La distanciation entre les deux pays s'est accentuée quand Londres a offert gîte et protection à des terroristes. La visite officielle qu'effectuera, aujourd'hui et demain, M.Bouteflika à Londres, la première d'un président algérien depuis l'indépendance du pays en 1962, sera l'occasion de clôturer certains dossiers et d'en ouvrir d'autres. Parmi les dossiers à clôturer, il y a celui lié au «contentieux» des extraditions. Resté en suspens pendant des années, le problème des extraditions a été remis en surface. Londres a toujours refusé d'extrader des Algériens islamistes revendiqués par la justice algérienne. Le motif invoqué est que ces personnes «seraient torturées, une fois arrivées à Alger». Selon l'ambassadeur d'Algérie en Grande-Bretagne, Mohamed Salah Dembri, M.Bouteflika paraphera, lors de sa visite, les termes d'un accord signé le 8 juin dernier à Alger par le ministre britannique délégué aux Affaires étrangères, Kim Howells. Il portait sur les extraditions. C'est d'ailleurs pour clôturer définitivement ce dossier que le ministre de la Justice algérienne, Tayeb Belaïz, fait partie de la délégation de ministres qui accompagne le président Bouteflika à Londres. Après des mois de tergiversations, Londres a enfin expulsé, les 16 et 17 juin, deux Algériens soupçonnés de terrorisme et figurant parmi sept Algériens arrêtés en septembre 2005. D'autres expulsions d'Algériens doivent suivre au terme de l'accord qui sera paraphé par le président Bouteflika. Au total, 17 Algériens sont actuellement, en détention ou sous contrôle judiciaire en Grande-Bretagne, en attente d'expulsion. En outre, l'Algérie tente d'obtenir depuis plus de deux ans l'extradition de l'ancien patron du groupe Khalifa, Abdelmoumen Rafik Khalifa, poursuivi en Algérie et réfugié à Londres. Pour marquer leur volonté d'une coopération judiciaire, les deux parties signeront trois autres accords sur l'«entraide judiciaire en matière pénale», l'«entraide judiciaire en matière commerciale et civile» et «la circulation des personnes». Les autres dossiers à ouvrir porteront sur les relations entre les deux pays. Il s'agit d'ouvrir une nouvelle page. Traditionnellement, les relations entre les deux pays se sont toujours situées en seconde zone des préoccupations d'Alger et de Londres. Au fait, il n'existe pas de traditions entre les deux capitales en matière de relations bilatérales. Les relations économiques sont épisodiques et ne reflètent pas l'importance des pays dans leur sphère géographique. Si l'on excepte la vente du matériel militaire (notamment des véhicules Land Rover) les relations commerciales sont très faibles. Cette distanciation algéro-britannique s'est particulièrement traduite dans le comportement de Londres vis-à-vis des islamistes algériens dont la plupart sont passés par le Pakistan. Cette distanciation s'est gravement accentuée quand la Grande-Bretagne a offert gîte et protection à des islamistes algériens potentiellement dangereux. Ces islamistes, qui revendiquaient des attentats et appelaient au djihad à partir de Londres, ont fini par inquiéter leur protecteur. Londres a chèrement payé son laxisme: en juillet dernier des attentats suicide ont coûté la vie à 56 personnes. C'est en aplanissant ces questions que la visite du président Bouteflika constitue pour nombre d'observateurs, un tournant dans l'histoire des relations bilatérales. Lors de cette visite, le chef de l'Etat présidera la cérémonie de signature sur les relations bilatérales. M.Bouteflika rencontrera également la reine Elisabeth II à Buckingham Palace avant de s'entretenir avec le Premier ministre Tony Blair. Les discussions devront ensuite s'élargir aux membres des deux délégations, à l'occasion d'un déjeuner suivi d'une conférence de presse. Au palais de Westminster, au siège du Parlement britannique, le président Bouteflika sera accueilli par les présidents des deux chambres du Parlement britannique (la chambre des communes et des lords), un insigne honneur rarement accordé aux dirigeants. Il devra prononcer une allocution lors de la rencontre avec le groupe interparlementaire sur l'Algérie. M.Bouteflika rencontrera également le président du British Council, institution chargée de la promotion de l'image de la Grande-Bretagne à l'extérieur, avant de prendre part à une réception à laquelle seront conviés les principaux opérateurs économiques et hommes d'affaires britanniques. Au dernier jour de sa visite, le président recevra les ambassadeurs des pays africains et arabes. Enfin, il effectuera une visite au siège du Lord-mayor de la City, quartier financier de Londres où se trouvent les principales banques, compagnies d'assurances, médias et autres compagnies mondiales des finances.