La casbah d'Alger, cette vieille médina au charme indéniable, est un lieu vivant de culture, d'histoire et de traditions. C'est dans les ruelles animées de la Medina légendaire que l'on ressent toute la magie du mois sacré. Chaque année, durant le Ramadhan, une partie d'El Mahroussa se transforme en un centre de vie où se mêlent odeurs, saveurs, couleurs et sons qui nourrissent l'âme. Dès la mi-journée, les effluves de cuisson des plats traditionnels envahissent les rues étroites et sinueuses, nous rappelant la convivialité et le partage qui caractérisent cette période. Les arômes des épices fraîchement moulues se répandent, émanant de l'emblématique marché couvert situé à quelques pas de la mosquée Ketchaoua. Non loin de là, la célèbre zniket Laârayès, une rue animée de la basse Casbah, occupe une place centrale dans ce quartier historique. Un nombre impressionnant de boutiques transforme les lieux en véritable royaume de la couture et des vêtements traditionnels prêt-à-porter. C'est ici que l'on trouve des tissus richement décorés et des tenues aux couleurs chatoyantes, des pièces uniques qui soulignent l'art de vivre à la casbah et l'amour de la tradition. Depuis la veille du mois sacré, les vendeurs à la sauvette apportent leur touche unique. Ils proposent des guirlandes colorées et des lampes ornées de motifs arabesques, illuminant les rues et les foyers d'une lumière chaleureuse et colorée. Ces objets décoratifs ajoutent une touche festive et symbolique, créant une atmosphère magique qui plonge instantanément dans l'esprit du Ramadhan. En plus des lumières et des décorations, des encensoirs traditionnels sont proposés, accompagnés de «bkhour» et d'ambre, des encens précieux qui diffusent des senteurs envoûtantes. Ces fragrances parfumées imprègnent l'air, ajoutant à la magie et à la sérénité de l'atmosphère ramadhanesque. Le «bkhour» brûlé lors de moments de prière ou de rassemblement, rappelle l'importance du spirituel pendant ce mois sacré. Ces scènes ne sont qu'une infime partie de l'atmosphère festive et chaleureuse qui rend le mois de Ramadhan encore plus charmant à la casbah d'Alger. Les rues autour de zniket Laârayès et du marché de Djamaâ Ibn Farès (ex-Djamaâ Lihoud) sont noires de monde, l'effervescence est palpable dans l'air. Ici, le marché de fruits et légumes est particulièrement animé, les étals débordent de fruits frais, de dattes et de légumes. Des vendeurs ambulants de zlabia, de makrout, de pain y sont également présents. Le marché est pris d'assaut par les acheteurs qui se dirigent vers les différents vendeurs de Qalb el louz, des pâtisseries particulièrement célèbres. Hamid, Hasnaoui et Serir, des boutiques traditionnelles emblématiques ajoutent leur touche sucrée à l'animation du marché. Ces pâtisseries typiquement algériennes, préparées à base d'amandes, de semoule et de sucre, captivent les passants avec leurs arômes irrésistibles. Dans cette ambiance festive, la douceur de Qalb el louz s'entrelace harmonieusement avec la chaleur humaine du Ramadhan, contribuant à l'effervescence gourmande et conviviale qui caractérise les rues de la Casbah pendant ce mois sacré. D'autres vendeurs proposent du «bourek» cuit sur place, une spécialité incontournable pendant le Ramadhan. Parmi les variétés offertes, le «bourek» au poisson se distingue par sa fraîcheur et son goût savoureux. Enroulé dans une pâte fine et dorée, il est préparé à la minute et rempli de poisson,, accompagné de fines herbes et d'épices, créant une explosion de saveurs à chaque bouchée. L'odeur alléchante qui s'en dégage se mêle parfaitement aux autres parfums du marché, ajoutant encore à l'effervescence et à la convivialité de l'instant. Ce mets chaud et délicieux est particulièrement apprécié lors de la rupture du jeûne, symbolisant l'hospitalité et la générosité qui marquent le mois de Ramadhan à la Casbah. La pêcherie d'Alger étant toute proche, les prix restent abordables, ce qui permet aux vendeurs de proposer des produits frais à des tarifs attractifs. Pour conclure le périple, un autre commence au coeur de la Médina classée au patrimoine mondial de l'Unesco. Les premiers mètres des allées sont peints et propres. La Médina résiste au temps! La tristesse étouffe les voix des natifs rencontrés. «Les murs des immeubles sont peints en blanc, cependant à l'intérieur tout est vétuste. Hélas notre Casbah se meurt», confie un habitant, les yeux empreints de nostalgie. Ne dit-on pas «ya li mchebeh melberra wach halek meldakhel? (Toi qui est peint de l'extérieur, quel est ton état réel à l'intérieur?: ndlr)». Ces paroles résonnent comme un cri de détresse, un appel à préserver ce trésor historique. Les murs et les bâtisses racontent l'histoire des sacrifices consentis par nos aïeux pendant la glorieuse révolution de Novembre. Non loin de Djamaâ Ibn Farès, se trouve le musée Ali Ammar, plus connu sous le nom d'Ali la Pointe, situé au 5 Rue des Abderrames (anciennement rue Porte neuve). C'est l'un des sites les plus connus par les visiteurs qui viennent faire le plein. Ce lieu rend hommage à Ali Ammar, Hassiba Ben Bouali, Mahmoud Bouhamidi, et Omar Yacef, surnommé Petit Omar, des commandos de choc de la Zone autonome d'Alger. Ces derniers sont morts, le 8 octobre 1957, après que les parachutistes du général Massu, dynamitèrent leur cachette. Ce musée, chargé d'histoire, est idéalement situé dans un quartier riche en patrimoine, la rue des Abderrames, qui mène à deux mosquées emblématiques: Sidi Mhamed Cherif et Djamaâ Safir. La Casbah est également connue pour ses fontaines typiques de l'Algérois, qui décorent les ruelles et rappellent le passé historique et l'importance de l'eau dans la vieille Médina. Aïn Sidi m'hamed Cherif, Aïn Bir Djebbah, Aïn El Mezaouka, sont toutes ornées de mosaïques et de motifs de giroflées, symbolisant la beauté éternelle et la fidélité. Une fleur que l'on retrouve partout, dans les arcs des entrées des maisons, et bâtisses et des palais. Au- dessus de Aïn El Mezaouka, se trouve celle de sidi Ramdane. Ici, nous sommes dans la haute Casbah, et la vue est imprenable sur la baie d'Alger, avec en supplément, le décor des maisons qui descendent en cascade jusqu'à la mer. La fontaine appartient à la mosqueé de Sidi Ramdane, la plus ancienne de l'Algérois. Elle a été construite au Xème siècle pendant le règne de Bologhine Ibn Ziri dont la statue se trouve un peu plus Haut, à Bab Jdid, l'une des cinq portes emblématiques de la Casbah d'Alger, un point d'entrée historique et stratégique dans cette vieille Médina. Dans ce beau quartier, se dressent encore ladite Citadelle, Dar Essoultane,la prison Barberousse (Serkadji), la statue de Bologhine, fondateur de la ville d'Alger. Non loin de là, un portrait du chef de la Zone autonome d'Alger Yacef Saadi domine les lieux, rappelant l'importance de cette figure dans l'histoire de la ville. L'atmosphère est chargée de l'histoire et de la mémoire des luttes passées. Les ruelles étroites, bordées de maisons anciennes, vibrent au rythme des conversations des habitants, des odeurs alléchantes des mets préparés pour le ftour et de la lumière douce qui commence à envahir les rues, préfigurant l'arrivée du moment tant attendu. Là encore, les sons sont spécifiques. L'adhan qui retentit, appelant les fidèles à la prière est tout aussi spécifique. C'est le Adhan El Assimi. Il est unique à l'instar du récital algérois du Coran, emplissent l'air. La nuit, après les prières de Tarawih, les femmes algéroises se réunissaient pour lire leur «bokala». Un jeu qui se distingue par une récitation de courts poèmes au message de bon présage... C'est là toute la magie du Ramadhan à la Casbah.