Le cessez-le feu ordonné par la Russie pour le Noël orthodoxe a commencé hier en Ukraine, première trêve d'ampleur depuis le début de l'invasion, un geste interprété par Kiev et ses alliés comme la volonté de gagner du temps de la part de Moscou. Suivant un appel du patriarche orthodoxe russe Kirill, mais aussi une proposition du chef de l'Etat turc Recep Tayyip Erdogan, le président russe Vladimir Poutine a demandé jeudi à l' armée d'observer un «cessez-le-feu sur toute la ligne de contact entre les parties à partir de 12h00 le 6 janvier de cette année jusqu'à 24h00 le 7 janvier». Il a appelé les forces ukrainiennes à respecter cette trêve afin de donner la possibilité aux orthodoxes, la confession majoritaire en Ukraine comme en Russie, d'«assister aux offices la veille de Noël, ainsi que le jour de la Nativité du Christ». Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fustigé cette annonce qui n'est, selon lui, qu'une «excuse dans le but d'au moins arrêter l'avancée de nos troupes dans le Donbass et apporter équipements, munitions, et rapprocher des hommes de nos positions». Il a en revanche salué la «décision très importante» des Etats-Unis et de l'Allemagne qui ont promis à Kiev la livraison de blindés d'infanterie, de type Bradley côté américain et de modèle Marder côté allemand, après l'annonce par la France d'envoi de chars légers. Berlin s'est aussi engagé à fournir une batterie de défense antiaérienne Patriot, comme l'a déjà fait Washington. Le cessez-le-feu ordonné par Moscou constitue la première trêve à caractère général depuis le début du conflit, seuls des accords locaux ayant été jusqu'alors conclus comme par exemple pour l'évacuation des civils de l'usine Azovstal à Marioupol (sud-est) en avril. Pour le président américain, Vladimir Poutine cherche «à se donner de l'air». Il «était prêt à bombarder des hôpitaux, des crèches et des églises (...) le 25 décembre et lors du Nouvel An», a ironisé Joe Biden. Ce cessez-le-feu «ne fera rien pour faire avancer les perspectives de paix», a réagi le ministre britannique des Affaires étrangères James Cleverly, en réclamant un retrait définitif des forces russes. Une telle trêve n'apportera «ni liberté ni sécurité», a abondé la diplomatie allemande. Dans sa conversation téléphonique avec Vladimir Poutine, le président turc Erdogan avait proposé un «cessez-le-feu unilatéral» destiné à soutenir «les appels à la paix et les négociations entre Moscou et Kiev». La Russie est prête à un «dialogue sérieux» avec l'Ukraine à condition que celle-ci réponde aux conditions russes et accepte les «nouvelles réalités territoriales» nées de l'invasion de ce pays en février, a fait valoir Vladimir Poutine. Moscou a revendiqué en septembre l'annexion de quatre régions occupées au moins partiellement par son armée en Ukraine, malgré de multiples revers militaires sur le terrain, sur le schéma de celle de la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014. Volodymyr Zelensky insiste pour un retrait total des forces russes de son pays, Crimée comprise, avant tout dialogue avec Moscou. Dans le cas contraire, il promet de reprendre par la force les territoires occupés. À l'occasion de ses discussions avec Erdogan, Poutine a accusé les Occidentaux de «gaver le régime de Kiev d'armes et d'équipements militaires et de lui fournir des informations opérationnelles et de ciblage». La trêve russe est proposée moins d'une semaine après une frappe ukrainienne dans la nuit du Nouvel An qui a fait au moins 89 morts à Makiïvka, dans l'est de l'Ukraine. Un bombardement meurtrier qui a suscité la colère et des critiques en Russie. Sur le front, les bombardements se sont poursuivis jeudi à Beryslav, près de Kherson, dans le sud. Deux personnes ont également été tuées et trois autres blessées dans une frappe dans la région de Zaporijjia, également dans le sud.