90% des femmes sahraouies sont anémiques, dont 70% sévèrement atteintes. «On meurt de faim, tandis que des animaux sont mieux nourris ailleurs». Cette expression d'un cheikh sahraoui, teintée d'une forte dose de désarroi, résume en gros et dans le détail une situation arrivée à l'extrême. Qui peut sauver les quelque 160.000 réfugiés sahraouis de la famine? 90% des femmes sahraouies sont anémiques, dont 70% sévèrement atteintes. C'est un simple élément d'illustration, mais qui annonce simplement et clairement des prévisions d'une disette au sens propre du terme. Des maladies sont d'ores et déjà détectées. Le premier constat d'une expertise médicale effectuée dans les camps des réfugiés donne sérieusement la chair de poule. Pilar Martinez, Docteur et représentante de la mission de Galicia (Espagne) de solidarité avec les enfants sahraouis, nous fait savoir que des maladies sont découvertes, notamment chez les enfants, mais qui n'ont jamais été détectées auparavant dans le camps des réfugiés. Ces maladies, explique le Docteur Pilar Martinez, sont l'effet direct de la malnutrition. Des crises digestives aiguës, des bronchites sévères, des surinfections pulmonaires et des anémies, pour ne citer que ces maladies, l'alerte est bel et bien sérieuse. «Les enfants sahraouis ne consomment que quelque 250 calories par jour, alors que la moyenne admise pour la survie d'un enfant est de 3000 calories/jour». Selon un médecin fréquentant les camps des réfugiés depuis sept ans, le constat est loin d'être une plaisanterie. C'est l'urgence que devra, impérativement, prendre en compte le PAM (Programme alimentaire mondial), en visite depuis samedi dans les camps des réfugiés sahraouis. Toutefois, le discours, trop démagogique de son directeur exécutif, James Thomas Maurice, reçu hier par Abdelaziz Belkhadem, chef du gouvernement, lors d'une audience à laquelle a pris part Mohamed Bedjaoui, ministre d'Etat, ministre des Affaires Etrangères, ne répondait pas à cette urgence. D'ailleurs, celui-ci a failli être pris à partie par les Sahraouis, visiblement lassés par la défaillance des instances onusiennes chargées d'épauler les populations en difficulté. Le justificatif avancé par la délégation du PAM, une tentative de renvoyer la balle à d'autres camps, ne tient pas la route, à en croire les responsables sahraouis. Selon Mohamed Abdelaziz, président de la République arabe sahraouie démocratique (Rasd), toutes les statistiques sont disponibles afin d'évaluer la situation. Ces mêmes chiffres sont communiqués par le Croissant-Rouge sahraoui et le bureau du PAM à Tindouf. Un rectificatif qui vient à point nommé. James Maurice prétendait sans relâche que son organisation ne joue pour le compte d'aucun clan et ne s'incline devant aucune pression. Faut-il croire les responsables du PAM? Nous avons pu vérifier, auprès des instances sahraouies, qu'il existait effectivement des statistiques sur le nombre des réfugiés, les cas de décès et les nouvelles naissances. Un désaveu très lourd. Des membres du conseil des cheikhs sahraouis révèlent que le PAM n'a jamais été à l'abri des pressions franco-espagnoles. Ils parlent justement en connaissance de cause. «Les alliés du Maroc voulaient jouer la carte de la faim contre le peuple sahraoui pour qu'il s'incline et accepte le projet de l'autonomie», accuse le premier responsable du conseil des cheikhs sahraouis.