«Réaliser vite et surtout bien» est le mot d'ordre qui s'est dégagé à l'issue des deux journées, mercredi et jeudi derniers, de la réunion d'évaluation du secteur de l'habitat en 2001 et les perspectives pour 2002. Tous les aspects ont été mis «sur la table» et débattus. Présidés par le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, M.Abdelmadjid Tebboune, qui est intervenu après chaque exposé pour faire des remarques et donner ses orientations, les travaux ont été clôturés par le Chef du gouvernement qui, après avoir remis des prix à cinq architectes pour leurs oeuvres, a prononcé un discours axé sur les attentes de l'Etat et du citoyen de ce secteur vital. Avoir son propre logement, voire un toit seulement, ne faisait plus partie des rêves de l'Algérien depuis la nuit des temps. Aucun gouvernement de l'Algérie indépendante n'avait réussi une politique de l'habitat et de l'urbanisme jusque-là. Ce qui a eu pour résultat, outre la prolifération de l'habitat précaire, la vétusté du parc immobilier. Ces deux phénomènes réunis peuvent conduire à une catastrophe comme celle qu'ont connue Bab El-Oued et d'autres régions du pays le 10 novembre dernier. C'est à une double mission que doit faire face le département en charge de l'habitat et de l'urbanisme. S'attaquer au déficit cumulé depuis des décennies et «mettre fin à l'esprit d'assistance permettant ainsi aux citoyens de devenir propriétaires de leurs logements» comme l'a précisé le Chef du gouvernement dans son discours de clôture. «Le nombre total de logements réceptionnés, urbain et rural, est de 101 962 unités», a annoncé M.Boukhari, directeur central au ministère, au cours de sa communication. Un record jamais atteint jusque-là. Durant la même année 137.634 autres logements ont été lancés, a précisé le même orateur. A ce rythme-là, la crise aiguë du logement pourra être surmontée «d'ici à 3 ou 4 années», nous a confié M.Tebboune. Pour maintenir la cadence, une offensive multidirectionnelle est menée pour faire sauter tous les verrous et installer des mécanismes et instruments devant assurer la pérennité d'un système évolutif de l'habitat, logement social, participatif, location-vente, promotion immobilière, sources de financements, contrôle technique, résorption de l'habitat précaire... autant de dossiers et bien d'autres ont été débattus lors de cette réunion. Mais cette grande préoccupation des pouvoirs publics, qui consiste à tout entreprendre pour loger les Algériens, ne fait pas perdre de vue aux responsables du secteur l'exigence de la qualité. «L'année 2002 sera celle du contrôle et de la qualité», a averti le ministre de l'Habitat. Il faut en finir avec les cités dortoirs érigées au nom de l'urgence. Comme il ne faudra plus accepter les malfaçons qui ont, petit à petit, instauré des pratiques favorisant l'anarchie en «obligeant le bénéficiaire à finir les travaux ou les refaire à son goût». Et si les entrepreneurs trichent en mélangeant la chaux au vinyle, sur la contenance des sacs de ciment lors des coulées de dalles, sur l'épaisseur des cadres de portes... c'est surtout parce que le contrôle est défaillant. Si celui-ci est affaire d'hommes, il est aussi dépendant des moyens mis en oeuvre. Des dotations en véhicules des structures régionales sont prévues. Un point important quand on apprend que très souvent le responsable attend d'être transporté «pour la réception du chantier» par l'entrepreneur. Les actes de complaisance sont ainsi difficiles à contenir. Cela pour dire que les problèmes ont été abordés dans les moindres détails et leurs solutions fixées. Une fois le contrôle réhabilité, la qualité pourra être de mise. Les règles d'urbanisme aussi. Deux impératifs qui, avant la relance, relevaient de l'utopie. «Nous n'avons pas été capables de reproduire une rue Didouche-Mourad ou Larbi-Ben M'hidi», lance, amer, le ministre. C'est là une étape pas très lointaine au regard des défis déjà relevés. L'aspect financier est déterminant pour la réussite d'une politique aussi ambitieuse. Dans un premier temps, toutes ces réalisations n'ont été possibles que sur fonds publics. A signaler toutefois qu'une bonne partie du programme (26.000 logements) a pu être réalisé grâce à des fonds arabes (saoudiens, émiratis, Fades...) sous forme de dons où prêts préférentiels. Une société mixte entre l'Aadl et la Banque Baraka est en voie de finalisation (mi-février) pour la poursuite de la formule location-vente. La cession des logements sociaux contenus dans la loi de finances 2002 dont «les prix seront incessamment fixés» comme annoncé par M.Benflis, permettra d'engranger des fonds qui seront reversés dans les programmes de la location-vente. L'investissement privé et étranger est vivement encouragé. Les entreprises étrangères, chinoises, égyptiennes, brésiliennes... retenues pour réaliser des tranches du programme 2001 de la location-vente dont le nombre a doublé pour le programme 2002 en seront, à ne pas douter, le terreau. Leur «sédentarisation» et leur transformation en promoteurs sont plus que probables. A cette condition toutefois de débarrasser le pays du fléau de la bureaucratie. Une lutte qui implique plusieurs départements ministériels. Tout laisse croire que leur implication est acquise. Le ministre des Finances et celui chargé des Collectivités locales étaient présents à la séance de clôture. Toute cette politique de l'habitat aura été incomplète sans un fichier national à même d'éliminer les «faux demandeurs». Travail ardu s'il en est, mais déjà bien entamé par le ministère de l'Habitat et dont les premiers effets sont perceptibles dans le traitement des dossiers de la location-vente. Tous les Opgi du pays sont mis à contribution ainsi que le Fonal, les APC et bientôt les domaines et la conservation foncières. Tous les possédants à un titre ou à un autre seront recensés et connus. Les doubles ou triples attributions n'auront aucune chance de passer. En revanche, la justice sévira contre ceux qui, dorénavant, seront pris en flagrant délit de trafic. Seule manière d'assainir un secteur source d'enrichissement pour certains au détriment de larges couches de la population en attente d'un toit. Noble, mais rude mission d'un ministère de l'Habitat sur les regards de dizaines de millions d'Algériens sont braqués.