Les Etats-Unis et le Japon doivent resserrer encore un peu plus dimanche leurs liens militaires et de défense face à l'influence grandissante de la Chine et à la menace nord-coréenne. Le ministre américain de la Défense Lloyd Austin, présent à Tokyo aux côtés du secrétaire d'Etat américain Antony Blinken pour des réunions avec leurs homologues japonais, doit annoncer la mise en place d'une nouvelle structure de commandement au Japon, a indiqué un responsable militaire américain sous couvert d'anonymat. Ce quartier général, qui sera dirigé par un général trois étoiles, permettra «une meilleure interopérabilité et de favoriser les manoeuvres communes» avec les forces japonaises, a-t-il ajouté. «Nous considérons qu'il s'agit là d'une annonce historique avec le Japon et l'un des renforcements les plus forts de nos liens militaires en sept ans», a déclaré le responsable. S'il existe déjà un commandement militaire américain au Japon, celui-ci a essentiellement un rôle administratif. A présent, il jouera un rôle opérationnel. Quelque 54.000 soldats américains sont présents au Japon, rattachés au Commandement Pacifique à Hawaï. Cette annonce intervient dans le sillage de la visite du Premier ministre japonais Fumio Kishida aux Etats-Unis en avril, lors de laquelle le président américain Joe Biden avait salué une «nouvelle ère» de coopération avec le Japon, visant à mieux contrer la Chine et la Corée du Nord, ainsi que la Russie. Pour sa part, le chef de la diplomatie américaine, arrivé à Tokyo dimanche matin, poursuit une tournée marathon en Asie, qui vise à renforcer les alliances et partenariats des Etats-Unis dans la région. La veille, il a eu des échanges «francs et productifs» avec son homologue chinois Wang Yi à Vientiane, au Laos, en marge d'une réunion des pays de l'Asie du Sud-Est. Washington accuse Pékin d'actions provocatrices notamment autour de Taïwan ainsi qu'en mer de Chine méridionale, et dénonce son soutien présumé à l'industrie de guerre russe, tandis que la Chine soupçonne les Etats Unis de vouloir l'encercler et d'entraver sa croissance. «Sur un certain nombre de points, ils pensent que nous tentons d'empêcher la Chine de croître et nous leur disons clairement que non, que ce n'est pas notre objectif», a assuré à des journalistes un haut responsable du département d'Etat sous couvert d'anonymat. En privé, des diplomates américains concèdent cependant que le jeu d'alliances et de partenariats noué tous azimuts par les Etats-Unis vise à envoyer un message clair à Pékin. Les deux grandes puissances se livrent une compétition féroce pour la suprématie mondiale. MM. Blinken et Austin doivent participer dimanche après-midi à des entretiens dits «2+2» avec leurs homologues japonais, Yoko Kamikawa et Minoru Kihara. Ils seront rejoints lundi par leurs homologues du «Quad», autre alliance considérée comme un rempart contre Pékin, le ministre indien des Affaires étrangères S. Jaishankar et l'Australienne Penny Wong. Les discussions américano-nipponnes de dimanche doivent également porter sur la «dissuasion élargie», sorte de parapluie sécuritaire de Washington pour protéger le Japon. Le Japon, seul pays au monde à avoir été la cible de deux bombes atomiques lancées par les Etats-Unis, a progressivement abandonné ces dernières années sa politique de stricte pacifisme imposée depuis la Seconde Guerre mondiale. Tokyo a considérablement augmenté ses dépenses militaires et s'efforce de se doter de capacités de «contre-offensive». En juillet, le Japon et les Philippines - prochaine étape mardi de MM. Blinken et Austin pour un autre «2+2» - ont signé un pacte de défense qui autorisera le déploiement de troupes sur le territoire de l'autre. Ce pacte fait suite au premier sommet trilatéral qui s'est tenu en avril à Washington entre les dirigeants du Japon, des Philippines et des Etats-Unis. De leur côté, le Japon et la Corée du Sud ont également décidé d'enterrer la hache de guerre concernant la Seconde Guerre mondiale, le président américain Joe Biden ayant accueilli les dirigeants des deux pays à Camp David en août dernier. Le ministre sud-coréen de la Défense, Shin Won-sik, est d'ailleurs présent à Tokyo dimanche et lundi, pour la première fois en 15 ans, et doit rencontrer M. Austin. Une réunion trilatérale, également jugée «historique», selon le responsable militaire américain, a eu lieu dimanche.