Tradition d'intolérance confirmée à l'égard de toute manifestation de rue à Alger. Même si le soleil de plomb n'avait pas l'intention de stopper les troupes de Boudjerra Soltani, décidées à marcher, jeudi à Alger, en signe de solidarité avec le peuple libanais, la police a été, par ailleurs, déterminée à ne pas rater sa sortie. Les attroupements ont débuté vers 10h du matin, mais les éléments de la police cadraient déjà la place du 1er-Mai, baptisée aussi «place de la Concorde.» L'activité de l'ex-Hamas, tendant à rallier des partisans à cette idée de manifestation, ne datait ni de jeudi dernier ni aussi de la veille. Le MSP voulait aller au-delà de ces intentions et investir le terrain, en dépit de toutes les mises en garde officiellement prononcées. Une journée à l'avance, le parti de Boudjerra commençait à placarder des affiches, incitant les populations algéroises à investir la rue pour manifester leur soutien au peuple libanais. «Marche contre le mutisme et l'humiliation», c'est ainsi que le MSP qualifiait sa sortie, réduite au silence à la suite de l'intervention des éléments de la police. Les manifestations de rue sont interdites dans la capitale depuis la fameuse marche des archs du 14 juin 2001. Le successeur de cheikh Nahnah voulait-il défier l'ordre établi et changer une tradition «désapprouvée»? Les passants ne semblaient pas intéressés par ce qui se passait, ce jeudi, autour d'eux. Dans un va-et-vient ininterrompu, ils savaient que l'atmosphère, chargée, ce matin-là, d'une forte dose de chaleur et d'humidité, n'était pas ordinaire. Des fourgons de CRS ont été stationnés tôt dans la matinée sur les alentours de la «place de la Concorde.» Les éléments armés de l'intransigeance sont prêts à désamorcer le moindre rassemblement. Les premiers signaux de la tolérance zéro, à l'égard de la moindre manifestation, sont d'ores et déjà présents. 10h passées, des personnes commençaient à se distinguer par des regroupements repérés sans trop de problèmes. Certains dirigeants militants du Mouvement de la société pour la paix font apparition, suscitant un mouvement d'attroupement qui a pris illico l'ampleur non-souhaité par les services d'ordre. L'intervention ne se fait pas attendre. C'est alors que les éléments de la police procèdent à l'application du plan anti-attroupement. Des personnes qui se réclamaient déterminées ont été embarquées et conduites au commissariat qui se trouve à une dizaine de mètres, tandis que les têtes dirigeantes ont été priées de quitter les lieux dans le calme. Aucune résistance ne s'est manifestée au moment où d'autres petits rassemblements ont été désamorcés aux alentours proches. Sortie ratée de l'ex-Hamas et tradition d'intolérance confirmée à l'égard de toute manifestation de rue à Alger. Le lendemain, soit vendredi, le MSP regrettait, dans un communiqué adressé à notre rédaction, l'intervention de la police qui a contrecarré son action. L'ex-Hamas dénonce par là même «les pratiques d'insultes, de matraquage et de détention» ainsi que le maintien de l'état d'urgence qui est, selon les rédacteurs du communiqué, «à l'origine de l'interdiction des manifestations de rue.» Dans la même déclaration, le parti de Boudjerra Soltani se dit déterminé davantage et invite les Algériens à se solidariser avec le Liban. De son côté, son allié et actuel chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a exprimé, dans un entretien téléphonique, au Premier ministre libanais, Fouad Siniora «les sentiments de solidarité du peuple algérien envers le peuple libanais, en ces douloureuses circonstances». Abdelaziz Belkhadem a informé aussi son homologue libanais de la décision du président de la République «d'acheminer une aide d'urgence au Liban.»