En fin de journée d'hier, on jouait des coudes, devant le seul bureau où devaient être déposés les dossiers. L'annonce de la clôture de l'opération des dépôts de comptes sociaux des Sarl et autres sociétés commerciales pour mercredi 8 novembre, a créé une anarchie au sein du siège du Centre national du registre du commerce de Bordj El Kiffan, à Alger. A l'origine de ce cafouillage, «un brusque sursaut» des pouvoirs publics qui ont décidé d'appliquer une loi vieille de deux ans. Sans quoi, les entreprises seront soumises à des amendes allant de 30.000 à 300.000DA, voire même, dans certains cas, à des peines d'emprisonnement. La loi en question est relative aux conditions d'exercice des activités commerciales. Elle date du 14 août 2004 et oblige les sociétés commerciales, les banques et les établissements financiers à procéder au dépôt de leurs comptes sociaux pour publication au Bulletin officiel des annonces légales (Boal). Au siège du Cnrc, l'anarchie va crescendo à mesure que les heures s'égrènent. Il ne reste plus de temps. La clôture se fera demain. Les gérants d'entreprise et les comptables mettent à l'index une défaillance de communication de la direction du Cnrc. «J'habite à moins d'un kilomètre de ce siège (le siège du Cnrc Ndlr) et je ne suis pas informé de cette opération. L'information n'a pas été publiée dans les journaux», s'emporte Ziani, gérant d'une Sarl à Alger. «Je me rends périodiquement à la Cnas, à la Cobat, aux impôts; je n'ai jamais eu vent de cette information», appuie un autre gérant. «Aucune mise en demeure, aucune note n'a été adressée à nos comptables», réplique un autre. «Pourquoi faire venir des milliers de personnes, à des milliers de kilomètres alors qu'en principe, au niveau de chaque wilaya, il existe une annexe du ministère du Commerce. Pourquoi cette centralisation» fait remarquer M.Moussaoui, comptable de profession. «Ils brandissent l'argument des délais mais je me demande comment les services du Cnrc qui n'arrivent pas à accueillir convenablement une centaine de personnes peuvent-ils traiter 30.000 dossiers en trois mois?» s'interroge un autre comptable. Annoncés en juillet dernier, les délais de cette opération sont en principe terminés mais viennent d'être prolongés jusqu'au 8 novembre. En fin de journée d'hier, on jouait des coudes, devant le seul bureau où devaient être déposés les dossiers. Des dizaines de comptables et de gérants d'entreprises certains habitant à des centaines de kilomètres d'Alger, attendent contrariés, devant ce bureau. «Dites-nous si c'est comme ça qu'on accueille les entreprises algériennes en 2006 dans leur pays? Dites-nous si c'est vraiment comme ça qu'on sera compétitifs?» regrette un jeune chef d'entreprise. «J'ai démarré à deux heurs du matin de Tébessa avec tous les risques sécuritaires que cela suppose pour une opération que je pouvais effectuer au niveau de ma wilaya», déplore, courroucé, le gérant d'une Sarl de Tébessa. Du côté de la direction, c'est la formule redondante du «tout va bien» qui résonne. Le directeur général du Cnrc a jugé «qu'il ne faut pas faire cas d'une opération banale et qui, de toutes les façons prendra fin demain». Pour le premier responsable, son organisme applique la loi et «ceux qui osent critiquer l'opération sont de mauvaise foi». Soit, mais hier au siège du Cnrc tous les présents critiquaient, non pas la loi, mais un manque flagrant d'information et une défaillance de communication.