La Syrie a connu, entre jeudi et lundi derniers, des évènements tragiques avec des combats meurtriers entre les forces de sécurité du nouveau régime et des combattants fidèles au président déchu, Bachar al Assad, mais aussi de nombreuses exactions envers les civils de la région alaouite. C'est ainsi que les ONG et les agences de l'ONU ont répertorié des exécutions sommaires, des sévices et des assauts contre la population alaouite dont est issu l'ex-président al Assad, notamment dans les régions de Lattaquié et de Tatous. Aucun bilan n'a été officiellement communiqué, mais les réseaux sociaux ont accueilli une abondante documentation, entre vidéos et témoignages directs, tandis que l'Observatoire syrien des droits de l'homme (Osdh), basé à Londres, mais disposant d'un vaste réseau d'alertes à travers le pays, évoque plus d'un millier de civils assassinés de manière barbare en ce mois sacré de Ramadhan. De même, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a assuré qu'il y avait «des centaines de morts», dont des familles entières, alors que l'Osdh chiffre les victimes à 1 225 civils tués, hommes, femmes et enfants. Le président par intérim Ahmad al-Chareh, qui conduisait le groupe radical sunnite Hayat Tahrir al-Sham (HTS) allié d'une coalition de groupes rebelles proches de la Turquie a pris le pouvoir, en décembre 2024, promettant de travailler à une Syrie consensuelle où chaque communauté aura sa place et son rôle dans l'édification d'un Etat moderne. Il a également promis lundi de poursuivre les responsables de «l'effusion de sang de civils», tout en instaurant une commission d'enquête chargée de faire toute la lumière sur les exactions intervenues dans la région alaouite. Les nom- breux témoignages relayés par les organisations de défense des droits humains font état d'une violence inouïe perpétrée par des hommes armés contre la population alaouite, au lendemain d'une attaque de forces de sécurité par des fidèles du président déchu. Les Nations unies déclarent pour leur part que «dans un certain nombre de cas extrêmement troublants, des familles entières - y compris des femmes et des enfants - (...) ont été tuées» par les forces de sécurité et les groupes qui leur sont affiliés, ajoutant même que les auteurs des exactions «ont effectué des descentes dans les maisons, demandant aux habitants s'ils étaient alaouites ou sunnites avant de les tuer ou de les épargner en fonction de leur réponse». Dans le contexte actuel, il est difficile d'incriminer un groupe de combattants radicalisés plutôt qu'un autre, mais il faut rappeler que les autorités avaient lancé des appels à la mobilisation après les attaques contre leurs forces de sécurité par les partisans de Bachar al Assad. L'appel aurait été entendu et suivi par «une intervention massive de milliers de combattants, en aucun cas représentatifs des autorités», estime un observateur. Ces hommes armés sont descendus de la ville d'Idlib, frontalière de la Turquie et bastion de HTS, ainsi que des zones à l'Est d'Idlib où campent les groupes rebelles soutenus par Ankara. Les nouvelles autorités ont officiellement dissous HTS et les groupes rebelles alliés, pressant les Kurdes des FDS et les Druzes d'en faire autant pour préparer l'avènement d'une Syrie unie. Mais l'armée nationale syrienne autoproclamée que soutient la Turquie est toujours en place, avec ses hordes de jihadistes étrangers parmi lesquels des Kirghiz, des Ouzbeks ou des Tchétchènes. À l'origine de cette flambée, le 6 mars, les autorités avaient dénoncé des attaques contre leurs forces et des bâtiments gouvernementaux, ainsi que des hôpitaux, causant 231 morts dans leurs rangs. Peu avant, un ex-général alaouite, Ghayath Dalla, avait indiqué sur les réseaux sociaux la création d'un «Conseil militaire pour la libération de la Syrie».