...), mais moins rapides, bien moins sécurisés et plus coûteux, en particulier pour des montants très importants. Promsvyazbank, Rossiya Bank et VEB faisaient déjà partie de la liste des personnes et entités russes frappées d'un gel des avoirs dans l'UE dans le premier train de sanctions européennes décidé, il y a une semaine, après la reconnaissance des entités séparatistes du Donbass. Depuis l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014, l'UE avait déjà restreint drastiquement l'accès de banques russes -dont Sberbank, VTB, Gazprombank et VEB- aux marchés de capitaux européens. Au total, environ 80% du système bancaire russe sont visés d'une façon ou d'une autre par des sanctions financières de l'UE adoptées jusqu'à aujourd'hui, a assuré le responsable européen. Le e Journal officiel de l'UE a confirmé également mercredi l'interdiction pour les Européens de participer à des projets cofinancés par le fonds souverain russe RDIF.