Attentat «terroriste» ou acte isolé? Les autorités tunisiennes enquêtent mercredi pour élucider les circonstances d'une attaque menée par un gendarme ayant tué deux de ses collègues et deux personnes devant une synagogue sur l'île de Djerba, pendant le pèlerinage juif annuel, avant d'être abattu. La synagogue de la Ghriba, la plus ancienne d'Afrique, avait déjà été visée en 2002 par un attentat-suicide au camion piégé qui avait fait 21 morts. «Une enquête criminelle préliminaire a été ouverte», a déclaré Fethi Bakkouche, porte-parole du tribunal de Médenine (sud-est), dont dépend l'île de Djerba. Deux personnes qui participaient à un pèlerinage juif dans la synagogue de la Ghriba, sur l'île tunisienne de Djerba (est), ont été tués mardi soir dans une attaque menée par un gendarme qui a également tué deux collègues avant d'être neutralisé, a annoncé le ministère de l'Intérieur. Cette synagogue, la plus ancienne d'Afrique, avait déjà été visée en 2002 par un attentat-suicide au camion piégé qui avait fait 21 morts. L'attaque a eu lieu en deux temps, a indiqué le ministère dans un communiqué. Le gendarme auteur des tirs a d'abord tué l'un des ses collègues par balle et s'est emparé de ses munitions. Puis il s'est rendu aux abords de la synagogue où il a ouvert le feu sur les forces de l'ordre assurant la sécurité du lieu avant d'être abattu. Deux «visiteurs» de la synagogue ont été tués par les tirs de l'assaillant avant qu'il ne soit abattu, et quatre autres ont été blessés et évacués vers un hôpital, a ajouté le ministère. Le ministère tunisien des Affaires étrangères a précisé dans un communiqué que les deux morts étaient «un Tunisien âgé de 30 ans et un Français de 42 ans», sans en fournir les identités. Un autre gendarme a également été tué et cinq autres blessés par les tirs de l'assaillant, selon le ministère de l'Intérieur. À la suite de l'attaque, l'ambassade de France à Tunis a annoncé avoir ouvert «une cellule de crise» et mis en place un numéro d'urgence. «Les Etats-Unis déplorent l'attaque perpétrée en Tunisie, qui coïncide avec le pèlerinage juif annuel attirant à la synagogue de la Ghriba des fidèles du monde entier. Nous exprimons nos condoléances au peuple tunisien et saluons l'action rapide des forces de sécurité tunisiennes», a réagi sur Twitter Matthew Miller, le porte-parole du département d'Etat. L'attaque s'est produite alors que des centaines de visiteurs participaient au pèlerinage juif annuel de la Ghriba qui touchait à sa fin mardi soir dans cette synagogue. Les forces de sécurité «ont encerclé la synagogue et sécurisé tous ceux qui se trouvaient à l'intérieur et aux abords», selon le ministère de l'Intérieur. «Les investigations se poursuivent pour élucider les motifs de cette agression lâche», a ajouté le ministère, se gardant à ce stade d'évoquer une attaque terroriste. Les médias tunisiens avaient dans un premier temps fait état de tirs près de la synagogue de la Ghriba après le meurtre d'un policier dans des circonstances confuses. Les tirs ont été entendus depuis la synagogue, provoquant un mouvement de panique parmi les centaines de visiteurs participant au pèlerinage juif annuel, selon les médias. Selon les organisateurs, plus de 5 000 pèlerins juifs, essentiellement venus de l'étranger, ont participé cette année au pèlerinage de la Ghriba qui a repris l'année dernière après deux ans d'interruption en raison de la pandémie de Covid-19. Organisé au 33e jour de la Pâque juive, le pèlerinage de la Ghriba est au coeur des traditions des Tunisiens de confession juive, qui ne sont plus que 1 500, majoritairement installés à Djerba, contre 100 000 avant l'indépendance en 1956. Des pèlerins viennent aussi traditionnellement de pays européens, des Etats-Unis ou encore de l'entité sioniste, mais leur nombre a considérablement diminué après l'attentat de 2002. Cette attaque survient au moment où le tourisme enregistre une forte reprise en Tunisie après un net ralentissement pendant la pandémie. Après plusieurs années de dégradation en raison de l'instabilité qui a suivi la révolution en 2011, ce secteur clef pour l'économie tunisienne avait été gravement affecté après les attentats de 2015 contre le musée du Bardo à Tunis et un hôtel de Sousse, dont le bilan s'était élevé à 60 morts dont 59 touristes étrangers. Après la révolte populaire de 2011 ayant renversé Zine El Abidine Ben Ali, la Tunisie a connu un essor des groupes terroristes mais les autorités affirment avoir obtenu ces dernières années des progrès significatifs dans la lutte contre le terrorisme. L'attaque survient alors que la Tunisie traverse une grave crise financière qui a empiré depuis que le président Kaïs Saïed a engagé un processus de remise en ordre en juillet 2021, critiqué par les parrains de «la démocratie née de la première révolte du Printemps arabe en 2011».