Le Kremlin a estimé, hier, que les discussions visant à parvenir à une fin de conflit en Ukraine n'en étaient qu'à leur «début», à la veille de pourparlers en Arabie saoudite. «Il s'agit d'un sujet très complexe et il y a beaucoup de travail à faire. Nous n'en sommes qu'au début», a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, à la télévision russe. S'attendant à des «négociations difficiles», Peskiv a précisé que le «sujet principal de discussion», aujourd'hui, serait la reprise de l'accord céréalier en mer Noire, qui était en vigueur entre 2022 et 2023. La Russie a dit aborder dans un état d'esprit «combatif et constructif» une série de négociations sur le dossier ukrainien prévues aujourd'hui avec les Américains en Arabie saoudite, précédées d'une attaque de drones à Kiev. Des délégations ukrainienne et américaine se retrouvaient, hier, en Arabie saoudite, selon le président ukrainien Volodymyr Zelensky sur Telegram. Sont prévues des discussions concomitantes entre Ukrainiens et Américains d'un côté, et Russes et Américains de l'autre. Il s'agira pour ces acteurs de tenter de s'accorder sur une trêve des attaques visant les infrastructures énergétiques des deux camps. L'Ukraine, sous la pression de l'administration de Donald Trump, affirme être toujours «prête» à un cessez-le-feu complet, option pour le moment difficilement envisageable pour Vladimir Poutine tant que des forces ukrainiennes se trouvent sur le sol russe, dans la région frontalière de Koursk. «Nous espérons réaliser au moins quelques progrès», a déclaré samedi l'un des négociateurs russes, Grigori Karassine, à la chaîne de télévision publique Zvezda. «L'état d'esprit de Sergueï Orestovitch (Besseda, l'autre négociateur, ndlr) et de moi-même est combatif et constructif», a-t-il ajouté dans cet entretien avant leur départ prévu dimanche pour l'Arabie saoudite. Sergueï Besseda est, lui, un cadre des services de sécurité russes, le FSB, mais leur profil tranche avec le CV des envoyés russes lors des premières discussions russo-américaines en Arabie saoudite mi-février, lorsque le très expérimenté chef de la diplomatie Sergueï Lavrov avait mené la délégation arrivant de Moscou. En parallèle des discussions diplomatiques, la Russie continue d'attaquer. La nuit de samedi à dimanche a encore été marquée par une attaque de drones russes sur Kiev qualifiée de «massive» par le maire Vitali Klitschko et provoquant des dégâts dans la capitale et plusieurs localités de sa périphérie. L'armée russe a indiqué avoir intercepté 59 drones ukrainiens au cours de la nuit dans plusieurs régions russes et en Crimée, péninsule ukrainienne annexée en 2014. Si les combats se poursuivent, le rapprochement entre Washington et Moscou a rebattu les cartes en vue d'une éventuelle fin du conflit. Samedi, l'émissaire américain, Steve Witkoff, a fait l'éloge de Vladimir Poutine dans un podcast: «Je ne (le) considère pas comme un mauvais type», a-t-il assuré au sujet du président russe. Witkoff, qui a rencontré Vladimir Poutine il y a une dizaine de jours à Moscou, a rapporté que le président russe lui avait remis un «magnifique portrait» du président Trump et lui avait raconté être allé prié pour ce dernier lorsqu'il avait échappé à une tentative d'assassinat pendant sa campagne électorale en juillet dernier. Il a en revanche jugé le président ukrainien Volodymyr Zelensky, contre qui Donald Trump s'était emporté lors d'une récente rencontre à la Maison-Blanche, «dans une situation très, très difficile»: «C'est le meilleur moment pour lui de conclure un accord.» Vendredi, un responsable ukrainien s'exprimant sous le couvert de l'anonymat avait expliqué que Kiev espérait lors des discussions aujourd'hui, «au moins» un accord sur une trêve partielle avec la Russie portant sur le secteur énergétique, les infrastructures et la mer Noire. Afin de pousser à une trêve élargie, Kiev a choisi d'envoyer son ministre de la Défense, Roustem Oumerov, selon ce responsable qui a précisé que l'Ukraine était toujours «prête» à un cessez-le-feu «général». De son côté, Moscou affirme ne s'être entendu à ce stade avec les Etats-Unis que sur une pause concernant les infrastructures énergétiques, bien en-deçà de la suspension générale de 30 jours des hostilités poussée par Donald Trump. Parmi les sujets à aborder, nul doute que les Russes voudront imposer les «nuances» dont a parlé Vladimir Poutine sur la mise en place d'un moratoire et son contrôle, le chef de l'Etat russe disant craindre que l'Ukraine n'utilise une telle trêve pour recruter des soldats supplémentaires et recevoir de nouvelles armes occidentales. Chez les Ukrainiens, on explique que ces pourparlers en Arabie saoudite devraient ainsi se concentrer sur les aspects «techniques» d'un arrêt provisoire partiel des combats: «quels sites», «comment contrôler ce cessez-le-feu, quelles armes?» En attendant, les Européens sont marginalisés dans ces discussions, malgré l'envie affichée, notamment par le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron de faire entendre la voix du Vieux Continent. Un sommet est prévu jeudi à Paris, en présence de Volodymyr Zelensky et des alliés de Kiev.