La wilaya est condamnée à changer de look pour attirer les investisseurs. Cette réalité amère n'est peut-être pas spécifique à cette wilaya, mais il faut tout de même souligner que l'essor de son activité industrielle ne suit pas les ambitions économiques auxquelles aspirent les responsables et la population de la région, notamment en matière de création d'emplois. Celle-ci demeure bien évidemment le seul et unique paramètre en mesure d'endiguer le chômage grandissant et par conséquent, la pauvreté et la précarité dans lesquelles vit une grande partie des habitants de la région. La wilaya de Bouira, et de l'avis de nombreux responsables, regorge de potentialités capables de la métamorphoser en un séduisant carrefour d'échanges et en un véritable pôle attractif, eu égard à sa situation géographique. Promue au rang de wilaya en 1974, à ce jour, Bouira cherche constamment ses repères pour arriver à faire bouger son activité et réussir son décollage. Ne possédant pas de port, ni d'aéroport ou autres infrastructures d'envergure pouvant donner naissance à de réelles possibilités en matière de création d'emplois, Bouira demeure de ce fait une wilaya sans spécificité apparente comparée à d'autres wilayas créées bien après elle. Un constat qui laisse perplexe toute personne étrangère en visite dans la région. Dans cet ordre d'idées, le président de la fédération de la wilaya de Bouira et membre du Conseil supérieur du patronat algérien, M.Mecheddou, souhaite que le volet investissement soit traité avec plus de considération par les autorités en soulignant: «Les walis qui ont exercé à Bouira par le passé n'ont pas vraiment favorisé la venue des investisseurs, le principal obstacle étant le problème du foncier qui se pose avec acuité, notamment dans les régions est de la wilaya». Mais cette carence n'explique qu'en partie l'absence des investisseurs dans cette wilaya car, si le manque de foncier représente un grand problème pour la réalisation de projets dans certaines régions, il n'en demeure pas moins que dans de nombreuses autres daïras, cette difficulté n'existe pas. Citons pour cela les plaines des Aribs du côté d'Ain Bessem où est cultivée la pomme de terre sur des centaines d'hectares sans que cela profite aux habitants de la wilaya. Tout au long de ces étendues irriguées à partir du barrage Lakhal d'une capacité de 32 millions de m3 et construit à quelques encablures de la ville d'Aïn Bessem, aucun projet industriel (conserveries, unités de conditionnement ou autres dans ce créneau) n'a encore fait son apparition. Aussi, au niveau de la zone industrielle de Sidi-Khaled relevant de la commune d' Oued El-Bardi dont la zone industrielle s'étend sur plus de 220 hectares, ou encore au niveau des zones d'activité de Sour El Ghozlane ou celle de Dirah qui se trouve à ce jour complètement vierge, toutes les conditions sont réunies pour permettre aux investisseurs d'implanter leurs projets. Au niveau de la zone industrielle de Sidi-Khaled, point névralgique de la wilaya, le ministre de la Petite et Moyenne entreprise et de l'Artisanat, Mustapha Benbada, qui effectuait une visite d'inspection au mois de juin dernier, devait constater que sur les 25 projets d'investissement initialement prévus, seuls 5 sont en état de productivité tandis que 17 autres sont à l'arrêt et 2 non encore lancés et enfin 1 en cours de réalisation. Cela dit, le déficit devrait être normalement rattrapé au vu des 14 milliards injectés dans la région afin de permettre la viabilisation de la zone et de lancer, entre autres, 12 projets dont une briqueterie et tuilerie, une unité de fabrication de fil d'acier, de plastique ainsi que deux complexes de papeterie. Lors de cette visite, une rencontre a réuni le ministre et les investisseurs de la région et a permis de cerner les problèmes et les difficultés auxquels sont confrontés les investisseurs. Ont été abordés l'attribution de locaux, les assiettes foncières, les charges fiscales et parafiscales ainsi que l'impact du marché informel sur l'activité de l'investisseur. A ce propos, le ministre avait assuré que l'administration est prête à mettre un local à la disposition de chaque investisseur désirant lancer son projet. Concernant le problème du foncier, dont la nature juridique pose souvent problème, le ministre avait plaidé pour la normalisation de l'activité tout en reconnaissant que, pris entre le Calpi, l'agence foncière et les domaines, l'investisseur ne sait plus souvent à quel saint se vouer. Certes, les responsables sont constamment à l'écoute des détenteurs de projets d'investissement, le but étant d'arriver à annihiler les entraves qui empêchent particulièrement l'activité industrielle d'avancer, mais entre les legs, déclarations et promesses d'une part, et la réalité du terrain de l'autre, il y a loin de la louche à la bouche. La bureaucratie, la corruption et autres fléaux qui gangrènent l'administration, sont là et s'érigent souvent comme des couperets pour castrer les ardeurs, briser les volontés et ralentir par conséquent, la cadence du développement du pays. De plus, à voir de près de marasme dans lequel se débat l'activité industrielle et économique de la wilaya, il y a lieu de dire que rien ou presque n'a été entrepris en matière de marketing et de publicité pour attirer de potentiels investisseurs. A défaut de constituer, de par ses multiples atouts, un dominant pôle attractif, voire même un modèle en matière d'investissement, particulièrement dans les domaines de l'industrie, de l'agriculture et du tourisme, Bouira ressemble, à ce jour, à un grandiose village aux constructions éparses. Son image et son aspect de ville ancrée dans la poussière du passé n'attisent guère la curiosité des visiteurs et encore moins celle des investisseurs. Ces derniers préfèrent se tourner vers les wilayas et les villes voisines pour en faire des entités économiques d'envergure nationale et internationale. Ce constat nous renvoie, hélas, à la philosophie byzantine et nous fait penser à l'histoire de l'oeuf et de la poule.